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Empire on Fire

(1ère publication de cette chronique : 2009)
Empire on Fire

Titre original :Permainan Dibalik Tirai

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Maman Firmansyah (alias Manman Firmansjah)

Année : 1988

Nationalité : Indonésie

Durée : 1H28

Genre : Mike Abbott is on fire !

Acteurs principaux :Mike Abbott, Baron Hermanto, Atut Agustinanto, Alba Fuad, Nina Anwar, W. D. Mochtar, Tatiek Wardiyono, Jurek Pheszynski alias Jureck Klyne, Lina Budiarti, Kiki Fatmala, Vera Magdalena, Intan Fully Chohan, Tisna S. Brata

John Nada
NOTE
1/ 5

Produit par Gope T. Samtani pour Rapi Films, "Empire on Fire" est un film indonésien de Maman Firmansyah, sorti en 1988, avec l'ultra-moustachu Mike Abbott. En ce qui me concerne, l'essentiel est dit. En tout cas, c'est sur la foi de ces seuls éléments (l'Indonésie des 80's, le réal' de "Violent Killer" et le gweilo le plus joufflu d'IFD !) que je me suis rué sur ce film comme une poufinette sur un rayon de fringues en solde.

Mais... attendez, j'en vois parmi vous qu'une telle entrée en matière semble laisser de marbre... Mike Abbott et l'Indonésie ça ne vous parle pas plus que ça ? Bon, très bien, laissez-moi vous justifier mon enthousiasme. C'est que, voyez-vous, je m'enorgueillis d'appartenir au rang le plus élevé de l'Ordre des Saints Chevaliers de la Cause Nanaresque, les vrais, les purs, les consanguins. La fine fleur de la cinéphagie déviante, bref : un bon gros geek en puissance. "Et alors ?" me demandez-vous en bâillant... Et bien voilà, c'est quand même moi le débile qui me suis levé au milieu de la nuit – décalage horaire oblige – pour appeler Mike Abbott à Hong Kong et l'interviewer par téléphone sur ses films de ninja tournés vingt ans plus tôt. Il faut imaginer le surréalisme de la scène : moi chuchotant mes questions pour ne pas réveiller la petite famille endormie, Mike me racontant en vrac, avec son fort accent British de Cornouailles, sa jeunesse comme mineur de fond, ses six mois de pêche en haute mer sur un chalutier en Alaska, ses souvenirs de Richard Harrison, Chris Mitchum, Jackie Chan et "John Woo qu'avait l'air d'un bon p'tit gars", et même sa pub tournée pour les bières Sapporo, le tout enregistré à l'époque avec le micro HF d'une caméra PD 150 empruntée à TéléGrenoble (vous voyez qu'on ne recule vraiment devant rien pour vous rapporter des scoops de première importance). C'est aussi moi le débile fétichiste qui commande sur des sites chinois des VCD mal encodés de films pas terribles, juste parce que Mike Abbott y fait une apparition de 2 minutes. Voilà, vous ayant confessé quelques-unes des tares qui entachent ma vie privée, peut-être comprendrez-vous maintenant un peu mieux la joie monomaniaque qui fut la mienne en tombant sur cet obscur "Empire on Fire", dans lequel Mike tient carrément le rôle du super bad guy de service.


Mike Abbott et son jeu tout en sobriété.

De façon schématique, "Empire on Fire" nous conte la renversante histoire d'un royaume de gens gentils envahi par des gens méchants, les méchancetés que les méchants font subir aux gentils, la ré-organisation des gentils dans une grotte, la résistance armée des gentils et finalement, après bien des sacrifices, leur victoire décisive contre les méchants. Dit comme ça, "Empire on Fire" ressemble de façon troublante aux innombrables productions 80's de l'archipel exaltant la bravoure du peuple indonésien contre l'occupant japonais ou les colons hollandais ("La Bataille de l'enfer", "Vaincre ou mourir", "Tiger Commandos", "Freedom Force", "Commando du diable" etc.). A mon humble avis, les frangins Samtani, patrons de Rapi Films et précurseurs du recyclage de déchets, ont dû se faire un brainstorming de fous furieux sur le thème du "comment faire du neuf avec du vieux".

