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Slash le Découpeur


Slash le Découpeur

Titre original :Slash

Titre(s) alternatif(s) :Ranger

Réalisateur(s) :John Gale (Jun Gallardo)

Année : 1987

Nationalité : Philippines

Durée : 1h25

Genre : Rambo sous tranxène

Acteurs principaux :Romano Kristoff, Mike Monty, Nick Nicholson, Ronnie Patterson, Gwendolyn Hung

Rico
NOTE
2.5/ 5

 



Ce qu’il y a de bien avec les nanars, c’est que même s’il y a des constantes dans la médiocrité ou dans la débilité des films qu’avec une patience de bénédictins nous exhumons de Cash Converters poussiéreux, on continue à avoir des surprises. A chaque fois, l’oeuvre possède son grain de nanardise propre qui la rend unique à nos yeux de cinéphiles déviants. Des trucages ratés, des stock-shots mal intégrés, des costumes ringards, des acteurs navrants, chaque vrai nanar a sa petite étincelle qui le fait sortir du lot.



« Slash », à première vue, ne présente rien de bien palpitant : retour aux Philippines pour un de ces petits sous-Rambo qui pullulèrent à partir du succès de Sylvester Stallone comme champignons après la rosée. Bien sûr, le casting recèle quelques fripouilles sympathiques comme Romano Kristoff (alias Ron Kristoff, ou Rom Kristoff), Mike Monty ou Nick Nicholson (dans un petit rôle, où il est crédité sous le nom de Nick Nichols). Mais des comme cela, il y en a des dizaines et pas toujours particulièrement folichons.



Alors qu’est-ce qui fait le sel de ce film, me demanderez-vous, les yeux remplis d’espoir… Et bien son rythme. Ou plutôt, son absence de rythme.

Comprenons nous bien, il n’y a rien de plus ennuyeux qu’un film d’action mou façon téléfilm à la « Hollywood Night ». Dans « Slash », c’est différent, les personnages ne se donnent même pas la peine d’aller vite dans les scènes de castagne. C’est carrément hypnotique de lenteur. Un peu comme si l’inspecteur Derrick s’était mis au film d’action.

Le mieux est encore de décrire la scène la plus nanarde : la poursuite la plus lente de l’histoire qui traumatisa les spectateurs lorsque cet extrait fut projeté lors de la 2ème Nuit Excentrique en février 2006 à la Cinémathèque Française.

L'action se passe au Cambodge, en 1975, alors que les Khmers Rouges se préparent à prendre le pouvoir. Nous sommes au début du film et Mike Monty, qui joue un colonel de la CIA, va rejoindre dans une résidence officielle son espionne infiltrée qui vient de voler des documents.


Avec des gardes aussi éveillés, il n'est pas bien difficile de barboter des documents secrets. Notez la chemise très discrète sous laquelle est cachée la liste secrète des agents communistes.



Hélas, alors qu’ils se retrouvent, celle-ci se fait repérer par des gardes. Poursuite à pied ! Alors qu’ils ont des soldats sur les talons, Monty, pas motivé, se met à trotter tranquillement vers l’échelle incendie à la fenêtre. Puis il se met à descendre bien précautionneusement celle-ci (c’est vrai quoi, pour ce qu’il était payé il allait pas se casser une jambe en plus), se retournant de temps à autre pour tirer sans conviction un coup de revolver en direction des gardes. On a envie de se lever et de lui hurler « Mais putain, dépêche-toi, ils sont juste derrière toi, tu n’es pas obligé de descendre la marche une par une ! ». Heureusement, les soldats, pas beaucoup plus vifs, prennent bien garde à ne pas aller trop vite non plus, histoire de ne pas rattraper Mike vu que ce n’est pas dans le scénario. On assiste donc hébété et rapidement hypnotisé à une trépidante poursuite au petit trot, encore plus lente que la retransmission d’un débat au Sénat.

