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Tarkan contre les Vikings

(1ère publication de cette chronique : 2006)
Tarkan contre les Vikings

Titre original :Tarkan Viking Kani

Titre(s) alternatif(s) :Tarkan vs the Vikings, Vikinglerin Gazabi

Réalisateur(s) :Mehmet Aslan

Année : 1971

Nationalité : Turquie

Durée : 1h26

Genre : Paris-Drakkar

Acteurs principaux :Bilal Inci, Kartal Tibet, Eva Bender, Fatma Belgen

Barracuda
NOTE
3.5/ 5


Les films turcs constituent une catégorie à part dans le monde du nanar. Bien qu’abordant tous les genres de toutes les façons possibles, il est impossible de confondre un nanar turc avec un nanar de n’importe quel autre origine. En cela, Tarkan contre les Vikings constitue un cas à part et ce pour une raison toute bête : il est sorti en DVD. L’éditeur "Mondo Macabro" s’est en effet fendu il y a quelques temps d’un beau DVD zone 1 spécial cinéma turc comprenant, outre Tarkan, un autre film intitulé The Deathless Devil et un documentaire d’une trentaine de minutes sur le pop cinéma turc de la grande époque, celle où Cüneyt Arkin était le roi et d’où provient la quasi-totalité des films turcs du site. [NDLR : les caps ont été mises à jour en 2023 à partir de l'édition HD du film]

 

 
Tarkan est un film qui annonce tout de suite la couleur, et même LES couleurs.


Le DVD pour un film turc, ça change tout. Soudain, on n’a plus affaire à ces vidéos baveuses, numérisées à la truelle et dans des résolutions douteuses à partir d’un passage télé du film enregistré sur une cassette antédiluvienne. L’image est claire, le son impeccable et, cerise sur le gâteau, on comprend tout ce qui se passe puisque l’éditeur n’a pas oublié d’inclure des sous-titres (anglais) dans son produit. Concrètement, l’expérience du nanar en est transformée. Le film perd complètement son côté « Tiers-Monde » et devient indiscernable (sur le plan technique en tous cas) d’un nanar italien ou philippin. Si l’aspect cradingue des films turcs habituels peut avoir son charme, il faut aussi supporter tout ce qui va avec, en particulier le son pourri et toutes les scènes de dialogues où le nanardeur français lambda ne comprend rien et s’ennuie. Tarkan contre les Vikings n’est pas le plus dingue des films turcs, loin de là, mais il sait tout de même tenir son rang et, au moins, on ne s’y ennuie jamais.

 


Là, il faut imaginer Assurancetourix bâillonné hors-champ.


Tarkan contre les Vikings est un péplum qui prend place aux alentours de l’an 1000. Il s'agit en fait du deuxième épisode d'une série de 5 films sortis durant les années 1970 et adaptés d'une bande dessinée très populaire en Turquie. Tarkan lui-même est un fier guerrier, descendant des farouches Huns, comme tous les Turcs comme il ne cesse de nous le rappeler. Il rend visite à Attila en personne lorsque la forteresse de celui-ci est attaquée par une bande de Vikings égarés en Méditerranée qui s’empressent de massacrer tout le monde, tuant le roi des Huns, kidnappant la fille d’Attila et laissant Tarkan agonisant. Fatale erreur, car Tarkan se remettra bien vite de ses blessures et n’aura rien de plus pressé que d’aller mettre une rouste aux Vikings et à leur fourbe chef, celui qui s’est arrêté en chemin pour piquer le casque d’Astérix, le salopard. Les choses se compliquent lorsqu’on découvre que les Vikings se sont alliés aux Chinois pour faire bonne mesure.

 
Le fier Tarkan.


Le chef des méchants, le dénommé Toro, est tout simplement génial. Ne choisir que quelques caps parmi le bon millier possible a été une vraie torture.

L'actrice Fatma Belgen, mise en beauté par le film.

