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Conan le Conquérant


Conan le Conquérant

Titre original :Conan

Titre(s) alternatif(s) :Conan the Adventurer

Réalisateur(s) :Gérard Hameline

Année : 1997

Nationalité : États-Unis / Allemagne

Durée : 1h30

Genre : Le recalé du Walhalla

Acteurs principaux :Vernon Wells, Mickey Rooney, Ralf Moeller, Danny Woodburn, Robert McRay, Andrew Craig, Jeremy Kemp, Andrew Divoff, Edward Albert, Aly Dunne

Jack Tillman
NOTE
2.5/ 5


Du charisme en barre (poil au barbare) !


La première adaptation de Conan le Barbare, sortie en 1982, est un chef-d’œuvre. Par son talent hors-normes, son réalisateur John Milius avait réussi le tour de force de transcender un genre considéré comme mineur, pour l'élever au rang d'un opéra wagnérien au souffle épique, d'une puissance visuelle et d'une beauté somptueuses. Malheureusement, tout le monde n'a pas le génie artistique de Milius. La deuxième adaptation ciné du héros de Robert E. Howard, Conan le destructeur, sortie en 1984, marquait déjà le pas. Réalisé par le pourtant talentueux Richard Fleisher, ce dernier considérait l'heroic fantasy comme un genre plus léger, voire futile, et nous livra une version infantile et grand public de l'univers du personnage (bien que Richard Fleisher ait estimé avoir fait un meilleur travail que Milius, dont il trouvait le film "prétentieux" !). Depuis lors, le genre sword and sorcery fut l'un des plus maltraités par le cinéma et la télévision, en étant le plus souvent synonyme de culturiste bovin, d'action fauchée et de décors minables. On songe bien sûr aux nombreuses productions ringardes made in Italy dans les années 80, mais aussi à ce qui nous est venu des Etats-Unis la décennie suivante, comme la série Hercule, Kull le Conquérant (tous deux interprétés par Kevin Sorbo), ou encore le piteux Conan le Conquérant qui nous intéresse ici. Ce dernier constitue sans doute l'un des pires avatars d'un genre hélas bêtement réduit à montrer un gros bourrin casser la tronche à des monstres en beuglant. Abusivement présenté dans l'édition DVD française comme la suite officielle des Conan avec Schwarzie ("Le plus célèbre barbare du cinéma est de retour pour de nouvelles aventures" ; "Ralf Moeller reprend le flambeau laissé par Arnold Schwarzenegger"), Conan le Conquérant est en fait l'épisode pilote d'une série télé si catastrophique qu'elle n'a jamais dépassé le stade de la première saison.


Conan, l'homme de Crom à gnons.


En guise de légitimité un peu dérisoire, les producteurs sont allés recruter Ralf Moeller, un ex-Mr Univers teuton, histoire sans doute d'établir une vague analogie entre leur interprète de Conan et celui de Milius : quoi de mieux qu'un bodybuilder d'origine germanique pour jouer les barbares ? Seulement voilà, si avec Ralf Moeller les biscotos sont bien au rendez-vous, le charisme et le jeu d'acteur sont en revanche cruellement absents. Nanti d'une tronche collector, inexpressif au-delà de l'infini, le regard complètement vide, la démarche balourde, vêtu d'un slip en fausse fourrure du pire effet, beuglant et grimaçant comme un forcené à chacun de ses coups d'épée, voilà un Conan à peine digne d'un ersatz italien des années 80. Soyons honnête : Ralf n'est pas trop mauvais acteur lorsqu'il s'agit de jouer les seconds rôles et qu'il est correctement dirigé (Gladiator, Pathfinder, voire même Far Cry d'Uwe Boll où il tient un rôle plus conséquent), mais dans une production foireuse comme Conan le Conquérant, où il se retrouve à devoir porter tout le film sur ses larges épaules avec une direction d'acteurs quasi-inexistante, sa prestation devient un ravissement permanent pour le nanardeur.


MEUH !

BEEEEUUUAAAAAAARGHH !!!

Conan et son sidekick nain (qui a la même voix que Bugs Bunny) s'extasient sur la puissance d'évocation du glaive, symbole phallique par excellence.

Carlos le barbare.

Bud Spencer n'a pas beaucoup changé, par contre Terrence Hill a fait de la muscu et adopté la coupe de Vincent Lagaff.

Les mêmes lors d'une soirée costumée.

Salut, nous on est les potiches de service. Ca va, on a l'air assez cruches comme ça ?


Résumons un peu l'histoire, qui nous est présentée sur un ton sentencieux et solennel par un narrateur qui n'a pas du tout la voix de l'emploi : le méchant sorcier Hissah Zul, roi des Cimmériens, souhaite empêcher la prophétie qui prédit la venue d'un puissant guerrier du nord qui mettra à bas son règne de terreur et prendra sa place sur le trône. Il envoie alors ses légions à la recherche de Conan (car si vous avez plus de deux neurones vous aurez deviné qu'il s'agit de lui) et grâce à la sorcellerie, notre héros et la villageoise dont il est épris sont capturés. Conan est envoyé combattre les gladiateurs dans l'arène tandis que la chérie de son cœur est retenue prisonnière par un sous-sorcier aux ordres de Hissah Zul, personnage que par commodité nous appellerons Le Fourbe. Parvenant à s'évader en provoquant une révolte, notre Cimmérien devra conquérir une émeraude magique pour délivrer celle qu'il aime. Voilà donc un pitch qui, bien que reprenant certains personnages et passages des écrits de Howard, ne fait que condenser à peu près tous les clichés du genre, sans que rien n'apporte à ces péripéties téléphonées le moindre souffle épique.


