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Fight the Kickboxer

(1ère publication de cette chronique : 2007)
Fight the Kickboxer

Titre original : Fight the Kickboxer

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Wing-Chan Leung (alias Vincent Leung ou Vincent Cheung)

Année : 1992

Nationalité : Hong Kong / Thaïlande

Durée : 1h25

Genre : Anthologie post-mortem du 2 en 1

Acteurs principaux :Steve Brettingham, Nick Brandon, Hannah Crawford, Jioff Gabriel

Kobal
NOTE
3.75/ 5

La magie ne meurt jamais. Elle s'exprime parfois de manière étrange, se dissimulant sous d'informes aspects qui ne laissent en rien présager sa véritable nature. Ainsi en est-il des pépites nanardes qui se protègent des spot-lights et du strass de la gloire du monde pipole en se réfugiant dans de crasseuses éditions VHS aux jaquettes peu ragoûtantes pour le tout-venant. Seul l'aventurier nanarophile particulièrement hardi et dont la témérité lui permet d'embrasser les vilains crapauds par simple curiosité, réussit à dénicher à l'occasion une merveilleuse princesse aux origines exotiques. Au prix bien entendu d'une méchante éruption verruqueuse labiale chronique, mais on n'a rien sans rien.


Un crapaud.

Le cas présent est plus complexe : la blonde princesse s'affichait ostensiblement sur la jaquette. Mais une certaine méfiance finit tout de même par se développer chez les survivants de la poïkilothermose, surtout quand on a connu sa sœur jumelle sous un autre nom d'un soir (« Combat pour l'Honneur ») qui, elle, n'aura laissé que le souvenir d'un arrière-goût de navet en bouche. Heureusement pour ce site, la folie inhérente à l'interminable tâche de débroussailleur de vidéothèque ancienne l'emporte souvent sur la raison et je succombais finalement à la tentation d'embrasser la douce princesse.

Le résultat ne se fit pas attendre : surgit du fond de cette antique bande une créature dimorphe, abomination constituée d'un assemblage disparate de chairs mortes dont la cohésion semblait bien fragile. L'évidence se fit jour, car un tel être ne peut qu'évoquer au connaisseur les actions ténébreuses d'un ancien studio nécromancien, connu sous le titre maudit d'IFD. Le diabolique Dr Lai et ses mignons, secondés par l'infâme Igor'dfrey Ho, avaient ainsi produit de nombreuses créatures hybrides, déterrant en toute illégalité des cadavres de pellicules asiatiques pour y accoler de manière contre-nature des séquences arrachées à de jeunes acteurs étrangers insouciants. Il leur suffisait ensuite d'y insuffler la vie, si ce mot a encore ici un sens, non pas en jouant avec un cerf-volant une nuit d'orage, mais en lui donnant une nouvelle voix censée maintenir vaille que vaille l'unicité artificielle de ces pièces éparses. Il ne leur restait plus qu'à ajouter une âme souillée à cet être en le coiffant d'un bandeau de Ninja.
Ces terribles nécromants du 7ème Art envoyèrent ainsi leurs légions de monstres difformes aux pyjamas multicolores aux quatre coins de la planète, jusqu'à mettre en péril l'équilibre même du Monde. IFD se dût alors de réagir pour ne pas détruire ceux qu'il méprisait car paradoxalement, il tirait d'eux sa puissance. Cessa alors dans les labos infernaux la mise au point de morts-vivants Ninjas au profit d'une nouvelle race de seigneurs du ring, car en vérité, je vous le dis, Joseph entonna l'invocation suivante : "Kickboxer, lève-toi et marche". La suite appartient à la légende.


Une Liche.

Le présent cobaye, connu sous l'appellation impie de « Fight the Kickboxer », appartient logiquement à cette seconde vague de Frankenstein orientaux. Un titre qui donne tout autant le ton du film qu'il en résume le scénario. L'analyse de la chair en dessiccation et des organes putréfiés m'a permis de comprendre le fonctionnement interne de la bête. Voici ce qu'il en résulte...

