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Turist Ömer Uzay Yolunda (Turkish Star Trek)

(1ère publication de cette chronique : 2005)
Turist Ömer Uzay Yolunda (Turkish Star Trek)

Titre original :Turist Ömer Uzay Yolunda

Titre(s) alternatif(s) :Ömer the Tourist in Star Trek

Réalisateur(s) :Hulki Saner

Année : 1973

Nationalité : Turquie

Durée : 1h12

Genre : Yéyé et poêle à frire

Acteurs principaux :Sadri Alisik, Cemil Sahbaz, Erol Amaç, Kayhan Yildizoglu

Runik
NOTE
4/ 5

Petite note avant de commencer : je n’ai jamais été un gros fan de Star Trek. J’ai vu quelques épisodes des premières séries, une partie des films et ça s’arrête là. Je ne me souviens même pas avoir vu Patrick Stewart en Capitaine Picard, c’est pour dire ! (Nous sommes en froid)


Aaah… Star Trek ! Son vaisseau poêle à frire, ses costumes Haribo, les antennes de Spock, le capitaine Kirk, le docteur McCoy… Tout le monde a déjà entendu parler au moins une fois de l’univers de Gene Roddenberry, que ce soit au travers des différentes séries télévisées ou des longs métrages… La contrée au croissant étoilé n’échappe pas au phénomène et en profite pour se lancer dans le tournage du premier long-métrage jamais sorti sur cet univers, six ans avant la première superproduction officielle !

Mais attention, Turist Ömer Uzay Yolunda[Nanarland : littéralement "Ömer le touriste sur le chemin de l'espace"] n’est pas une repompe éhontée du concept original, il s’inscrit dans une série de comédies centrées sur le personnage de Turist Ömer ("Ömer le touriste") dont le rôle est joué par Sadri Alisik, comique célèbre dans la communauté turque. Pour situer le personnage, disons qu’il se rapproche de Louis de Funès pour la gestuelle et de Eric Judor (du duo Eric et Ramzi) pour tout ce qui est comique enfantin et / ou de répétition, c'est-à-dire parfois amusant mais souvent lourd. [Nanarland : il existe une dizaine de films avec le personnage Turist Ömer, sortis en Turquie entre la fin des années 60 et le milieu des années 70]


Ömer se retrouve téléporté malgré lui sur une planète mystérieuse, où il fait la connaissance de l’équipage de l’Enterprise. Mais bientôt ce dernier est décimé par une étrange maladie, alors qu’un être hypnotiseur polymorphe rôde…

Dès les premières images du film on comprend que le réalisateur a voulu donner dans le genre « pulp ».


Return of the killed tomatoes.


Là dessus apparaît l’Enterprise, avec la vraie musique de la série, bientôt suivie par une reprise yéyé du thème de la quatrième dimension (non, je n’invente rien).


La floue histoire de l’espâââce !


Le pont de l’Enterprise est comment dire… assez rudimentaire. Avant de vous le montrer, je tiens à faire une petite mise en garde : non, il n’y aura pas de plan nichon dans ce film. Par contre, il y aura du plan croupion : toutes les femmes de l’équipage sont vêtues de mini jupes ras-le-bonbon, dévoilant des kilomètres de jambes à tous les spectateurs. Si vous pensez pouvoir tenir le choc, alors vous pouvez continuer de lire, sinon… mouarf, pas besoin de sinon, je devine que vous voulez tous vous rincer l’œil !






Et voilà notre première rencontre avec Spock, ici rebaptisé Spak. Quid de ce changement de nom ? Les milieux autorisés (à savoir moi-même) penchent pour une difficulté de prononciation du « ck » en turc, mais cette analyse n’engage qu’eux. Notre ami Spak, prenant exemple sur le lever de sourcil mi-intrigué mi-amusé de son illustre aîné, en use et abuse pendant toute la longueur du métrage, à tel point qu’on ne peut plus parler d’expression mais carrément de musculation !


Spak, toujours prêt à s’envoyer en l’air… (en partie du moins)


Nous gratifiant d’une entrée que n’auraient pas renié les plus grands top-models, le « Kaptan » Kirk vient prendre place dans son fauteuil cosy sur le pont de l’Enterprise. Kirk est un vrai playboy : regard bleu profond, bouche sensuelle, dentition d’une blancheur éclatante, chevelure ondoyante, c’est le tombeur de ces dames. Jugez-en par vous-mêmes :


Poussez, Kaptan !