Hissah Zul, dont l'interprète (Jeremy Kemp, dans son dernier rôle) cabotine à fond les ballons, en étant parfois pris de tremblotements faciaux de vieillard sénile.

Notre sorcier n'en branle pas une de tout le film et passe son temps à taper la discute avec un crâne en plastique qui lui sert de conseiller.

Le chef de l'armée du méchant (le second couteau Andrew Divoff).

Le même avec son casque des "Monty Python : Sacré Graal".

Le fourbe de service.

La blonde héroïne, une paysanne au physique d'ex-top model et au jeu grimaçant.


Sur le fond, tous les poncifs auxquels on peut s'attendre dans un nanar de sword and sorcery se trouvent réunis dans cette grotesque pantalonnade, et sur la forme le traitement visuel n'arrange pas les choses. Vous vous attendiez à un minimum de professionnalisme de la part d'une production télévisuelle ? Vous aurez un jeu de rôle grandeur nature à l'interprétation de patronage dont chaque image atteste du budget famélique. Tout le film se déroule soit dans un sous-bois, soit dans des décors en carton du plus pitoyable et artificiel effet. La misère est ici absolue et les effets spéciaux sont tous à pleurer de rire. Entre images de synthèse ultra-rudimentaires et mal intégrées, et craignos monsters en marionnettes miteuses ou en CGI foireux, on peine à croire que les auteurs aient espéré vendre un produit aussi cheap à la chaîne du câble la moins regardante (ce qui fut tout de même le cas, ô miracle, ô hérésie).


Un décor digne d'une reconstitution de monument en 3D pour visite touristique.

"C'est magnifique !" (dixit Conan)

Une momie old school bien poussiéreuse.


Des FX nanars niou djénérécheun.

L’araignée géante de "Ator" s'est faite faire un lifting sous paint.


L'intégralité du casting joue à côté de ses pompes, entre les guest-stars qui cabotinent toutes à mort pour transcender leurs rôles stéréotypés, l'amateurisme des acteurs principaux, et les figurants qui s'agitent dans tous les sens lors des scènes de batailles plombées par une réalisation nullissime, qui abuse des effets débiles et des ralentis racoleurs, et par une musique pompière martelée au synthé. Affublés de costumes de carnaval, les comédiens débitent, les uns sans grande conviction, les autres en en faisant des caisses, des dialogues qui sont autant de répliques à l'emporte-pièce. Exemple, lors de la scène sentimentale à deux centimes entre notre barbare demeuré et sa copine :
Copine de Conan : « Pour quelqu'un d'aussi fort, tu as des gestes d'une grande tendresse ! »
Conan : « Et toi tu es comme du fer enveloppé dans de la soie, par Crom ! »
Ou la réplique finale de Conan : « Par Crom ! Tous unis, nous aiderons les opprimés ! »
Conan le conquérant c'est un casting en or zéro carat :


Vernon Wells, qui joue le maître des gladiateurs, nous offre une performance goguenarde comme lui seul en a le secret.

Un couteau dans une gorge d'enfant, ça s'enfonce comme dans du beurre.

Ou comment conserver sa couronne de champion du monde de cabotinage artistique même après vingt ans de carrière.

Edward Albert joue le couard du village, assénant les répliques du genre "Hissah Zul nous a toujours traité avec indulgence, ne nous révoltons pas, sinon nous allons tous mourir !", avant de devenir soudain et inexplicablement un courageux révolutionnaire défenseur des libertés encourageant ses camarades à renverser l'oppresseur.

Edward en mode "Ouéééé ! Allons-y ! Promizoulin, finissons-en !"

La production, qui ne se refuse décidément rien, a réussi à s'offrir pour le rôle de Crom la participation de Richard Burton himself, qui fait ici un cameo treize ans après sa mort par le biais d'un stock-shot d'outre-tombe !

"Conan le conquérant", un film qui plonge ses interprètes dans l'embarras.


Produit estomaquant de ringardise, pathétique d'un bout à l'autre mais d'une débilité réjouissante et profondément exaltant de mauvais goût, "Conan le conquérant" est d'autant plus consternant qu'il se réclame des écrits fondateurs d'un genre dont il représente le fond de la poubelle. Spectacle des plus sympathiquement ratés, le résultat ressemble à une parodie ou à un florilège illustré de tout ce qu'il ne faut pas faire lorsqu'on a la moindre prétention à proposer des aventures un tant soit peu épiques. Méchants sournois et rigolards, héros aux muscles copieusement huilés, monstres grotesques, cabotinage et carton-pâte à tous les étages, mise en scène pédestre (c'est filmé avec les pieds, quoi),... un bonheur à savourer sans hésitation. Le Z télévisuel nous aura quand même offert de bonnes tranches de rigolade, par Crom !


Nickel Crom !



- Jack Tillman -
Moyenne : 2.50 / 5
Jack Tillman
NOTE
2.5/ 5
Kobal
NOTE
2.5/ 5

Cote de rareté - 1/ Courant

Barème de notation
Cet épisode pilote (titré "The Heart of the Elephant" lors de sa diffusion à la télévision américaine) nous est vendu comme la suite officielle des Conan avec Schwarzie, dans une édition DVD zone 2 au contenu basique mais proposant la VF d'origine (vous pourrez ainsi profiter du doublage de Ralf Moeller, qui se montre à la hauteur de la performance de l'original).


La jaquette du DVD français qui survend légèrement le produit.