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Ces flics étranges venus d'ailleurs


Ces flics étranges venus d'ailleurs

Titre original : Ces flics étranges venus d'ailleurs

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Philippe Clair

Année : 1979

Nationalité : France

Durée : 1h33

Genre : Explosion de neurones

Acteurs principaux :Philippe Clair, Les 13 cloches, Flora Alberti, Dominique Webb, Daniel Derval

Nikita
NOTE
3.5/ 5


"Grand prix du rire 1979". Dans quel festival ? Mystère...



Une qualité des films réalisés par Philippe Clair dans les années 1970 est leur refus de suivre les règles narratives traditionnelles, dans un surréalisme aimablement post soixante-huitard. La trilogie des « 13 cloches » occupe ainsi dans la filmographie du Mel Brooks séfarade un rang de point de non-retour dans l’apocalypse du n’importe quoi. Dans « Comment se faire réformer », « Les Réformés se portent bien », et le film qui nous occupe ici (de loin le meilleur - ou, pour les gens normaux, le pire - des trois), Clair avait en effet utilisé les services d’une troupe de comédiens-humoristes, équivalent des Charlots en plus nombreux. Chacun des comédiens reprend ici peu ou prou son rôle des films précédents, avec quelques incohérences ici et là (nous en reparlerons). Apparemment convaincu de tenir une panacée comique universelle en remplaçant la qualité par la quantité, Philippe Clair applique aux films réalisés avec cette fine équipe la recette qui lui avait le mieux réussi par le passé : celle du n’importe quoi improvisé à l’arrache dans l’enthousiasme le plus total. Sauf qu’ici, le délire se trouve multiplié en proportion du nombre de comédiens à l’ouvrage.



Si l’on considère que dans « La Brigade en Folie », le cabotinage de Sim et Jacques Dufilho contribuait largement à faire partir le film en freestyle, quel peut être l’effet de la présence des 13 cloches, sachant que ces derniers, comme leur nom l’indique, sont treize, alors que Dufilho et Sim n’étaient que deux ? Gagné, le quotient de delirium tremens du style de Clair atteint ici son paroxysme, la troupe de gugusses étant sans doute l’une des plus cataclysmiques de toute l’histoire du cabotinage. Si l’on ajoute qu’ils partagent la vedette avec Philippe Clair lui-même, totalement déchaîné dans le rôle principal, nos lecteurs devineront sans peine que le pataquès atteint des niveaux de violence dignes de l’échelle de Richter.


Une manifestation de masse.



« Ces flics étranges venus d’ailleurs » a pour distinction d’être sans doute l’un des films les plus improbables jamais inspirés par le phénomène du chômage. Si ce problème socio-économique a pu donner lieu à des comédies d’excellent niveau, de Chaplin à Monicelli, on ne peut pas dire que sa résurgence dans la France giscardienne soit traitée ici avec une particulière sobriété. L’action tourne autour des mésaventures d’un groupe de chômeurs calamiteux qui, de mésaventure en mésaventure, vont en arriver à devenir le corps de police d’un village perdu du sud de la France, sous l’autorité de leur ancien adjudant au temps du service militaire, le brigadier Prosper Pérez, dit « Tonton Merguez », interprété comme il se doit par Philippe Clair en personne.







A partir des retrouvailles entres le anciens bidasses et Tonton Merguez, le film n’est plus qu’une suite de sketches totalement décousus, où la seule règle valable semble être de lâcher la bride le plus possible aux comédiens, lesquels ont pour instruction de tous cabotiner comme des psychopathes.



L’histoire a pour fil directeur les hold-ups commis par une bande de malfaiteurs accompagnés d’un hypnotiseur joué par le prestidigitateur Dominique Webb. Fort heureusement, Tonton Merguez et sa brigade de flics débiles veillent à la sécurité des honnêtes gens. Autant dire qu’il vaut mieux aller s’enfermer chez soi à double tour.



Dominique Webb est le grand méchant.



Les 13 cloches se composent comme suit : une grande gueule (Hervé Palud, futur réalisateur des « Frères Pétard » et d’ « Un indien dans la ville »), un homosexuel complètement folle (Daniel Derval), un moustachu jovial, un belge et un marseillais aux accents subtils, une espèce de zébulon lunaire (Pierre Triboulet, l’un des rares à ne pas jouer un policier), plus d’autres comparses à la personnalité moins affirmée, ou moins mis en valeur dans le film faute de temps. Tous, en tout cas, semblent se donner à fond pour suivre le délire d’un Philippe Clair qui utilise leurs numéros respectifs pour aller le plus loin possible dans le n’importe quoi, un grand nombre de scènes ressemblant à des improvisations plus ou moins frénétiques. Le film suit une logique de revue de cabaret où chaque comique succèderait à l’autre pour faire son numéro. Le belge fait le belge, Triboulet fait l’intellectuel lunaire, Daniel Derval fait l’homosexuel, etc. Le tout ayant pour fil directeur une vague enquête consistant à capturer des gangsters, avec le cabotinage frénétique de Philippe Clair en policier pied-noir naïf assaisonner le tout.