- "Dis donc frangin, ça fait déjà le quinzième film de guerre qu'on produit à partir du même scénario, il serait peut-être temps de passer à autre chose, tu crois pas ?
- Tu plaisantes ?! Ce scénario de gentils envahis par des méchants est excellent, il peut encore servir. Suffit de faire comme d'habitude, on change les noms des personnages et...
- Arrête, j'ai peur que le public se doute de quelque chose, ça va finir par se voir à force. En plus l'accessoiriste nous signale que le prix des mitraillettes en plastoc a encore augmenté...
- ENCORE ?!?! Non mais si c'est la mort du 7ème Art qu'ils veulent, ils n'ont qu'à nous le dire franchement !
- ...et puis le costumier arrête pas de râler, il dit qu'il en a marre de rapiécer les uniformes de soldats d'un film à l'autre.
- Ah misère ! Bon, ne paniquons pas, voilà ce qu'on va faire : comme on n'a pas de sous pour en racheter des neufs, à la place des envahisseurs japs ou hollandais on va mettre des envahisseurs... des envahisseurs...
(il ferme les yeux, réfléchit intensément, son front se plisse sous l'effort)
- Des envahisseurs quoi ?
- Des envahisseurs...
(il rouvre soudain les yeux) des envahisseurs PIRATES !
- Oh putain, bien vu frérot ! Comme les pirates n'ont pas d'uniformes, on pourra les habiller n'importe comment, avec des serpillières même si on veut !
- Bonne idée ça les serpillières, je le note.
- Pas de Hollandais, ça veut aussi dire pas de figurants à moumoute blonde, on va pouvoir faire des économies avec le perruquier !
- Oui, et puis comme ça, ça changera vraiment parce que l'histoire se passera à l'époque des pirates, c'est-à-dire, euh... ben euh...
- Dans le passé ?
- Voui, c'est ça ! Mais un passé qui coûte pas cher, c'est-à-dire dans de la jungle et sur du sable pour les extérieurs, et dans une grotte et quelques pièces sommairement meublées pour les intérieurs.
"

Ainsi donc, "Empire on Fire" nous conte, à une époque indéterminée, l'histoire d'un royaume de gens gentils envahis par de méchants pirates. Le titre évoque "un empire à feu et à sang". A l'image, on découvre un village de huttes assailli par une foule désordonnée de figurants, armés de sabres en carton et de gourdins en mousse.




L'Empire des paillotes on fire.

Cette bande de pillards, dont le look tient autant des corsaires que des pieds nickelés, est emmenée par l'impitoyable Bogart, ruffian sanguinaire auquel Mike Abbott prête sa solide charpente et sa moustache épaisse. Au cours d'un combat épique de 10 secondes, le souverain des gentils est décapité par le général Tengga, homme de main de Bogart. L'INVASION est terminée, c'est maintenant le début de L'OCCUPATION.


"Empire on Fire" : un film avec des figurants patauds armés de sabres en carton et de gourdins en mousse...



…qui se bousculent devant la caméra sans grand souci de cohésion.





Gundala, le gentil roi des gentils (Tisna S. Brata).



Le méchant Général Tengga, sous-chef des méchants (Atut Agustinanto).

L'OCCUPATION, c'est Mike Abbott qui se fait proclamer roi (King Bogart !), se constitue un harem avec les prisonnières et boit du vin en riant très fort assis sur son trône. Affreux ! Outré par tant de débauche et de décadence, le petit peuple courbe l'échine mais ne plie pas, il prépare en secret... LA RESISTANCE.





LA RESISTANCE, ce sont quelques villageois piteux, la veuve du roi, le vieux serviteur fidèle Nadewa... Le défunt roi avait aussi un fils, Panji, godelureau falot qui pratique un kung-fu de cour de récré. Ce sera LE HEROS. Lors d'un marché aux esclaves organisé par l'occupant, la veuve du roi achète Mira, une jeune fille moche comme un pou, aux paupières flasques, boudinée dans ses vêtements comme un saucisson de Savoie dans son filet. Ce sera L'HEROINE.


Panji (Baron Hermanto), LE HEROS.



Mira (Alba Fuad), L'HEROINE.



Nyi Tanta, veuve du roi et mère de Panji (Tatiek Wardiyono), qui a choisi Mira pour sa BEAUTE, afin de l'envoyer séduire le vil Bogart (la pauvre doit avoir la vue qui baisse).



