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Fist Power

(1ère publication de cette chronique : 2004)
Fist Power

Titre original : Fist Power

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Aman Chang

Année : 2000

Nationalité : Hong Kong

Durée : 1h30

Genre : Hong Kong restera toujours Hong Kong

Acteurs principaux :Chiu Man-Cheuk, Anthony Wong, Gigi Lai, Judy Poyer

Minsk
NOTE
2.5/ 5


Comme me disait il y a pas si longtemps un nanardeur quelque peu attardé (pas de nom je vous en prie) : "Les films de Hong Kong c'est comme les boîtes de chocolat, on sait jamais ce qu'on va trouver à l'intérieur". « Fist Power » rentre dans cette catégorie d'objets filmiques qui surprennent, même si le nanardeur attentif aura repéré aux quelques photos présentes sur la jaquette qu'un potentiel ténu, mais réel, existait (on y aperçoit entre autres un magnifique gweilo dont je vous reparlerai plus tard).

Un jour où mon frère passait chez moi afin qu'on se mate un DVD tranquille ensemble, je lui dis : "Tiens j'ai récupéré ce film là qui a l'air d'être un film d'action HK sympa, on l'essaie ?". Hé oui, ma candeur coutumière, ainsi que la date assez récente du film, m'avaient empêché de détecter le nanar sous les habits chamarrés de la belle jaquette de TF1 Vidéo (du beau boulot, sans déc) et je croyais alors qu'on aurait un film correct. Après le générique et 8 minutes de métrage, mon frère, terrassé par la musique (insupportable, mais je reviendrai dessus), la caméra hystérique et un jeu d'acteur en plomb massif, réalisa soudain qu'il avait un important rendez-vous ailleurs :
- Mais où vas-tu mon frère ?
- (Enfilant sa veste fébrilement) Heu… Je dois envoyer un mandat-lettre urgent pour renouveler mon abonnement à Pèlerin Magazine !
- Mais il est 8 heures du soir !
- Justement ! Y'aura personne, j'aurai pas à faire la queue ! *Disparaissant dans le lointain…*
Loin de m'échauder, la fuite de mon brother ne fit que m'encourager à poursuivre le visionnage car, tel un Graal auparavant bien caché, la vérité s'était révélée à moi : je semblais tenir un nanar de la plus belle eau.

Au dos de la jaquette, le résumé ne laissait rien présager d’extraordinaire mais rien d’exécrable non plus : Chau (Anthony Wong), ancien militaire, se fait kidnapper son fils Tony par un puissant mafioso, père biologique de l'enfant. L'ex-femme de Chau s'est remariée avec cet odieux parrain qui les avait pourtant abandonnés, et veut l'enfant pour récupérer un héritage. Désespéré, Chau prend une école en otage et menace de tout faire sauter si on ne lui rend pas son enfant. Pour sauver les jeunes otages, Zhao, un agent de sécurité expert en arts martiaux, décide de libérer lui-même le fils de Chau…



Premier détail sympa : les prénoms. Chau est renommé Charles dans la VF, le maffieux s'appelle Georges et notre redresseur de tort Zhao devient Brian Chuck (on sent l'hommage…). C'est sûr, tout de suite, ça en jette plus !

Ensuite, dès la scène d'ouverture, un élément important dévoile sa présence, jusqu'à devenir un protagoniste à part entière du film : la musique. Composée (on dira plutôt bâclée) par un Samuel Leng que je ne connais pas et dont je ne veux d'ailleurs plus entendre parler, elle a été intégralement faite à partir d'un synthé Bontempi série "le moins cher possible" et abuse jusqu'à l'insupportable du saxophone de synthèse. Les plus courageux finiront par en rire et les autres se seront crevés les tympans avec un tournevis depuis longtemps. Si vous voyez le nom de Samuel Leng pour la musique d'un film, fuyez et ne vous retournez pas !

Mais d'autres choses se révèlent dès le début de film : les talents insoupçonnés du réalisateur pour en faire trop. Lorsque Charles est attaqué par un ballon de basket alors qu'il discutait peinard avec son fiston au jardin d'enfants, les méchants font leur apparition.




Pif paf boum !


S'en suit une discussion entre « Georges » et « Charles » et le réalisateur décide de changer de plan toutes les 2 secondes (contre-plongée, profil droit, face, profil gauche), de faire des gros plans décadrés, des zooms frénétiques. Bref, on sent qu'on a affaire à un nerveux de la caméra. La maman veut récupérer le gosse pour une histoire d'héritage, Charles ne veut pas le lâcher et Georges lance ses hommes de main qui se prennent une branlée le temps d’une séquence-baston toute molle. Mais un lâche l'attaque par derrière avec un shocker qui ressemble à un micro sans la mousse et on lui prend son petit Tony…




Et là on attaque le générique dans lequel on découvre notre héros qui roule sur les routes de Chenzen, à bord d'une voiture inqualifiable de mauvais goût. On notera sans doute une petite volonté patriotique dans ce générique qui montre largement, par un survol en hélico, l'expansion impressionnante de cette ville proche de Hong Kong et en pleine zone économique spéciale. Histoire de garder de bonnes relations avec le Parti, quoi.


Notre héros charismatique, beau comme un fer à repasser et sa beauf-mobile : on admire le choix des couleurs. Dites coucou à Deng Xiao-Ping au fond là-bas !