Jusqu'à un certain point.


Le support DVD, qui magnifierait n’importe quel film turc, prend une importance toute particulière avec Tarkan tant ce film aime les couleurs qui pètent et le fait savoir. Il suffit d’observer le drakkar des Vikings : il aurait bien plus sa place à Disneyland que dans les rudes mers du Nord. Les bastons sont un parfait régal. Les combattants portent en effet tous des fourrures aux couleurs pastels des plus improbables : bleue, rose ou violette, la fourrure va se nicher partout, y compris sur les accessoires les plus inattendus. Costumes saugrenus et figurants goguenards forment un cocktail explosif. Difficile en effet de confondre le figurant turc de base avec un Viking. Perruques et accessoires semblent avoir été bricolés à partir de panoplies de Ragnar le joyeux Viking achetées au magasin de jouets du coin. Au lieu de camoufler la différence, cet attirail a une furieuse tendance à produire l’effet inverse, surtout quand un figurant à la flamboyante perruque rousse arbore dans le même temps une très brune barbe de trois jours, ou quand un autre perd ses cheveux longs en même temps que son casque !






Des fourrures aux tons pastel du meilleur goût.


Ce figurant, extrêmement reconnaissable par sa non-ressemblance absolue avec un guerrier viking et son hilarante perruque, se fait tuer une bonne douzaine de fois dans le film.


Même le plus motivé des figurants toutefois ne peut rivaliser avec Toro, le chef des Vikings. Avec son extraordinaire fausse moustache, sa non moins formidable perruque et son casque si folklorique, il crève l’écran chaque fois qu’il apparaît. Déchaîné dans la caricature du fourbe, cruel et jamais avare d’une trahison, il constitue le contrepoint parfait au noble et preux Tarkan.

 
Quand on lui raconte une blague, Astérix rie Gaule.

Dans le plus simple appareil, d’une beauté évanescente qu’on vient d’arracher au sommeil…


En bon peplum, Tarkan contre les Vikings comporte aussi son lot de craignos monsters rigolos. Enfin ici, il n’y en a qu’un mais il est tellement bien qu’il compte facilement double ou triple ! La pieuvre géante égarée en mer de Marmara que les Vikings se sont choisie pour emblème fait irrésistiblement penser à Ed Wood. Sorte de baudruche flottante pas plus grande qu'un matelas pneumatique, elle nous est généreusement montrée sous tous les angles et en gros plan au cours de scènes de sacrifice épuisantes pour les zygomatiques. Je l’avoue : j’ai craqué sur le Kraken.






« Quand je m’avance, toi tu recules… Comment veux-tu que je tentacule ? »

 
Tarkan contre la pieuvre. On distingue très nettement les bords de la piscine.


Tarkan contre les Vikings
est un nanar turc pur et dur et il n’y manque aucun des codes incontournables qui ont fait la réputation du cinéma du Bosphore : épées en carton, trampolines à gogo et mannequins en mousse sont fidèles au rendez-vous. Mieux filmées et sensiblement moins confuses qu'à l'accoutumée, les bagarres n'ont pourtant rien à envier aux classiques du genre. Tout le monde bondit dans tous les sens, les objets les plus divers volent à travers la pièce et les couleurs éclatantes des fourrures sur les costumes permettent de repérer d'autant plus facilement les figurants qui meurent et ressuscitent en pagaille. Si Tarkan, avec son image bien nette et ses couleurs vives, n’a pas l’air aussi pauvre que ses confrères, il nous rappelle surtout que les apparences sont souvent trompeuses.

 
Regardez bien le Viking de gauche…




Dans son genre, ce borgne (joué par İbrahim Kurt qu'on a vu aussi dans Savulun Battal Gazi Geliyor) n’est pas mal non plus.


