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Edmund Purdom

(1ère publication de cette bio : 2005)

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Le Britannique Edmund Purdom fait partie de ces comédiens dont le nom revient avec une régularité de métronome au générique des séries B et Z des années 1960 à 80, sans que le public puisse toujours identifier leurs parcours ni même parfois leurs visages. Celui de Purdom mérite cependant d'être connu car notre homme manqua d'assez peu l'accession au rang de vedette hollywoodienne, avant de sombrer dans le cinéma bis le plus vaseux. De Michael Curtiz à Joe D'Amato il y a du chemin, que nous allons nous efforcer de retracer.



Edmund Anthony Cutlar Purdom est né le dans la ville tranquillement bourgeoise de Welwyn Garden City, en Angleterre. Divers dictionnaires de cinéma le font naître le 19 décembre 1924 mais sa fille Lilan Purdom précise, dans la biographie qu'elle lui a consacré, qu'il est né en 1926.

Fils d'un critique de théâtre renommé, Edmund grandit dans un milieu cultivé et suit une scolarité très comme il faut dans une école de Jésuites. Son père le voyait ingénieur, mais il choisit de devenir comédien. Débutant en 1945, il travaille notamment, au théâtre, dans la troupe de Laurence Olivier, ce qui lui vaut en 1951 d'apparaître sur une scène de Broadway. Il décide alors de rester aux États-Unis, avec sa jeune épouse, pour tenter sa chance dans le cinéma américain. Les débuts sont difficiles : le bel Anglais ne réussit pas son test pour être embauché par la Warner et il mange un temps de la vache enragée, alors que sa femme est sur le point d'accoucher. La chance finit par lui sourire et il décroche un contrat à la MGM. Beau brun ténébreux, à la voix suave et profonde, il se fait assez rapidement remarquer au cinéma en tenant des petits rôles dans des films de prestige comme « Jules César » de Joseph Mankiewicz.



Sa première grande chance arrive en 1954 avec la comédie musicale « Le Prince étudiant ». Cette opérette est censée mettre en vedette le chanteur Mario Lanza, très en vogue à l'époque. Mais, alors qu'il vient d'enregistrer les chansons du film, Lanza tombe malade (ou, selon les versions, se dispute avec les producteurs). Edmund Purdom est alors embauché pour tenir le rôle principal, et chanter en play-back les chansons interprétées par Lanza. Il se tire bien de cet emploi acrobatique et se voit saluer par la presse comme le nouveau séducteur du grand écran. La MGM le considère dès lors comme l'un des acteurs les plus prometteurs de son écurie.



Mais, la même année, la deuxième grande occasion de Purdom, celle qui aurait pu faire de lui une vedette à part entière, va se révéler un cadeau empoisonné. Marlon Brando renonce à la dernière minute à tenir le rôle principal du péplum « L'Egyptien », réalisé par le vétéran Michael Curtiz et produit par la 20th Century Fox. Prêté par la MGM à la Fox pour l'occasion, Edmund Purdom est engagé en catastrophe pour remplacer Marlon Brando, ce qui, après l'épisode du « Prince étudiant », lui vaudra la réputation de « l'acteur qu'on appelle faute de mieux quand la vedette prévue n'est pas disponible ». Dans cette super-production éléphantesque, destinée notamment à mettre en valeur Bella Darvi, maîtresse du producteur Darryl Zanuck, notre homme est noyé au milieu d'un casting de stars (Victor Mature, Gene Tierney) et d'acteurs confirmés (Michael Wilding, Peter Ustinov). Purdom est de surcroît handicapé par un scénario un peu languissant et par son personnage d'anti-héros mou et passif.



L'interprétation d'Edmund Purdom dans « L'Egyptien » est hélas inégale : son côté un peu monolithique, du fait de l'écriture du rôle, le fait parfois paraître inexpressif. Il se montre plus à l'aise dans les scènes dramatiques, où sa voix de velours fait merveille. Le film, qui a coûté très cher, réalise un score assez décevant au box-office. Edmund Purdom continue néanmoins d'être considéré comme un acteur prometteur au point d'obtenir – consécration – son étoile sur le Walk of fame de Hollywood. Mais la chute va être brutale. Ses films suivants, tournés chez MGM, sont des échecs  commerciaux : la comédie sentimentale « Athena », le péplum « Le Fils prodigue », avec Lana Turner, le film d'aventures historiques « Le Voleur du roi » sont tous boudés par le public.





