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Les Conquérants du Cosmos

(1ère publication de cette chronique : 2009)
Les Conquérants du Cosmos

Titre original :The Cosmos Conqueror

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Johnny T. Howard (mouhahaha !)

Année : 1981

Nationalité : Hong Kong / Corée du Sud

Durée : 1H04

Genre : L'attaque des clones

Acteurs principaux :Notre dream team de doubleurs

Kobal
NOTE
3/ 5


C'est avec une certaine émotion que j'aborde la chronique de ce qui semble être le dernier dessin animé distribué par IFD recensé en France. Oh, bien sûr, la consultation du site de cette boîte d'ardents défenseurs de leur propriété intellectuelle (si, si, c'est écrit dessus) laisse entendre que le rêve est encore de mise, avec des titres aussi envoûtant que "Princess Lolo", "The Magic Pouch" ou "Marco et Miky". Mais il faudra quoi qu'il en soit faire son deuil de nos doubleurs chéris dont on savoure depuis des années et à longueur de métrages crapoteux le travail désabusé, mais légendaire.


C'est donc avec un plaisir empreint d'une douce tristesse que j'ai visionné ces "Conquérants du Cosmos", car je savais qu'après cela, rien ne serait plus jamais vraiment pareil. Une sorte de dernier feu de camp en colonie de vacances, ultime communion des liens de camaraderie avant la rupture et le retour au quotidien grisâtre. Mais ne nous laissons pas envahir par la nostalgie avant même que le film n'ait commencé ; au contraire, que cette grande aventure se termine dans un barouf digne des nombreuses heures passées à rire ensemble.



Bonjour, nous sommes des méchants intersidéraux. Vous nous avez sûrement déjà vu dans des œuvres comme "Le Crépuscule de la Liberté" ou "Space Thunder Kids"...


Quoi donc de nouveau au scénario ? Je vous rassure : rien du tout ! Oska, une jeune femme originaire de la planète Orion, envoie un message télépathique à trois jeunes héros endormis. Son monde vient d'être détruit par le misérablissime Kaneba, et la Terre est la prochaine sur la liste de cette entreprise de démolition intergalactique. Pour éviter cette infamie, Oska décide d'envoyer Robot King défendre la planète bleue.


Un trio de héros composé d'un jeune homme, d'une jeune femme, et d'un gamin. Le cahier des charges est rempli.


En tout cas, au réveil de Kenny, Jane et Ben, tout est déjà prêt : Robot King vient d'atterrir dans le jardin... ou dans une base souterraine hypertechnologique, ce n'est pas clair (faut dire aussi, qu'est-ce qui ressemble le plus à l'un que l'autre ?), le trio gagnant peut désormais se transformer en justiciers costumés, et y'a même un docteur Hui livré en prime pour coordonner tout ça. Kaneba n'a plus qu'à bien se tenir s'il ne veut pas qu'on lui tatoue "Don't mess with Earth" sur son gros cul rouge clignotant !
Mais drame ! Le vil gluant bénéficie d'un bras droit traître à l'humanité nommé Dorado, une fourbasse collabo qui fait du chantage au conseil scientifique international. Si Robot King ne lui est pas livré sous peu, ce grand barbu métis Schtroumpf-Irlandais se verra dans l'obligation d'utiliser ses inventions destructrices pour anéantir sa planète d'origine. Hélas, faute d'un Khrouchtchev et de sa godasse coordinatrice, le conseil stagne dans le marasme de l'inaction et préfère se reposer entièrement sur l'équipe du Dr Hui.


El Dorado, aussi humain que je suis Vénusien.

Kaneba, caché derrière une vitre de son vaisseau psychédélico-galactique.