Un bref conciliabule entre les têtes pensantes de l’équipage débouche sur l’envoi de Spak et de trois autres membres sur la planète mystérieuse autour de laquelle tourne l’Enterprise. Et qui dit déplacement dans l’univers de Star Trek dit… téléportation !!!

Je vous laisse apprécier la haute technologie mise en œuvre, qui prouve que les Turcs maîtrisaient déjà ce type d’effets visuels bien avant la sortie de Turkish Star Wars.

Arrivée à bon port, notre fine équipe rencontre le professeur Krater, sorte de Géo Trouvetou local, spécialisé dans les ordinateurs nanars et les androïdes. Ces derniers sont extrêmement bien faits : c’est bien simple, on les croirait humains !


Mets de l’huile.


Et pendant ce temps là, à Vera Cruz (... à moins qu'il ne s'agisse d'un faubourg d'Ankara), notre ami Ömer est emmené de force à son propre mariage. Vu la tête de la future mariée, on comprend ses réticences.


A droite il s'agit de Sönmez Yıkılmaz, déjà vu sous le rôle d'Anton dans Savulun Battal Gazi Geliyor.


Il s’en remet donc à Allah pour le sortir de ce mauvais pas, qui va l’exaucer en l’envoyant - comme c’est étrange - sur la planète sus citée…


Si tu bouges un poil, je t’explose la moustache !


Sur l’extrait vidéo qui suit, vous pourrez avoir un aperçu du talent comique d'Ömer, et aussi juger de l’extraordinaire finition des androïdes. Ne sous-estimez pas non plus l’impact de la bande sonore, qui nous rappelle à tout instant que malgré son apparente perfection, l’androïde est une machine, mue par des rouages et des mécanismes… C'est la poursuite infernale !


Le professeur Krater et son assistante :
- Professeur, je crois que vous avez un trou à votre brushing !
- Pas un trou mon enfant, un cratère...

Ömer continue d’amuser la galerie...

...tout du moins il essaye.

Une cigarette imaginaire de 2 mètres de long, qu’est-ce que c’est bon !


Kirk et Spak restent circonspects devant ces pitreries.


Ils décident donc d’envoyer Ömer à la jardinerie, histoire de le calmer un peu. Au milieu de toutes ces plantes se trouve l’attraction du lieu : une belle plante carnivore constituée de deux gants pelucheux et qui dévore goulûment tout ce qui lui est présenté. Cette plante a une autre spécificité : elle détecte l’être polymorphe à bord du vaisseau en poussant des cris euh… comment dire… c’est quelque chose approchant du doublage d’une actrice porno atteignant l’orgasme (simulé, bien entendu).


Attention, gants méchants !


Le film, à peu près cohérent jusqu’ici, bascule dans le grand n’importe quoi avec l’apparition d’une grande bestiole toute moche qui poursuit Kirk dans une avalanche de faux raccords.

 


Graaahh !!! Je suis la grosse bête qui monte, qui monte… et qui est en haut !


Ils règleront leur différend par un concours de lancer de rochers en mousse mais la bestiole étant plus coriace que prévu, Kirk ne doit son salut qu’au « pistolet laser gratté à même la pellicule » de Spak…


Prends ça, vile créature au pantalon rapiécé !


Nos deux héros ne sont pas sortis d’affaire pour autant, car l’être hypnotiseur profite d’un instant d’inattention pour forcer Spak à attaquer Kirk ! L’inévitable bataille fratricide a lieu, débouchant sur un combat poussant l’aiguille du nanaromètre dans le rouge ! Cette planète est décidément très mal fréquentée : sans avoir eu le temps de se remettre de leurs émotions, voilà qu’une troupe d’androïdes leur tombe dessus en criant « gare ! ».


Proverbe Klingon : quand Spak a ses deux sourcils baissés, il va bientôt charger !


Sur le plan sonore, les bruiteurs se sont heurtés à un problème de taille : comment faire comprendre à l’audience que l’être polymorphe est à l’écran, vu que par définition il peut ressembler à n’importe qui ? Ils ont alors fait parler leur génie créatif en utilisant un thème récurrent à chacune de ses apparitions. Une excellente idée en théorie qui malheureusement tombe à plat lorsque la musique choisie se trouve être les premières secondes du générique de Star Trek, parfois passées en accéléré !