Mais plus que les déceptions commerciales, c'est la vie privée d'Edmund Purdom qui va précipiter sa chute : il quitte en effet son épouse pour l'actrice Linda Christian - épouse de Tyrone Power - avec laquelle il avait tourné « Athena ». Selon la fille d'Edmund Purdom, ce serait Tyrone Power, désireux de pouvoir divorcer pour épouser sa maîtresse, qui aurait poussé son épouse dans les bras de son jeune collègue. Ces cabrioles conjugales, et le goût de Linda Christian pour la publicité, font soudainement de l'acteur une sorte de vedette de la presse à scandales. Edmund Purdom a en effet eu la malchance de se mettre à dos Hedda Hopper et Louella Parsons, les deux « commères » du journalisme hollywoodien, qui vont désormais l'agonir dans leurs chroniques. Les magazines people de l'époque se gorgent du comportement d'Edmund Purdom, qui a abandonné sa jeune épouse et leurs deux filles pour batifoler avec une séductrice notoire.

La MGM, n'apprécie pas du tout de voir l'un de ses poulains donner l'image d'un mari indigne et décide de faire jouer la « clause de moralité » qui exigeait de ses acteurs un comportement irréprochable : le contrat qui liait Edmund Purdom au studio est rompu. Le comédien britannique commence à être rangé dans la catégorie peu enviable des « ex-futures vedettes » : son étoile sur le Walk of Fame va même être retirée – selon les versions, en raison des échecs commerciaux de ses films, ou de sa vie privée – et disparaître de la circulation. Il est, à ce jour, la seule vedette à avoir subi une telle indignité.

Edmund Purdom voit sa carrière battre de l'aile. Quasiment pestiféré à Hollywood, il rentre dans son pays natal, où il retrouve un temps le succès en interprétant le rôle principal de la série télévisée historique « Sword of freedom », qui dure deux saisons.

Entretemps, il s'est séparé de Lindia Christian et épouse en 1957 Alicia Darr, une ancienne maîtresse de John F. Kennedy. Mais, dès la fin des années 1950, il va se tourner vers l'Italie,où de nombreux acteurs hollywoodiens de second plan – Cameron Mitchell, Brett Halsey etc. – voient l'occasion d'accéder aux premiers rôles ou de s'y maintenir. La présence au générique de visages et de noms plus ou moins connus outre-Atlantique contribue à l'exportation de ces films, et assure alors en Europe la domination du cinéma de divertissement italien. Purdom devient ainsi l'un des visages les plus connus du cinéma populaire transalpin : d'abord orienté tout naturellement vers le péplum, il joue le rôle d'Hérode, despote de Judée, dans « Le Roi cruel ». Mais il va également s'illustrer dans le film d'aventures historiques qui fait fureur entre la fin des années 1950 et le début des années 60. Son côté ténébreux lui vaut assez souvent de jouer les rôles de traîtres ou d'anti-héros, dans ces heures glorieuses des cinémas de quartier.







Contrairement à la plupart des acteurs anglo-saxons alors exilés à Rome, Edmund Purdom va se fixer définitivement en Italie, qui abritera désormais 80% de sa filmographie. Il vit plusieurs années de « dolce vita », en compagnie de la mondaine Lindia Christian qui est revenue auprès de lui après son second divorce. Le couple « maudit » fait alors le bonheur de la presse people italienne : Edmund fait figure de beau-père des filles de Tyrone Power, dont Romina Power qui deviendra plus tard une chanteuse de variétés à succès en Italie. Il daigne en outre renouer avec ses filles qu'il avait abandonnées, et qui grandissent à Cannes auprès de leur grand-mère : pendant plusieurs années, elles le rejoignent en Italie pendant les vacances scolaires et le côtoient sur les tournages Après huit ans de liaison ultra-médiatisée et à éclipses, Edmund Purdom et Linda Christian se marient en 1962. Mais, cerise frelatée sur un gâteau amer, leur mariage durera moins d'un an. En outre, la dolce vita d'Edmund ne va pas tarder à tourner à l'aigre.







Dans les années 1960, la nouvelle vogue des westerns spaghettis ne permet pas à Purdom de conserver ses galons de vedette du cinéma populaire, son physique romantique ne s'adaptant pas vraiment au genre. Ses tentatives dans ce registre – notamment « Le Justicier du Sud », dont il tient la vedette – ne sont guère convaincantes. En quelques années, sa carrière va décliner. Edmund Purdom, de manière encore plus brutale et rapide que, plus tard, Richard Harrison, va se mettre à tourner à peu près n'importe quoi, jusqu'à sombrer dans les tréfonds du Z.