Daniel Derval et Hervé Palud.



Deux personnalités se dégagent particulièrement de la troupe des 13 cloches :

Tout d’abord, Daniel Derval. Alors moi, je dis que ce gars mérite une médaille. Non seulement son numéro de grande folle hystérique synthétise tout ce qu’on a pu voir de plus outrancier en matière d’homosexuel dans des comédies nanardes, mais en plus il l’a reproduit tel quel dans toute une série de films humoristiques distingués jusqu’au milieu des années 1980. Le symbole même du pédéraste nanar, interprété avec une outrance proprement démentielle ; on se demande parfois ce que l’acteur avait fumé. Respect. Il convient de noter un certain problème de continuité, puisque le personnage de Derval, dans « Comment se faire réformer » et « Les Réformés se portent bien », simulait simplement son homosexualité pour pouvoir couper au service, alors qu'il semble ici être réellement pédéraste.



Ensuite, Pierre Triboulet. Interprète d’un journaliste localier, cet étrange comique au phrasé précieux et décalé réalise une prestation proprement inclassable : son personnage de zébulon extraterrestre est à la fois peu convaincant et pourtant troublant, semblant exprimer une véritable folie mal canalisée chez le comédien.



Ils sont de toutes manières à la hauteur d’un film dont le désordre est le maître mot. Gags loufoques tombant à plat une fois sur deux, cabotinage insensé de tout le monde, agitation de cour de récréation : on en reste pantois devant une agitation aussi frénétique que portnawakesque. Le comble étant notamment atteint quand Philippe Clair et les 13 cloches, enfermés dans le panier à salade, se mettent à chanter en cœur « On est dans le panier, on est dans le panier ! » à tue-tête et en battant des mains. On a le sentiment de voir une bande trentenaires retombés en enfance sous l’effet de quelque gaz hallucinogène.



Dans le registre des gags rendus inefficaces par le passage des ans, on citera l’apparition dans son propre rôle de l’escroc Fernand Legros, vedette dans les années 1970 d’un procès-fleuve pour vente de faux tableaux de maîtres, et que l’on voit ici continuer de trafiquer des crobards. Legros apparaît dans les deux autres films de Clair avec les 13 cloches, mais joue un médecin dans le premier et un curé dans le second. En tout cas, un bel exemple de running gag nul d’un film sur l’autre.


Fernand Legros (à droite, avec le chapeau).


Philippe Clair est... Napoléon !



Le côté largement hallucinatoire du film est assez bien résumé par la séquence de la discothèque, que nos héros infiltrent dans le cadre de leur enquête. Le récit vaguement policier cède la place à un intermède musical totalement gratuit, avec les 13 cloches qui font les idiots sur la piste de danse, tandis que Philippe Clair devient, sans aucune justification, « Survolta », le roi du disco, et se lance dans une imitation pataphysique de John Travolta (pour ceux qui n’avaient pas compris l’allusion), emportant dans le tourbillon d’une danse endiablée les dernières miettes de matière grise du spectateur pantois.




King of the dance floor !



« Ces Flics étranges venus d’ailleurs » est l’un des derniers films de la veine surréaliste de Philippe Clair, qui devait dans les années 1980 s’illustrer dans des films à plus gros budget et moins potaches. Ce fut en tout cas un superbe bouquet final pour la première veine du cinéaste, qui nous offrait là ce qui est sans doute l’un de ses films les plus magnifiquement débiles, avec la délirante contribution des 13 cloches, qui réussissaient là à rivaliser avec Les Charlots, avec l’avantage du nombre pour apparaître encore plus débiles. Leur présence, et celle du cinéaste en totale roue libre dans sa propre prestation d’acteur, fait de ce film un plat particulièrement robuste, réservé aux nanardeurs très résistants. Ceux qui survivront nerveusement au voyage devraient trouver leur bonheur, car c’est vraiment de la drogue dure !


Addendum de MrKlaus :



Il faut souligner que la trilogie des 13 cloches a une vraie unité, certains gags n'étant compréhensibles (dans le meilleur des cas) que si l'on a vu les deux films précédents. Le groupe a souvent changé au cours de ces trois chefs-d'oeuvre. Seuls sont restés dans tous les films : Daniel Derval, Triboulet, Hervé Palud, Bernard Pinet, Philippe Sochon et Eddy Jabes (qui joue le Belge de service; à noter que ce comédien a été assistant-réalisateur sur « Mon Curé Chez les Nudistes » et « Mon Curé Chez les Thaïlandaises » !). Le personnage du yogi est récurrent dans la trilogie, mais chaque fois joué par un acteur différent.
- Nikita -
Moyenne : 2.40 / 5
Nikita
NOTE
3.5/ 5
Kobal
NOTE
1/ 5
MrKlaus
NOTE
3.5/ 5
Wallflowers
NOTE
1/ 5
Zord
NOTE
3/ 5

Cote de rareté - 5/ Pièce de Collection

Barème de notation
En attendant la ressortie des œuvres complètes de Philippe Clair en DVD, il faut pour l’instant se contenter des vieilles VHS de chez Mélisa ou VIP. Pas gagné pour les trouver.