Heureusement, Robot King est loin d'être le dernier des caves, et il n'a pas oublié de touiller à l'examen écrit du meilleur ersatz de Goldorak. De plus, il est aidé par ses adversaires qui ont eux aussi triché à l'examen équivalent chez les méchants, et qui donc envoient leurs Golgoths par grappe de un à la fois. Et histoire de vous rassurer encore un peu plus, la Terre pourra également compter sur les différends internes à l'équipe Kaneba.
Que de suspens, mes aïeux. Et quelle mise en scène. Dès les premiers instants de cet animé, les raccords foireux bouchonnent pour apparaitre à l'écran, les perspectives défient toute concurrence, le recyclage tourne à plein régime. Bref, chez les producteurs Joseph Lai & Betty Chan, on ne connait pas la crise.D'un autre côté, on est tellement habitué à y bosser avec des bouts de celluloïds et un animateur homme-tronc qu'on peut faire face à n'importe quoi, il sera toujours difficile de tomber plus bas. Je ne sais pas si c'est le fait d'avoir terminé le cycle des DA IFD par ce film, mais j'y ai particulièrement ressenti une intense impression de fin de course. La corde du genre semble avoir été tellement tirée qu'il n'en reste quasiment plus rien, effilochée jusqu'à pouvoir passer dans le chas d'une aiguille. "Les Conquérants du Cosmos" est un canevas rapiécé, avec une telle réutilisation en boucle du même matériel que le métrage semble effondrer sur lui-même dans une sorte d'auto-cannibalisme. Rien ne se perd, tout se transforme... en la même chose !


Ce monstre est tout autant capable de marcher dans un couloir que de se promener entre des gratte-ciels.

Autre capacité spéciale : il possède des dents du bonheur d'ajustement variable.


"Les Conquérants du Cosmos" repousse ainsi les limites du clonage à des fins d'auto-greffe : clonage de plans, voire de séquences entières, qui ressurgissent en tout point du dessin animé, clonage de personnages sur un même plan (en fait, la décomposition du mouvement d'un seul personnage est censé en représenter plusieurs, un concept dont beaucoup ne se sont toujours pas remis), clonage d'un même bruitage de missile omni-utilisé, clonage des arrières-plans lors des traveling avec des pointes de faux-raccords à raison de 1.5 par seconde... On peut palper là une misère vidéo comme rarement, même parmi les productions habituelles de Joseph Lai, qui plus que jamais apparaissent comme un incroyable aboutissement de la logique de la rentabilité commerciale dans le domaine artistique.


Pour financer la recherche sur les cellules souches, envoyez vos dons à Joseph Lai, IFD, Hong-Kong.

Si vous vous concentrez suffisamment sur cette animation, vous pourrez la voir défiler à l'envers (conservation du capital neuronal non-garantie).


Et comme de bien entendu, les designs des divers protagonistes ne sont pas tombés du ciel. Si je n'ai toujours pas trouvé où a pu être piqué Robot King (concernant son "rétro-punch", par contre, pas besoin de chercher bien loin), Kaneba ressemble à s'y méprendre à un Lou BMX 11 baveux, tandis que Dorado gesticule dans son poste de pilotage comme un véritable Grand Strataguerre (on notera aussi des sbires masqués et chevelus vraisemblablement inspirés des Pirates de l'espace de Cobra). D'ailleurs, difficile de ne pas s'extasier lors des apparitions de Robot King. De couleur variable, passant du bleu au noir SM luisant (son soutien-gorge à pointes influence peut-être mon jugement), coiffé d'une banane-rasoir rotative (elle reste toujours de profil, quelque que soit l'angle du plan), il conserve en permanence un regard d'un vide intersidéral, l'air impavide de celui qui a bien compris dans quelle production bas de gamme il se trouvait. Son maquillage lui donne même parfois des allures de clown triste.


Robot King et sa banane rotative. Concernant ses origines, il a un petit côté Gigantor.

Enfin, vu comme ça, on dirait plutôt Robot Queen.


Mais la pauvreté de "Cosmos Conqueror" ne l'empêche pas de dispenser de grands moments de n'importe quoi proprement hilarants. Comment d'ailleurs pourrait-on réagir autrement que par le rire devant la stratégie défensive des Terriens surpris par une attaque de souris robots : il leur suffit en effet de produire des chats robots équipés d'un monocle et capables d'engloutir en masse ces rongeurs bioniques tout en en déféquant les restes simultanément ! On n'a jamais vraiment vécu tant qu'on n'a pas vu cela.



Mais qui a bien pu concevoir un tel truc ?

L'arme de dératisation massive en action. Ça peut même tailler les têtes d'ennemis en pointe.