Dès les années 1970, la présence de son nom au générique est devenue synonyme de ringardise, au point que son apparition en Président des USA dans « 2019, Après la chute de New York » fera presque figure de crème de sa filmographie. On le voit notamment dans « Le Château de Frankenstein » alias « Le Château de l'Horreur » (Terror, il castello delle donne maledette / Frankenstein's castle of freaks), classique du film d'horreur nul, qui fit s'écrouler de rire le marché du film de Cannes en 1974 et vante pour casting un véritable bestiaire de stars déchues (Rossano Brazzi, Michael Dunn) et de vedettes du Z (dont Gordon Mitchell, Salvatore Baccaro, Luciano Pigozzi…).



Toujours bel homme, mais le visage morne et le regard désabusé, Edmund Purdom joue les guest-stars dans quantité de sous-produits de plus en plus médiocres, où il gaspille un talent qui semble s'être envolé en même temps que sa jeunesse. Il donne le sentiment de mener sa carrière sans grand enthousiasme : ainsi, il déclarait ne plus se souvenir de l'identité du réalisateur du « Château de Frankenstein », film dont il n'avait même pas vu les rushes !


Edmund en parrain dans « Killer vs Killers / Death commando ».



Dracula parodique dans « Fracchia contro Dracula » (1982)



Il travaille donc pour des maîtres du navet et du nanar comme Jesus Franco (« Capitaine de quinze ans »), Juan Piquer Simon (« Le Sadique à la tronçonneuse ») ou Joe D'Amato (l'heroic-fantasy « Ator », « Horrible » où il joue un curé chasseur de serial-killer…). Dans cette période peu faste, il réussit cependant à obtenir plusieurs seconds rôles dans des productions de prestige comme la mini-série « Le Souffle de la guerre », avec Robert Mitchum. On le voit également dans un téléfilm sur la vie de Sophia Loren – avec cette dernière dans son propre rôle – dans lequel il interprète Vittorio De Sica.






Edmund mange son pain noir dans « Ator » de Joe D'Amato.



Mais la vraie place de Purdom est désormais dans le bis, comme en atteste notamment sa présence dans le « 2019 » de Sergio Martino ou dans « Fracchia contro Dracula », parodie italienne de films de vampires où il interprète le Comte. Edmund Purdom travaille parallèlement comme doubleur, faisant bénéficier de sa diction parfaite la version anglaise, destinée à l'export, de quantité de films italiens (il prête notamment sa voix au commentaire du merveilleux « Suède, enfer et paradis »). Il travaille régulièrement pour un studio de post-synchronisation géré en Italie par un Britannique expatrié, et, outre les doublages, enregistre quantité de voix off de documentaires.

Sa carrière au cinéma ne cessant de décliner, Edmund Purdom s'y intéresse de moins en moins, et consacre une part croissante de son temps à sa véritable passion : la musique classique ! Mélomane passionné et érudit, violoniste de niveau professionnel, il travaille bénévolement pour l'Accademia nazionale di Santa Cecilia, une prestigieuse société musicale italienne, pour laquelle il enregistre de nombreux concerts. Il constitue pendant des années une très importante archive musicale jusqu'à ce que l'Académie, peu reconnaissante, décide de confier son travail d'enregistrement à la RAI.



Purdom va également s'essayer à la mise en scène, mais sans beaucoup de bonheur : en 1984, de retour pour l'occasion dans son Angleterre natale, il réalise et interprète le rôle principal de « Don't open till Christmas », un thriller horrifique à petit budget. L'expérience n'est pas concluante : Purdom se voit retirer la mise en scène par le producteur Dick Randall avant la fin du tournage. Selon sa version des faits, Dick Randall, qui ne payait ni cotisations ni TVA, avait fait l'objet d'un chantage de la part d'un membre de l'équipe, qui l'avait contraint à lui confier la réalisation du film. Edmund Purdom demeure cependant crédité au générique de ce slasher, qui se traîne une réputation de navet sinistre.



Actif jusqu'à la fin des années 1980, Purdom ralentit avec la fin du bis transalpin son rythme de tournage, à l'exception de quelques participations à des séries télé italiennes.