Le serviteur Nadewa, interprété par le vétéran W. D. Mochtar, qui a promené sa moustache impassible dans un nombre extravagant de productions Rapi Films ("La Reine de la magie noire", "Mystics in Bali", la trilogie "Jaka Sembung / Le Guerrier", le sous-Exorciste "Satan's Slave", "Vaincre ou mourir", "Les Trois furies du ninja" etc.).

LA RESISTANCE, c'est aussi un camp d'entraînement sis dans une grotte, où les hommes apprennent les arts martiaux sous la tutelle de Panji et où les femmes sont soumises... à la torture ! Rassurez-vous, c'est paraît-il pour leur bien, afin d'endurcir un peu ces honnêtes ménagères. Bogart ayant un sérieux faible pour la gent féminine, il est en effet décidé que Mira et ses congénères iront séduire le tyran pour l'éliminer au moment le plus opportun : en pleine étreinte. Mais comme Mike "sex machine" Abbott est réputé pour la rudesse de ses coups de reins, les résistantes s'entraînent à insensibiliser leurs parties intimes pour mieux encaisser le choc (!!!). Un acte de bravoure noble et valeureux dont nos lectrices feraient bien de s'inspirer en cas d'invasion pirate (Non ? Bon...).



Des mauvaises langues me soufflent que ces scènes dégradantes pour le sexe faible ne seraient qu'un prétexte à caser un peu d'érotisme frelaté de la part de Maman Firmansyah, tâcheron ayant déjà versé dans le film de Women in Prison poisseux (l'indigent "Escape from Hellhole" alias "Les Révoltées de l'enfer" en 1983). Ce sont des mauvaises langues qui ont vraiment mauvais esprit. En parallèle à la torture pure et dure, les résistantes se plient également à un entraînement intensif à base de mouvements pelviens hautement suggestifs et de ciseaux filmés en plongée qui témoignent que Maman Firmansyah, loin d'être misogyne, était un admirable poète sachant exalter avec lyrisme la beauté évanescente des femmes. Seule faute de goût : avoir accompagné ces séquences d'une musique atroce qui ressemble, objectivement, à de la valse d'ascenseur jouée au pipeau et au synthétiseur.


Le fitness, c'est la base de LA RESISTANCE.



Sus à l'envahisseur ! Travaille tes adducteurs !
Et tes fessiers pour battre, le méchant roi Bogart !
Toutes ensemble, haut les coeurs, les abdos, la sueur,
Gym-tonic c'est l'éclate, pour rosser les pirates !

Et puis comme Rapi Films avait un autre Occidental sous la main, on trouve également le personnage de James et de son amante Isabella, duo comploteur qui semble mener un double jeu.


James (Jurek Pheszynski alias Jureck Klyne, également vu dans "Angel of Fury", une production Rapi Films avec Cynthia Rothrock et Peter O'Brian).


Isabella (Nina Anwar).

Les tenants et les aboutissants de l'intrigue étant exposés, j'anticipe à présent vos brûlantes interrogations : l'entraînement kung-fu-torture-fitness de LA RESISTANCE va t-il porter ses fruits ? LE HEROS va t-il accepter d'embrasser une héroïne aussi moche ? Combien de litres de vin Mike Abbott aura t-il englouti à la fin du film ? La réponse est dans le tétanisant suspense des rebondissements, le doute métaphysique qui sous-tend les dialogues, la quête radieuse des personnages qui respirent l'intelligence. L'insoutenable légèreté du nanar indonésien...

Première grosse déception : "Empire on Fire" ne recèle aucune magie, aucune sorcière, homme crocodile, femme serpent ni effet spécial coloré, bref rien de ce qui faisait le sel et la spécificité du cinéma de genre indonésien de la première moitié des années 80. A la place, on se retrouve devant d'effarantes histoires de coucheries et de duplicité dignes du plus tordu des soap operas, le script de "Empire on Fire" s'apparentant moins à une fresque épique et guerrière qu'à un inextricable marivaudage nanar. L'occasion de caser d'innombrables scénettes d'amour, plates et convenues, qui correspondaient peut-être à ce que les frères Samtani pensaient être "les attentes du public occidental" (du cul !) mais s'avèrent à l'écran aussi torrides qu'une partie de strip-poker dans une maison de retraite mal chauffée. La crainte de la censure, dans ce qui demeure le premier pays musulman au monde par sa population, y est sans doute pour quelque chose.