Là ils rejoignent une jeep. Une fois grimpé en voiture, on se dit que forcément, l’action va pouvoir démarrer. Et bien non, débute dès lors une poursuite à vingt kilomètres heures ! Les voitures se coursent dans une désespérante lenteur qui laisse pantois. Les automobilistes qui arrivent en face vont plus vite que les poursuivants ! L’impression d’irréalité absolue est atteinte quand on entend crisser les pneus dans un virage alors qu’on voit les caisses tourner à un prudent petit quarante. Surtout que les acteurs font tout pour donner l’impression qu’ils vont super vite. Mike Monty, s’apercevant qu’ils sont suivis, ordonne à son chauffeur d’accélérer. Celui-ci passe… la seconde ! Nous avons d'emblée supposé que le réalisateur avait dû prévoir au départ de passer cette scène en accéléré puis l’oublier au montage. En tout cas, cette scène a un effet proprement hypnotique.


La poursuite la moins trépidante de l'histoire du cinéma d'action.



Cette version des faits subodorée à la vision du film nous fut indirectement confirmée par la vision d’autres productions philippines où l’on retrouve ces scènes de poursuites à vingt à l’heure magnifiée par des bruitages de crissements de pneus telles « Laser Force » ou « Les Massacreurs » avec Bruce Baron. Les interviews de Nick Nicholson ou Max Thayer nous ont dévoilé le pot aux roses : accomplies par les comédiens eux-mêmes dans la plus totale improvisation et au mépris de la plus élémentaire règle de sécurité, les scènes de poursuite étaient tournées à toute petite vitesse pour être accélérées par la suite. Sauf que là, ils ont oublié de le faire.

Après cette scène de folie, les choses tournent au vinaigre pour notre colonel de la CIA : Mike perd une jambe au passage et la belle espionne se fait capturer. Qu'à cela ne tienne, Monty recrute un de ses anciens soldats, Slash, pour aller la sauver.


Face au danger, il n'est pas prêt de céder, Rom !



Bien que le reste du film n’atteigne pas le côté hallucinant de la poursuite, il reste encore assez drôle, accumulant les poncifs du sous-Rambo des familles. Dizaines de figurants abattus par grappes, trahison, méchant chauve sardonique, tortures. L’arsenal du genre.


Le méchant communiste (sadique et corrompu comme de juste) et un sbire (Slash en fait une grande consommation).



Romano Kristoff prête à Slash son physique avantageux de commando colérique et en fait des tonnes avec une bonne volonté évidente. Son rôle est d'ailleurs d'une simplicité exemplaire. Il est Peter Harris, alias Slash le découpeur, un genre de bête de guerre indestructible qui vient en aide à son ami sans se poser de questions. Il flingue tout ce qui se met en travers de son chemin. Il est surtout équipé d’un énorme bazooka à jumelles dont l’utilisation est souvent comique. Outre le fait que celui-ci apparaît ou disparaît selon les scènes de façon totalement erratique, il est surtout constitué d’un gros tuyau de PVC grossièrement maquillé que Romano tient de temps en temps à bout de bras, comme s'il ne pesait rien. Evidemment quand il va s'apercevoir qu'on lui a menti, qu'on l'a envoyé dans un piège et que tous ses amis vont mourir, il va se fâcher tout rouge, hurler très fort sa colère et flinguer encore plus de monde. Un genre de crise d'adolescence, mais avec un bazooka.



Si le film a bien une qualité, c’est de ne pas se montrer pingre dans la bagarre. Tentant de camoufler la maigreur de son budget sous une débauche de combats, Gallardo n’hésite jamais à mettre les bouchées doubles sur l’action molle. Rom va, court, vole et nous venge à grand renfort d’explosions de paillotes et d’éradication de méchants Khmers. Hélas, l’aspect désespéramment répétitif de ses flinguages, couplé à un usage régulier de stock-shots pour les scènes de grosses batailles, rend l’ensemble un peu pathétique. Les doublages français sont assez curieux car ils s’arrêtent souvent en plein milieu d’une phrase, probablement pour respecter le rythme original du dialogue, avant de redémarrer comme si de rien n’était.


Cette vieille fripouille de Nick Nicholson s'offre un petit rôle.



