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Fateful Findings

(1ère publication de cette chronique : 2014)
Fateful Findings

Titre original : Fateful Findings

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Neil Breen

Producteur(s) :Neil Breen

Année : 2012

Nationalité : Etats-Unis

Durée : 1h40

Genre : Messie pieds sous terre

Acteurs principaux :Danielle Andrade, Jennifer Autry, Victoria Cameron, Brianna Borden, Klara Landrat, Neil Breen

Drexl
NOTE
3/ 5


Deux ans. Deux ans que Neil Breen est entré avec fracas dans nos vies de cinéphiles déviants, par la fenêtre, défonçant au passage plantes vertes, rideaux et moquette. Deux ans que Double Down et I am here.... now nous laissent hagards, pantelants de ces questions restées sans réponse, dans l'attente d'un signe, d'un geste, d'un tutoriel vidéo sur le world wide web qui nous aiderait enfin à saisir à pleines mains l'énigme Neil Breen. Le vice fut poussé jusqu'à la prise de contact, par mail, avec l'objet même de cette obsession. Pas maintenant, répondit-il, pas avant d'avoir vu la conclusion de la trilogie. Deux ans plus tard, la boucle est enfin bouclée. Fateful Findings nous tend les bras, mais son étreinte glacée peut avoir raison des cœurs les plus purs – Rico, pour ne pas le nommer, a succombé au sommeil au bout de 40 minutes, non sans avoir lâché « voilà pourquoi je n'aime pas Neil Breen » après un lent, très lent travelling sur une Ferrari rouge.


Neil Breen est amour... mais sommes nous dignes de le recevoir ?


Car oui, et peut-être ici plus que jamais, la vision de Neil Breen se mérite. Sa dilatation extrême du temps, ses incessantes répétitions de montage, ses incompréhensibles sautes d'humeur rythmiques sont autant d'obstacles périlleux à la bonne réception de ses brûlots révolutionnaires à deux de tension. Fateful Findings constitue ni plus ni moins que l'apogée par l'absurde du cinéma d'auteur nombriliste, l'ultime rêverie sous morphine d'un illuminé drapé dans ses lumières révélatrices.



Comme dans ses deux films précédents, Neil Breen interprète un sauveur de l'humanité messianique - un temps laissé pour mort puis ressuscité pour révéler la vérité, TOUTE la vérité. Hanté par l'amour de vacances de ses huit ans, il vivote entre son home a priori sweet home et son job de romancier à succès. Et puis, sans crier gare, l'accident. Une voiture de luxe sans plaque d'immatriculation le renverse. Dylan sombre dans le coma, et ne se rend même pas compte que son infirmière n'est autre que son grand amour de jeunesse (mais ils se retrouveront plus tard, le destin, tout ça). Visité par une présence spectrale, il se remet sur pied illico et décide de hacker les sites gouvernementaux à travers le monde pour exposer toute la vérité. « No more books ! » sera désormais son mantra, qu'il aime à répéter en maltraitant ses laptops éteints. Sa femme sombre dans l'addiction aux pilules, son espèce de meilleur pote alcoolique se donne en spectacle, Dylan se fait même draguer par une amorphe ado topless. Replié sur la sphère intime, le cinéma de Neil Breen reste ce chaos ambiant dont seul l'auteur, interprète, scénariste, réalisateur, monteur and so on peut nous sortir.


No more books !


Au sortir d'une heure et demi de tergiversations sans réel but, si ce n'est peut-être de nous signifier à quel point notre homme est beau mec, droit dans ses bottes et ivre de sa soif d'idéal, le mémorable climax de Fateful Findings voit Dylan balancer tous les secrets qu'il a réunis (« plus qu'aucun hacker n'a jamais révélé » - prenez ça, Snowden et Assange) lors d'une conférence de presse surréaliste, où se mélangent des incrustations odieuses, des stock-shots de caméra, des bruitages d'applaudissements intervenant aux moments les plus incongrus, et des suicides de col-blancs (dont un superbe « directeur de la banque ») venus confesser leur manquement à la population suite aux révélations du héros.


J'ai des choses à dire moi !!!!


Mais pour ces cinq glorieuses minutes d'épiphanie finale qui condensent en un geste cinématographique insolent toute la quintessence de la quête Breenienne, il va falloir patienter, et dompter la neurasthénie des digressions. Tout entier dévolu à l'universalité sentencieuse de ses messages, le réalisateur pèse chaque moment, chaque réplique – quitte à répéter plusieurs fois la même phrase, juste au cas où. Neil Breen filme beaucoup les pieds de ses personnages, Neil Breen se force à sourire (et c'est assez terrifiant), Neil Breen paie son boule tel Tommy Wiseau dans The Room, Neil Breen n'explique jamais vraiment certains choix narratifs abscons (pourquoi, au juste, Dylan peut-il traverser les murs ?), et pourtant, sa conception si particulière du temps manque de tout détruire. Fateful Findings, comme ses deux prédécesseurs, ronge sournoisement le cerveau du nanardeur aguerri, souille le Labroche virginal que nous avons tous appris à aimer, lasse le John Nada pourtant dans sa meilleure disposition, désintéresse le Wallflowers de la tolérance, assomme le Rico des origines. Faut-il pour autant tirer un trait sur le cinéma de Neil Breen, sur la foi de cet abattement global du canal historique de Nanarland ? Bien sûr que non.



Même sans visage, Neil Breen reste Neil Breen


Fateful Findings est la languide conclusion d'une trilogie hors de ce monde que l'auteur souhaiterait tant guérir. L'ultime et indispensable ajout à l'une des plus ahurissantes retranscriptions cinématographiques de la mégalomanie. Rien que pour cette image de Neil Breen souriant à pleines dents au suicide par balle d'un politicien sous un tonnerre d'applaudissements brutalement coupés, le film mérite sa place au panthéon des œuvres autres, et son démiurge omniscient de trôner parmi les siens. À la Cène des réalisateurs invraisemblables, Neil Breen occupe la place centrale.



- Drexl -
Moyenne : 2.67 / 5
Drexl
NOTE
3/ 5
Rico
NOTE
2.5/ 5
John Nada
NOTE
1.5/ 5
Barracuda
NOTE
2.5/ 5
Kobal
NOTE
2.5/ 5
Labroche
NOTE
4/ 5

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation

Neil Breen vend son film en auto-production sur son site dédié pour la bagatelle de 29 $ sans frais de port. Un DVD tout ce qu'il y a de basique mais l'oeuvre de Neil se suffit à elle même c'est bien connu.  Le trailer, très complet, fait néanmoins office d'excellent condensé de la folie du film.