Des scènes d'un érotisme moite et boudiné.





Maman Firmansyah, ou l'art délicat de la suggestion.

Statique et empesée, la mise en scène de Maman Firmansyah ne brille pas du feu de l'inspiration, se bornant à explorer toutes les ressources du champ / contrechamp. En fait, à l'instar des ultimes productions de la Shaw Brothers ou de la Cannon, on retrouve ici cette déliquescence artistique propre aux studios aux abois, avec en outre un budget qu'on devine proche du néant. La fin des années 80 marque en effet, en Indonésie comme ailleurs, le déclin de l'industrie du cinéma de genre bis et populaire, qui allait conduire Rapi Films et ses concurrents à recentrer leurs activités sur la distribution de films étrangers et la télévision.


What do you prefer: red wine or white ?



Red will be fine!



Euh... no, maybe white !

Avec son esthétique de téléfilm est-allemand sans ressort ni profondeur, "Empire on Fire" se révèle emblématique d'une époque où, comme en Italie ou aux Philippines, l'Indonésie commençait à ne plus produire que des pelloches sans âme tournées à la va-vite pour l'export, dont les débouchés se réduisaient inexorablement (les seules éditions connues de "Empire on Fire" à ce jour sont d'ailleurs une VHS russe et une VHS grecque en anglais sous-titré, preuve que le film ne s'est quasiment pas exporté sur le juteux marché occidental).

Seule vraie consolation : la présence attendue et roborative de Mike Abbott, ex-manard anonyme noyé dans la masse du prolétariat anglais qui, à la faveur d'un destin peu commun, se retrouve promu roitelet du nanar indonésien. En méchant hystérique digne de Tex Avery, Mike cabotine avec délectation : il brame, couine, barrit, hulule. Et nous console par la grâce de son interprétation fantasque et décomplexée.


Tu sors !





Les yeux exorbités façon regard qui tue : un concentré du potentiel shakespearien de Mike.

Le plus beau, c'est encore lorsque Mike, en dépit d'efforts louables pour honorer son rôle de méchant abject, laisse transparaître malgré lui sa nature de colosse placide et bonne pâte. Ainsi, les scènes où Bogart est censé abuser des prisonnières se traduisent à l'écran part de timides bisous, évoquant plus l'amoureux transi que le tyran lubrique. Une autre scène emblématique de cette bonhomie à fleur de peau vous est proposée en extrait vidéo. On y voit Bogart sur sa couche royale, appliqué à prodiguer à Mira quelques tendres bisous (là encore, c'est censé être un viol). Une servante (Lina Budiarti) vient soudain frapper à la porte, elle doit prévenir son maître d'un danger. Bogart beugle, furieux d'être dérangé en pleine besogne. Il se redresse, attrape un vase, le fracasse contre la porte. Petite sotte, tu oses troubler la quiétude de Bogart le sanguinaire ? Le despote sort de ses gonds, il voit rouge, il va gifler cette servante importune, lui tordre le cou, la mettre en morceaux. Il lui fait face, roule des yeux comme un fou, on imagine la vapeur lui sortir par les oreilles. Il tremble de rage, lève une main en forme de battoir... pousse maladroitement la servante et s'en va en grognant. Encore une horrible exaction commise par Bogart le boucher ! Au-delà de son côté complètement anecdotique, cette scène s'avère aussi drôle que touchante, en ce qu'elle laisse deviner le dilemme qui a dû perturber l'esprit du géant l'espace d'un instant : comment diable vais-je pouvoir jouer mon rôle sans faire de mal à cette petite bonne femme ?



Outre la présence salvatrice de Mike, et celle de son alter-ego occidental cabotin Jurek Pheszynski dans le rôle de James, les autres protagonistes sont réduits à des archétypes sans âme à la psychologie sommaire (amour contre haine, droiture contre trahison), interprétés par un casting d'acteurs locaux au charisme de ruminants. Parmi eux, on essaiera d'oublier le fadasse Baron Hermanto (le héros Panji) et la peu gracieuse Alba Fuad (l'héroïne Mira), improbables vedettes de ce film non moins improbable, qui atteignent de véritables prodiges d'inexpressivité.