Harry Wells perd son titre de champion du monde de kickboxing face à son ami, Rough Tati. Ces deux-là n'ayant pas que le sport dans la vie, ils trempent pour le plaisir dans un trafic de faux billets. Mais leur amitié commence à battre de l'aile quand Tati souhaite diversifier leurs activités en investissant dans les marchés porteurs que sont l'armement, la prostitution, la drogue et le jeu clandestin. Harry s'y refusant, le duo préfère mettre calmement fin à leur collaboration. D'une impolitesse peu courtoise, la police interrompt alors leur pot de départ, et suite à une brève course-poursuite, finit par arrêter notre gaillard ex-champion du monde, direction le bagne. En cellule, il fait alors la connaissance de Mason et sa bande, profession méchants de service. Mais contre toute attente, Harry est presque victime de sbires envoyés sur place par Tati pour se débarrasser de lui. Il profite donc d'une évasion généralisée pour se carapater et tenter de récupérer son pognon, en possession de son ancien partenaire qui désormais traficote avec le fameux Mason. On le comprend bien, la résurrection de bandes vidéos mortes ne peut avoir lieu sans quelques relâchements dans la cohérence scénaristique.


Ce policier menace les truands avec des menottes, sorte de mix entre sa plaque et son flingue.


Le talent d'IFD se reconnaît au fait qu'il suffit de jeter un œil 30 secondes sur leur bestiau pour comprendre à quel point celui-ci est génialement mal-foutu. Alors que les sombres techniques d'illusion marketing essaient de nous vendre une histoire d'action testostéronée dans un univers de mâles en sueur qui ne rechignent ni à défendre leur honneur en se frappant le crâne avec leurs gants de boxe, ni à récupérer leur du en affrontant des fusillades, les dures lois de l'entropie finissent toujours par s'imposer, démolissant le trompeur sortilège tel le froid katana de la réalité dans une pastèque doucement rêveuse.

La réalité, c'est une salle des fêtes contenant un ring minuscule sur lequel s'agitent avec une conviction ridicule deux guignols en short. Si "L'Abominable Tati, dit Le Serpent à Sonnettes" fait vaguement illusion, que dire du "Grand Champion Harry" ? Gringalet de 1m65, l'expression faciale d'une endive béchamel oubliée sous une tôle dans le désert de Gobi, le charisme d'un formulaire administratif, seul son short "Kung-Fu" (sic) rappelle son supposé statut de kickboxer de haut niveau. Son seul talent est l'immuabilité : figé dans la mort, il ne changera pas d'un iota jusqu'au mot fin. Une valeur sûre, dont certains morceaux avaient déjà été retrouvés en compagnie de Tati sur un autre cadavre ambulant similaire, nommé avec sobriété « Kickboxer King ».


Steve Brettingham dans le rôle de Harry Wells, n°1 mondial de kickboxing.



Nick Brandon dans le rôle de l'Abominable Tati.

Le décor quant à lui se résume à un fond noir, deux rangées de chaises pliantes occupées par des figurants vaguement motivés qui ne rateraient sous aucun prétexte un championnat du monde de cette importance, et un couple de commentateurs sportifs qui papotent entre eux et élèvent l'art du remplissage par le vide à un niveau rarement atteint ailleurs qu'au comptoir du plus miteux des bistrots. Heureusement, le cinéma, même maléfique, ne se résume pas aux images, et c'est avec délice que l'on constate que la voix vitale donnée à « Fight the Kickboxer » a déjà été tellement ré-utilisée sur d'anciennes créatures qu'elle en vient quasiment à s'auto-parodier. Des dialogues débiles servis par des doubleurs qui reviennent de tout, une absurdité habituelle que l'on a appris à apprécier comme de vieilles pantoufles. Quant aux bruitages, il ne faut pas s'étonner de découvrir que taper dans un corps humain provoque un bruit de coups dans un bidon en plastique vide. Bref, le début de la dissection est sidérant de nanardise et c'est avec empressement que l'on farfouille dans le reste de la bidoche moisie à la recherche de si succulents morceaux.