Tant que nous en sommes sur les bruitages, parlons du fonctionnement des portes sas de l’Enterprise : jusqu’à la moitié du film environ, les bruitages étaient ceux de la série Star Trek (une sorte de sifflement ponctué par un petit bruit de ventouse). Puis, la cassette servant au doublage ayant dû rendre l’âme, c'est ensuite un des doubleurs qui s'y colle en bruitant les ouvertures / fermetures à la bouche, se fendant de « sssshhhhhh » bien fendards, rarement synchronisés avec le fonctionnement des fameux sas…


La téléportation sous pellicule.


Je m’arrête là pour ne pas tout dévoiler, et pourtant je suis loin d’en d’avoir fait le tour ! Vous allez me demander : « Pourquoi seulement une note de 4/5, alors que ce film a l’air d’être au moins au niveau de TSW ? » La réponse c'est qu'il manque malheureusement à Turkish Star Trek ce réjouissant premier degré qui donnait toute leur saveur aux productions populaires turques de l'époque… Une repompe plus sérieuse de Star Trek avec ce niveau de réalisation aurait bien mérité son 5, mais le fait d’être à la base une comédie pastichant gentiment son modèle coûte au film l’excellence !

Allez, un petit dernier pour la route…

 

 

Addendum :

Vu que la chronique date de 2005, que l’auteur a vu le film en VO non sous-titrée (quelle abnégation !) et qu’il avoue lui-même ne pas très bien connaître Star Trek, il nous semblait nécessaire d’actualiser les captures d'écran et de contextualiser le film à l’orée des informations que l’on a pu glaner depuis.

Turist Ömer ("Ömer le touriste" donc) est une série de films comiques ayant eu un grand succès en Turquie entre la fin des années 1960 et le début des années 1970. Il est amusant de noter qu’avec sa définition à lui du mot "copyright", le film devient officieusement en 1973 la première adaptation de la série Star Trek au cinéma, le film américain ne sortant quant à lui qu'en 1979.

Si Ömer est l’élément comique "contemporain" et "local" dans le scénario, le reste du film - avec les meurtres suspects des membres de l’équipage, l’exploration d’une planète en ruines et le monstre polymorphe - s'inspire trèèèès fortement du tout premier épisode de la série Star Trek diffusé en 1969 : "Ils étaient des millions" ("The Man Trap" en VO). C’est encore plus fragrant quand on voit le look du monstre final à la fin du film :

 

Le monstre de Turist Ömer Uzay Yolunda (1973).

Le monstre de la série Star Trek "The Man Trap" (1966).


Turist Ömer Uzay Yolunda
fait aujourd'hui parti du patrimoine cinématographique turc. Et comme l'attesteront plusieurs montages ou autres créations graphiques postées sur le net des décennies plus tard, il n'échappera pas à une authentique "nostalgie geek" portée par une génération qui a été bercée par ce cinéma dans sa jeunesse.

Le salut caractéristique de Ömer qu'il fait dans tous ses films.

Photo de tournage.

Comment savoir si un film est célèbre dans son pays ? Si une question porte à son sujet dans un jeu TV bien sûr !

- Runik -
Moyenne : 2.33 / 5
Runik
NOTE
4/ 5
Jack Tillman
NOTE
2/ 5
Wallflowers
NOTE
1/ 5

Cote de rareté - 2/ Trouvable

Barème de notation

"Bach film" a sorti un coffret reprenant plein de classiques du cinéma populaire ottoman : "The Lion Man", "L’Invasion des soucoupes volantes", "Turkish Rambo" ("Vashi Kan" même si c'est "Korkosuz" qui est annoncé par erreur), "Tarkan contre les Vikings" et donc notre "Turkish Star Trek". Accompagnée d'une présentation de Christophe Bier et de sous-titres français.

 


Pour le plaisir de montrer les jaquettes, différents petits éditeurs indépendants souvent hélas disparu ont ressorti ce film dans des éditions artisanales. L'éditeur américain "5 minutes to live" s'était ainsi spécialisé dans le DVD-R de raretés turques (dont le Turkish Star Wars).

 


Autre micro éditeur, Bijouflix a lui aussi sorti sa version sous le nom de "Turk Trek", sensiblement la même que la précédente.

 

 

Vous pouvez aussi essayer de trouver le VCD turc chez "Alparslan". Là on n'a pas d'adresse parce que franchement c'est du local. On vous conseille de garder votre argent et d'aller sur le site youtube de Fanatik Vidéo qui a remasterisé le film (les nouvelles caps viennent de chez eux) en très bonne qualité. Sans sous-titres français par contre.