Jurek Pheszynski mimant la douleur (son personnage vient de recevoir un jet d'acide au visage).



Baron Hermanto qui, à défaut de maîtriser les arts martiaux, nous montre qu'il sait au moins faire du trampoline.



Alba Fuad, plus moche que jamais.

Trop proche du navet pour être recommandé à l'usage courant, "Empire on Fire" devrait malgré tout ravir les légions de fans de Mike Abbott (si si, j'en connais). Appliqué comme un cataplasme sur le cerveau du spectateur, ce semi-nanar émollient constitue également un remède efficace pour vous soulager des excès de la veille. Maintenant, si vous n'êtes ni fan du grand Mike (honte à vous !), ni un noceur invétéré, mais souhaitez néanmoins vous initier aux joies du cinéma de genre indonésien, on ne saurait trop vous recommander l'insurpassable "Justicier contre la reine des crocodiles", dont la découverte fut pour l'auteur de ces lignes un moment de bonheur autrement plus intense.



Un glorieux épisode de plus dans la série "How to kill Mike Abbott".

Une chronique de "Empire on Fire", c'était l'occasion idéale de recontacter Mike Abbott. Nous avons ainsi le plaisir de vous offrir – moins pour faire un étalage complaisant des spectaculaires connections show biz de Nanarland que pour démontrer une fois de plus l'infinie gentillesse de Big Mike – les souvenirs que l'acteur conserve de ce tournage. Merci beaucoup Mr. Abbott !
"Avec tous ses décors et ses costumes, "Empire on Fire" reste de loin le film le plus intéressant et le plus agréable sur lequel j'ai travaillé. Le tournage a eu lieu aux mois de mars et avril 1988. La plupart des décors ont été construits dans un studio à la périphérie de Jakarta, c'est là que furent tournées les scènes dans des chambres et mon combat final contre Atut Agustinanto. Les scènes où on me voit assis sur un trône, où je verse notamment du vin sur Atut et où je poignarde une fille, furent elles tournées à Jogjakarta, sur le site du palais de l'eau Taman Sari. Si vous jetez un oeil à "l'intérieur" de mon château, vous verrez que le mur derrière mon trône est en fait le mur extérieur d'un temple qui jouxte le palais de l'eau. L'équipe en charge du décor a juste construit des murs sur les côtés et placé de grandes urnes pour meubler, le résultat est très crédible, alors qu'en fait il n'y avait ni plafond, ni façade. Les scènes que j'ai tournées dans ce décor restent parmi les meilleurs souvenirs que je garde de ma carrière dans le cinéma."


Le palais d'eau Tamansari, qui fut construit par Sri Sultan Hamengkubuwono 1er en 1758 comme lieu de villégiature pour la famille royale.

"Le réalisateur était un gentleman merveilleux, qui parlait de façon douce et affable, un vrai saint ! L'autre acteur occidental du film, que je reçois à un moment dans mon palais, s'appelait Jureck Klyne. Il était d'origine hollandaise, de nationalité indonésienne et parlait couramment l'anglais et l'indonésien. Le travail avec lui se passait plutôt bien, mais il avait une façon de vous fixer droit dans les eux quand il s'adressait à vous qui était assez flippante !"

"Si je me souviens bien, j'ai touché un cachet de 3000 dollars pour ce film, en plus d'avoir mon hôtel payé ainsi qu'une petite somme pour mes frais quotidiens."


Version originale anglaise : "With all the sets and interesting wardrobe, "Empire on Fire" was by far the most interesting and enjoyable movie I ever worked on. We shot during March and April 1988. Most of the sets were built at a studio outside of Jakarta, this where some of the bed room scenes and my final fight scene with Atud Augustinanto were shot. The scene where I am sat on the throne and I pour wine over Atud and later stab a girl was shot in Jogjakarta. The Taman Sari water palace was the location. If you look at the inside of my palace, the wall where my throne is, is actually the outside wall of a temple ajoining the water palace. The art department simply built walls at the sides and made those huge urns for decoration, it all looked very effective, there was no ceiling or front on the set. The scenes that I shot there were among the most happy memories I have of my movie making career."