Ces deux-là défoncent tout niveau répliques abyssalement nulles mais hilarantes.



"Speed Endive, vous aviez commandé une métaphore légumière ?"



Hannah Crawford dans un rôle d'une inutilité scénaristique absolue.

L'aventurier légiste sait d'expérience que le morbide Dr Lai utilise bien souvent une autre illusion qui consiste à donner une apparence de bon gros nanar à son hybride pour ensuite piéger le spectateur victime dans les affres d'un obscur et miteux film asiatique interminable. Le genre de chair avariée au goût terreux qui peut mettre KO le plus solide des gaillards. Qu'en est-il ici ? Le cadavre d'origine est un polar probablement thaïlandais, à la nécrose un peu sombre par moment, qui voit le sergent Jason Moreno et son assistant Mando traquer Mason et sa bande, déjà responsables de la mort de l'épouse du-dit sergent. On aurait pu craindre le pire, mais force est de reconnaître que la pilule passe plutôt bien car si toute la barbaque occidentale d'IFD est de très haut niveau, nos deux héros asiatiques s'enquillent eux aussi des tronches particulièrement peu intelligentes. Entre deux interpellations musclées, ils profitent de leur temps libre, l'un pour jouer avec sa jeune fille, Kathy, l'autre pour entretenir une relation sentimentale d'une siruposité goudronneuse avec Lisa (la demande en mariage va faire rêver dans les chaumières). Chaque scène de ce genre est bien heureusement sur-démolie par un doublage au diapason et une musique lénifiante. De plus, l'équité est finalement à peu près respectée dans cet accouplement contre-nature de kickboxers et de mafieux thaïlandais.


Le sergent Jason Moreno (Willi Kindo ?) regrette d'avoir dit bonjour à un loubard.



Mando (Mando Iva ?) tente de reconquérir sa douce grâce à son regard charmeur.



L'arrogant Mason, qui n'arrive pas à vendre une seule arme de tout le film.



Quelques trognes qui rappellent l'indiscutable talent de casting d'IFD.

Si « Fight the Kickboxer » doit se distinguer de ses prédécesseurs, c'est bien par une utilisation remarquable de la plus célèbre des techniques du studio IFD, celle qui constitue le fondement même de l'école hong-kongaise : le 2 en 1. Ses rites et coutumes traditionnelles ont été parfaitement décrites par les éminents spécialistes de la ninjologie d'outre-tombe que sont les Professeurs N. Ikita, J. Nada, L. Rôt d'Eur, R. I. Co, W.Olf-Wood (et j'en oublie). Mais ici, quasiment aucun coup de téléphone-agrafeuse ou de modestes champs-contrechamps stériles pour suturer ensemble les différents membres spumeux. Le technicien sbire chargé du charcutage (Igor'dfrey Ho lui-même ?) a été beaucoup plus loin en effectuant un véritable travail d'orfèvre mortuaire, à même de tromper l'œil non-averti du néophyte et de plonger dans le doute l'assistant nanarophile récemment formé.

La gymnastique de montage en 3 étapes

1 - Insérer le plan du dossier à ajouter.



2 - Raccorder sur le visage d'un personnage d'origine.



3 - Insérer le plan de ses propres dossiers. Le tour est joué.