Toutefois, au-delà même de ce que le DVD apporte,Tarkan démontre une maîtrise technique nettement supérieure à la cüneytarkinerie moyenne. La réalisation est sobre, sans effets de zoom qui donnent mal à la tête et le cadrage est impeccable. Il y a même un vrai scénario qui tient debout, si on fait abstraction bien sûr de l’énorme anachronisme qui fait se croiser les Vikings, Attila et les Chinois au milieu de l’Anatolie. Par contre, la musique est piquée directement à 2001 : l'Odyssée de l'Espace. Certains réflexes sont difficiles à perdre, mais ils pourraient au moins essayer de choisir des thèmes moins reconnaissables...


Astérix et les Chinois.



Les Vikings, entre Boat People et Village People.


Au final Tarkan contre les Vikings n’est pas le plus fou ni le plus drôle des représentants du pop cinéma turc. Toutefois, sa sortie en DVD permet de l’apprécier à sa juste valeur, ce qui n’est le cas de pratiquement aucun autre film turc. Grâce à cela, mais aussi grâce à des acteurs et des figurants au mieux de leur forme, un craignos monster haut de gamme, des costumes bigarrés et des perruques ébouriffantes, Tarkan constitue un spectacle de qualité devant lequel on rit souvent et on ne s’ennuie pas une seconde.

La définition même du bon nanar quoi !

On voit parfaitement les bras de l'équipe technique récupérer l'actrice alors qu'elle est supposée faire une chute mortelle.

Addendum :

Le personnage de Tarkan a été créé à la fin des années 60 par Sezgin Burak, et imaginé comme un héros des Huns (que certains considèrent comme les ancêtres des Turcs) vivant des aventures historiques teintées d’heroic fantasy. Sezgrin Burak aimait prendre son temps pour faire ses dessins afin de rendre un travail d'une grande qualité esthétique, c'est pourquoi Tarkan aura un rythme de parution assez lent par rapport aux standards de l’époque. En moins de 10 ans, 15 histoires seulement seront publiées. Son auteur décèdera en 1978, laissant la dernière aventure de Tarkan inachevée.

Sezgin Burak.

Planche de la BD Tarkan contre les Vikings.


Cinq films (dont quatre seront réalisés par Mehmet Aslan) sortiront en salle, avec Kartal Tibet dans le rôle titre : Tarkan : Mars'ın Kılıcı (1969), Tarkan : Gümüş Eyer (1970), Tarkan : Viking Kanı (1971), Tarkan : Altın Madalyon (1972) etTarkan : Güçlü Kahraman (1973). Toutes sont des adaptations d’albums de la bande-dessinée.

Photo de tournage. Dans le film, le dragon de la BD a été remplacé par une pieuvre, faute de budget.


Par ailleurs, Kartal Tibet, l'acteur incarnant Tarkan, se tournera vers la réalisation à partir des années 70. Il réalisera notamment en 2006 Dunyayi kurtaran adamin oglu, la suite/hommage de Turkish Star Wars qui a quelque peu relancé la carrière de Cüneyt Arkin.

- Barracuda -
Moyenne : 3.82 / 5
Barracuda
NOTE
3.5/ 5
MrKlaus
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Kobal
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3.5/ 5
Labroche
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Rico
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4/ 5
Nikita
NOTE
4/ 5
Wallflowers
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Mayonne
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3/ 5
John Nada
NOTE
3.5/ 5
Jack Tillman
NOTE
4.5/ 5
Hermanniwy
NOTE
4.5/ 5

Cote de rareté - 2/ Trouvable

Barème de notation

"Bach Films" a ressorti ce film en VOST dans un coffret "Turkish Collection" aux côtés de "Turkish Star Trek", "Lion Man", "L'invasion des soucoupes volantes" et "Turkish Rambo". Le tout présenté par Christophe Bier. Vous n'avez pas d'excuses.


Mais si vous êtes un puriste, vous pouvez toujours rechercher la VHS turque d'époque...

La bande dessinée qui a inspiré le film est semble-t-il toujours éditée en Turquie.

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