Le véritable gagnant de cette opération délire, c’est Mike Monty. Lui qui est habituellement cantonné à quelques apparitions dans des rôles subalternes de colonel Trautman du pauvre, hérite soudain d’un vrai premier rôle et apparaît dans une bonne moitié des scènes du film. Alors il se lâche. S’il ne se foule pas des masses sur les scènes d’action, comme on peut le voir dans l’infernale poursuite, il se donne à fond dans les scènes de dialogue. La moustache fournie, nanti d’improbables lunettes fumées qui lui mangent la moitié du visage, il s’amuse visiblement à jouer les vieux chiens de guerre en proie au doute, même s’il ne semble pas dupe une seconde de ce qu’il fait. Ce subtil mélange de malice et de décontraction goguenarde remporte instantanément la mise.



Au final, « Slash » offre un exemple de ce que l’amateurisme forcené de ces productions philippines peut donner de plus drôle pour l’amateur de nanardise. Généreux en flinguages, explosions, testostérone et mâchoires crispées, ce film constitue une bonne introduction pour celui qui veut s’initier sans trop de risque au monde étrange des productions au rabais de chez Silver Star / Kinavesa.

 

- Rico -
Moyenne : 2.38 / 5
Rico
NOTE
2.5/ 5
Nikita
NOTE
2.25/ 5
John Nada
NOTE
2.5/ 5
Labroche
NOTE
2.5/ 5
MrKlaus
NOTE
1.5/ 5
Jack Tillman
NOTE
3/ 5

Cote de rareté - 5/ Pièce de Collection

Barème de notation

En France je crains que nous soyons contraints d'attendre longtemps avant de voir débarquer ce film en numérique. Celui-ci a pourtant fait la fortune des éditeurs vidéos en leurs temps. Le problème c'est que malgré la multiplicité des sorties VHS, tout cela n'est qu'un beau magouillage de nos grands amis escrocs de chez "Initial" (on les applaudit bien fort !) qui multiplient les sous marques pour vendre plusieurs fois leur camelote. On compte pas moins de 5 éditions différentes sous des habillages rutilants, mais parfois trompeurs :

A tout seigneur tout honneur, "Victory" présente honnêtement son produit sous son titre original de « Slash », tout court.



Ils la jouent d'abord profil bas en sortant chez "Atlantic Home Vidéo" (une de leur sous-marques) une édition quasi similaire à celle de "Victory", si ce n'est un fond blanc.



Puis c'est parti pour le délire puisqu'ils le ressortent presque aussitôt, toujours sous la bannière "Atlantic", avec un habillage fantaisiste (on se demande où ils ont été prendre cette photo qui leur sert de jaquette !).



Dans la foulée ils la ressortent une quatrième fois sous le blason "Empire Vision" avec un visuel piqué à une autre production "Silver Star", toujours avec Rom : « Black Fire ». Bon certes les deux films ont été tournés dans la foulée avec quasiment les mêmes acteurs mais quand même ! Au passage, le film devient « Slash le découpeur ». Voilà qui fait plus viril ! Et surtout totalement mensonger, puisque Slash fait usage d'armes à feu et ne découpe personne dans le film.



N'ayant plus honte de grand chose, "Initial" nous ressort le film sous le titre « Ranger », garde les photos et le résumé et l'affuble d'une nouvelle jaquette fort agressive. Mais attention surprise, car une fois dans le magnéto vous avez une chance sur trois de tomber sur le bon film (ce fut mon cas), ou bien au contraire sur « Jungle Rats », un autre film de guerre de Teddy Page avec Rom, Mike Monty et Ronnie Patterson ou, pire encore, sur « Mission d'enfer », un tripatouillage thaïlandais de chez Filmark, à la mode « Spécial Commando » (mais en version navet) ! N'importe quoi ! A noter que c'est pour l'instant le moyen le plus courant pour mettre la main en France sur "Jungle rats" qui demeure un film très rare !



Le visuel de « Ranger » a également servi de jaquette volante à ces fripouilles de Prism, dont le DVD semi-pirate trouvable à 1€ en supermarché contient le « Mission d'enfer » évoqué ci-dessus.