Si le déclin constant de sa filmographie constitue un spectacle assez triste, quand on considère les hauteurs que notre homme a côtoyées, la clé en est peut-être dans une certaine distance ironique vis-à-vis de son métier : « On approche la dépression nerveuse quand on se met à croire que son travail est très important », déclarait-il ainsi. « Il est meilleur acteur qu'il ne le croit », commentait quant à lui Juan Piquer Simon.



Décrit par les témoignages comme un esthète, amoureux de l'Italie au point de se considérer comme italien à part entière, Edmund Purdom était plus intéressé par la musique et par une certaine dolce vita romaine que par la gestion d'une carrière d'acteur qu'il savait sabordée. Vivre au soleil transalpin dans la plus belle ville du monde, en tournant distraitement des nanars, était-ce une manière de trouver le bonheur ou bien de fuir le réel ? Jusqu'au bout, Edmund Purdom aura vécu en Italie sans titre de séjour en règle, comme détaché du monde et des responsabilités. Installé dans un petit appartement romain avec sa dernière compagne, il survit grâce à une petite pension et ne renoue avec sa fille aînée que par intermittences. C'est à Rome, sa ville d'adoption, qu'il s'éteint le 1er janvier 2009.

Sa fille aînée Lilan Purdom, qui a mené une carrière de journaliste à TF1, a publié en 2018 « Hollywood Garage », un livre retraçant l'histoire douloureuse de ce père trop absent, espoir du septième art, star déchue, vedette du nanar, puis naufragé du cinéma.

- Nikita -

Films chroniqués

Filmographie

1953 - Titanic
1953 - Jules César
1954 - Le Prince étudiant
1954 - L’Egyptien
1954 - Athéna
1955 - Le Fils Prodigue
1956 - The King’s thief
1957 - Sword of freedom
1958 - Guet-apens à Tanger
1958 - Le Roi Cruel
1959 - Les Cosaques
1960 - Salammbô
1960 - Moment of danger
1960 - La Furie des barbares
1960 - Les Nuits de Raspoutine
1960 - Das Grosse Wunschkonzert
1961 - Le Dernier des vikings
1961 - Soliman le conquérant
1961 - Néfertiti, Reine du Nil
1962 - Les Révoltées de l’Albatros
1963 - La Fayette
1963 - The Comedy man
1964 - Der Letzte Ritt Nach Santa Cruz
1964 - The Yellow Rolls-Royce
1964 - The Beauty Jungle
1965 - Los Cuatreros
1965 - L’Assaut du Fort texan
1966 - L’Homme qui rit
1968 - Le Justicier du sud
1968 - Scusi, lei conosce il sesso ?
1968 - Etsi gennithike mia megale agapi
1968 - Crisantemi per un branco di carogne
1971 - Giornata nera per l’ariete
1971 - Le Corsaire Noir
1972 - L’Amante del demonio
1973 - L’Onorata Famiglia
1973 - Los Ojos siniestros del Doctor Orloff
1973 - Dagli archivi della polizia criminale
1974 - Le Château de l’horreur / Le Château de Frankenstein
1974 - Un Capitaine de Quinze ans
1975 - Les Suspects
1975 - Povero Cristo
1975 - Emilie l’enfant des ténèbres
1976 - A Matter of time
1976 - I Padroni della città
1976 - Il Colpaccio
1979 - SOS Concorde
1979 - Les Contrebandiers de Santa Lucia
1980 - Sophia Loren : her own story
1980 - L’Altra donna
1981 - Lo Scoiattolo
1982 - Horror Safari / Invaders of the lost gold
1982 - Horrible / Absurd / Anthropophagous 2
1982 - Amok
1983 - The Scarlet and the black
1983 - Winds of war
1983 - 2019 après la chute de New York
1983 - Le Sadique à la tronçonneuse
1983 - Champagne in Paradiso
1983 - Ator
1984 - Don't open 'till Christmas
1985 - The Assisi underground
1985 - Fracchia contro Dracula
1985 - Killers contro killers
1987 - Funny boy
1987 - Appuntamento a Trieste
1988 - Don Bosco
1989 - Diritto di vivere
1990 - L'Abîme
1992 - Un Orso chiamato Arturo
1996 - Il Barone
2000 - I Cavalieri che fecero l’impresa
2001 - The Seventh scroll
2001 - Titanic : the animated movie