Tamansari, or Water Palace, was built by Sri Sultan Hamengkubuwono I in 1758 as a rest house and pleasure park for the Royal family.

"The director was a wonderful gentleman, he was quiet spoken and the feel about him as though he were a holyman! Jureck Klyne is the white actor whom I greet in my palace, he was an Indonesian national of Dutch decent, and spoke English and Indonesian fluently. Jureck was O.K. to work with, but he had a way of staring directly into your eyes when he was talking to you which was kinda creepy!"

"If I remember rightly, I earned about US$3000 on the movie and I had my hotel paid for and I was also given a per diem."

Addendum :

Une critique en anglais de "Empire on Fire" trouvée sur le site www.critcononline.com prétend que le personnage de Bogart campé par Mike Abbott serait un Hollandais à la tête d'une armée de mercenaires indonésiens, que James (Jurek Pheszynski alias Jureck Klyne) serait lui Capitaine de l'armée coloniale hollandaise, et que les acheteurs présents lors de la vente aux enchères des prisonnières comme esclaves seraient également de riches impérialistes des Pays-Bas. Bien qu'à notre connaissance aucun dialogue de la version anglaise ne vienne clairement étayer cette interprétation, elle nous semble a posteriori tout à fait pertinente. Un film made in Jakarta basé sur cet increvable scénario de "gentils envahis par des méchants", sans Japs ni Hollandais ? C'était sans doute prêter au cinéma d'exploitation indonésien une imagination déraisonnable.

Le forumer skunkhead attire notre attention sur le fait que cette trame évoque aussi une variation sur l'histoire de James Brooke (1803-1868) et des Rajahs blancs d'Indonésie. En 1838, cet aventurier décide de quitter l'Angleterre pour conquérir les terres éloignées de l'Asie du Sud-Est. Il achète, avec son modeste héritage, un yacht qu'il arme et avec lequel il part pour Singapour. De là, il se rend à Bornéo, puis devient mercenaire en se mettant au service d'un prince du sultanat de Brunei, en proie à une guerre civile. Il pourchasse les pirates, combat les rebelles et se voit offrir en récompense le Sarawak (actuel territoire malais de l'île de Bornéo, peuplé de tribus diverses, notamment celle des terribles Dayaks, coupeurs de têtes) dont il est nommé Râja (gouverneur). C'est le point de départ d'un extraordinaire empire privé que James Brooke et ses deux successeurs, les Raja Putih (rois blancs), vont étendre. Née en 1841, cette dynastie des Rajahs blancs s'achèvera au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en 1946, date de l'entrée du Sarawak dans l'Empire colonial britannique (la colonie obtiendra l'indépendance en 1963 et rejoindra la Fédération de Malaisie). Cette histoire insolite et méconnue a été fort bien racontée par l'écrivaine Gabrielle Wittkop dans son roman "Les Rajahs blancs" (Presses de la Renaissance, 1986, réédition en 2009 aux éditions Verticales). Ce thème des Rajahs blancs, empire de mercenaires et de pirates mêlés aux jeux impérialistes entre Anglais et Hollandais, a aussi inspiré des personnages populaires comme "Sandokan, le Tigre de Bornéo", adapté au cinéma par Umberto Lenzi en 1963.

- John Nada -
Moyenne : 1.13 / 5
John Nada
NOTE
1/ 5
Jack Tillman
NOTE
1.25/ 5

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation

Un film rare (il n'était même pas référencé sur l'IMDB, mais c'est chose faite depuis l'intervention des Tintin reporters de Nanarland) mais malgré tout trouvable sur le web. La VHS grecque originale (en anglais sous-titré hellène) se monnaye ainsi aux alentours de 11$ ou 7€ sur différents sites, tandis que www.trash-online.com en propose une copie sur DVD-R semi-artisanal moyennant 8€ (la VHS grecque leur ayant servi de master). Je dis ça à l'attention de celles et ceux qui auraient à compléter une improbable collection "Films de Maman Firmansjah" ou "Films avec W.D. Mochtar"...


Une édition VHS grecque.



Une édition VHS russe.



Le DVD-R édité par www.trash-online.com à partir de l'édition VHS grecque.