Ainsi, l'arrivée au bagne est l'occasion de commencer à mélanger subtilementgweilos et autochtones, en fourrant dans une même cellule des acteurs provenant de plusieurs horizons cinématographiques. Et tout ce petit monde interagit un tant soit peu, causant, se vannant, et même se foutant sur la tronche. Les décors sont raccords, l'éclairage ne varie pas, il y a réellement de quoi se faire avoir. Et la suite s'annonce encore plus épatante : Harry se retrouve en train de casser des cailloux dans la même carrière que Mason et le reste des bagnards, sous l'œil vigilant de gardiens qui se promènent d'un métrage à l'autre. Mais emporté par son enthousiasme et handicapé par l'impossibilité fondamentale pour la nécromancie réalisatrice de réellement créer une vie cohérente, le chirurgien-charcutier d'IFD a alors commis quelques impairs que le spectateur vigilant remarquera avec un plaisir certain. Ainsi les tenues orange à manches courtes des criminels deviennent des polos XXL à manches longues, dont le logo de prisonnier subit d'amusantes variations. Je vous laisse juger sur les photos que j'ai prises de mon étal à corps.


En haut, mode été thaïlandais. En bas, mode hiver hongkongais.


Autre grand moment de l'histoire du 2 en 1 : un gunfight entre d'un côté le dynamique duo constitué de Harry et de Billy, son ancien sparring-partner, et de l'autre les méchants bagnards en fuite. Le fait d'appartenir à deux univers distincts n'empêchent pas ces gars-là de s'entretuer en un mortel ballet de cache-cache, d'esquives et de roulades dans un cimetière d'engins de chantier. L'art du champs/contre-champs est ici exceptionnel et seule une légère impression d'étrangeté témoigne de l'irréalité de la séquence. A ma connaissance d'universitaire, il n'existe dans la littérature qu'une seule description de pareille situation, détaillée par le très sérieux Dr B. Arakouda dans son étude du cas « Ninja Connection » (aussi parue sous le titre "Quand les encagoulés attaquent des tanks").


Pan !



Argh !



Raté !

« Fight the Kickboxer » est donc une splendide réussite du "2 en 1", dont l'étude est indispensable à tout spécialiste de nécromancie hongkongaise qui se respecte. Mais pas de crainte, les simples amateurs seront eux aussi comblés par cette nouvelle exploration des abysses de l'imbécillité nanarde dont le fond semble décidément inaccessible (ce n'est pourtant pas faute d'essayer). Le malfaisant Dr Lai et ses mignons auront décidément bien gagné le droit de ne pas sombrer dans l'oubli. Merci d'avoir prêté attention à ce compte-rendu.


C'est gagné pour le prix Nobel de Médecine !

Prologue
Un dialogue entre Harry et l'inspecteur de police :
- Tiens, bonjour inspecteur. Comme on se retrouve.
- Oui, mais cette fois-ci, tu ne m'échapperas pas, ça je te le garantis.
- Hé mec, pourquoi vous êtes toujours après mes fesses ?
- Parce que je déteste les minables comme toi. Vous vivez dans de belles maisons, vous avez de belles grosses voitures. Allez va te faire foutre !
- Hé, doucement. Les p'tits minables ont pas d'belles grosses voitures. Et tous ces minables n'avaient p'têt pas envie d'être des minables. Vous n'avez pas pensé à ça ? Hein ?

- Kobal -
Moyenne : 2.88 / 5
Kobal
NOTE
3.75/ 5
Rico
NOTE
2/ 5

Cote de rareté - 6/ Introuvable

Barème de notation


Il semble que vous ne puissiez invoquer cette horrible abomination méphitique qu'avec la relique VHS suivante. A noter qu'il y bénéficie d'un générique de fin, fait exceptionnel dans l'histoire de l'édition vidéo des œuvres IFD.

Toutefois, on soupçonne le DVD germanique « Year of the Kickboxer » de renfermer imprudemment la dite folie rampante.


Enfin, les nanarchéologues devront se méfier de l'obscénité suivante éditée chez BM Productions qui tente de jouer dans les cours des grands nécro-mages en parant de somptueux atours funéraires un simple zombie chinois anonyme adepte de kung-fu moisi.


De même, gare au film « Combat pour l'Honneur » (Kickboxing Kid) dont le visuel cutané a servi de revêtement à la Collection Arts Martiaux pré-citée.

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