Je passe sur les incohérences massives qu'on aurait pu penser impossibles à placer dans un scénario aussi simple (je ne veux pas spoiler, mais le personnage de Wella offre un twist juste hallucinant de débilité terminale) et sur les techniques martiales fondatrices (le dandinant nunchaku volant), pour enfin me jeter avec euphorie dans une humble tentative de description du doublage. Aaah, je l'ai souvent dit, mais c'est vraiment comme retrouver ses bonnes vieilles charentaises, usées et miteuses, mais tellement confortables. Et sans vouloir être méchants envers ces artisans du nanar, ces adjectifs pantouflards sont tout autant valables pour le résultat de leur travail. Déjà, je ne sais pas si cela peut-être attribué à la copie dont je dispose, mais le doublage est des plus caverneux, et je veux bien dire par là qu'il semble avoir été fait dans une cave (la musique et le bruitage ne sont pas affectés par ce phénomène) ; ce qui me conforte dans ma théorie de la traite des artistes-doubleurs, enchaînés et brutalisés dans des sous-sols humides par des éditeurs tyranniques. A l'image du métrage, on les sent vraiment en bout de course, achevés par des heures de dialogues non-sensiques, au mieux ayant probablement éprouvé l'illumination quant à la vacuité de ce monde. Dès lors, pourquoi se bercer d'illusions lorsqu'il s'agit de doubler un rire, autant répéter platement une série de "haha" vidée de tout affect.


Le Capitaine Ko en pleine démonstration de GRS.

Ce Robot King est plein de ressources !

Dorado, bourré (on peut apercevoir sa bouteille), se lamente piteusement sur ses échecs.


L'autre théorie quant au pourquoi de ce n'importe comment demeure toutefois celle du j'menfoutisme malicieux, ce qui expliquerait la présence de pêcheurs marseillais au sein du métrage, l'existence d'une ville nommée Scherzopolis (je vous laisse deviner l'éditeur vidéo du film), ou bien encore la grande variabilité du nom du robot Kalero, alternant au gré des moments entre Kadero, Kamaro, Kamero, Kadaro, Kadero ou Kalaro. Quant à la synchronisation, c'est une notion clairement dépassée pour notre équipe d'avant-garde, qui n'hésite pas à faire parler pendant plusieurs secondes des personnages mutiques, ou à mimer un crash du mixage audio/vidéo.
Quelque soit la vérité tapie derrière ces bas-fonds de l'animation, je voulais profiter de cette chronique pour affirmer une nouvelle fois mon soutien empathique à ces vétérans et à leurs traumatismes, qui, j'espère, ne les font plus souffrir actuellement. On vous aime les gars !


Non, ceci n'est pas un chanteur de rap.


Au final, si "Les Conquérants du Cosmos" n'est pas le plus pétaradant des dessins-animés ourdi par l'affreux Jojo Lai, il possède tout de même un style bien à lui de misère sublimée par une indécrottable volonté de faire comme si de rien n'était, qui fait aisément pardonner son caractère légèrement répétitif. Et comme tout le monde est au rendez-vous de la fabrique à nanar, il serait bien dommage de bouder notre plaisir devant ce dernier fleuron de la technologie IFD. Ce n'est qu'un au revoir, mes frères...


Allez, c'est fête, on a passé Robot King au polish...

...et on fait péter des bombes atomiques à la rose.


Merci à Gorgo.

- Kobal -
Moyenne : 3.33 / 5
Kobal
NOTE
3/ 5
John Nada
NOTE
3/ 5
Barracuda
NOTE
4/ 5

Cote de rareté - 6/ Introuvable

Barème de notation
"Les Conquérants du Cosmos" est sorti en France au format VHS chez l'éditeur Scherzo. Pour l'étranger, il y a eu un DVD aux USA chez Digiview (qui inondait les walmarts de galettes à 1$ et a dû mettre la clef sous la porte suite à un procès) et il existe peut-être un DVD russe, mais rien n'est moins sûr.


La VHS française.

L'affiche IFD.

L'affiche coréenne de ce qui semble être l'oeuvre originale, bien que certains personnages ici présentés n'apparaissent pas dans "Les Conquérants du Cosmos".

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