Brian Chuck, puisque c'est de lui qu'il s'agit, s'arrête n'importe comment devant un grand immeuble de bureau, y rentre, et se fait rembarrer par la sécurité après avoir demandé à voir le chef. Il se met alors à leur taper dessus lors d’un combat qui accumule les moments de grâce nanarde. Attention, Chiu Man-Cheuk est un très bon artiste martial, mais il est malheureusement bien le seul dans ce film, et ça se voit. On notera surtout la tendance de Brian à entraver ses adversaires et à faire des farandoles avec eux, ainsi qu’une scène surréaliste dans laquelle il fait léviter un briquet pour éclairer un sombre couloir où l'attendaient des vigiles. Cette scène, même plusieurs fois visionnée, demeure pour moi un mystère… Le briquet flotteur glisse par terre, avant de décoller, de traverser le couloir d'une traite pour finir rattrapé au vol par Chuck. A la fin de toutes ces bagarres miteuses, on découvre que Brian est venu tester l'équipe de sécurité de l'immeuble et qu'il est employé par leur boss pour les entraîner.


Les arts martiaux c'est aussi très festif : une petite farandole ou une rave dans un ascenseur, tout est bon pour s'amuser !


Vient ensuite un petit intermède où la famille de Brian lui fait une petite fête d'anniversaire surprise, occasion de placer cet humour navrant propre aux productions asiatiques à petit budget. Puis, en se rendant à Hong Kong, Brian est pris en auto-stop par Charles, devenu chauffeur routier. Celui-ci est considéré comme un paria et est furieux de l'apathie des flics à propos de l'enlèvement de son fils. Après un énième refus des flics de l'aider, il retrouve ses potes de l'armée britannique dans la dèche et décide de prendre une école en otage. Ecole que fréquente bien entendu le neveu de Brian : Johnny. Notons que l'école se trouve au sommet d'une colline déserte et ressemble à un camp retranché : il fait bon être écolier à Hong Kong.






Entre-temps d'ailleurs, notre Brian a fait la connaissance d'une reporter (Joan, élément comique n°1) que ses parents lui ont présenté pour un mariage arrangé, ce qui permet de continuer dans le registre de l'humour à 2 balles avec les quiproquos de rigueur.



Tous les éléments sont donc en place pour une débauche d'action digne des meilleurs actioners hongkongais ! Ah pardon on me dit dans mon oreillette que je me suis trompé de film. En fait on aura bien mieux avec un étalage de détails nanardisants :
- des policiers qui observent de jour avec des lunettes à infra rouges !
- des poursuites trépidantes où les voitures roulent à 30 à l'heure ! Ce qui permet d'ailleurs de placer de l'humour à la Taxi (Besson va attaquer, c'est sûr).


- Harry, le beauf de Charles (sidekick comique n°2, joué par un acteur prodigieux).


L'inénarrable Harry.


- des persos qui se téléphonent sur leurs portables sans avoir jamais échangé leurs numéros !


Et c'est alors qu'arrive LA scène nanarde du film. Le truc qui fait définitivement basculer cette petite prod’ d'action cheapos dans la dimension portnawesque. Joan et Brian sont assaillis par une patrouille de nervis de George… en VTT ! Oui, Georges doit avoir des séides qui patrouillent en permanence la ville en cycliste et maillot moulant, juchés sur leurs VTT ! Mais il en faut plus que ça pour désarçonner Chuck qui décide de se servir d'un VTT comme d'un nunchaku. Mais deux autres VTT-istes s'emparent de Tony et se le passent comme un ballon de rugby, ce qui permet d'admirer un très beau mannequin en mousse.








Mais « et les gweilos dans tout ça ? » me direz-vous l'œil brillant et la moue dubitative. Je me désespérais comme vous lorsque tout à coup apparut le fringant Jude Poyer, gweilo néophyte qui a débuté sa carrière en 1998 et compte pour l'instant des apparitions dans 18 films HK (dixit IMDB). Il est tout à fait dans la tradition des Pierre Tremblay, Stuart Smith et autre Bruce Baron, mais tout de même un ton en dessous de ses maîtres car il est trop bon en arts martiaux. Il essaie tant bien que mal d’exprimer des sentiments et n'est jamais aussi bon que lorsqu'il baffre consciencieusement ses nouilles chinoises en s'en mettant partout au passage. Notez qu'il tient bien une expression quand même : un joli rictus dents serrées qu'il ne lâche pas pendant tous les combats. Rome ne s'étant pas construite en un jour, laissons à l'ami Jude le temps de parfaire son talent, qui sait s'il n'est pas le prochain Stuart Smith...


Un gweilo qui fait honneur à la cuisine locale.

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C'est toi qui dis partout que je joue comme un pied ?


J'ai les nouilles qui me montent au nez (humour lourd inside)


Pas conteeeeeeent !


Pas conteeeeeeent (bis) !


Bon, le cahier des charges a été plutôt bien rempli pour l'instant, mais il manque la scène improbable, le truc tellement gros que seul un scénariste de Hong Kong acculé par sa propre créativité peut sortir. Qu'à cela ne tienne, le dieu du nanar veille sur nous et inspire les scénaristes en droite ligne. A un moment, notre quatuor de gentils doit s'enfuir de la terrasse d'un immeuble et prend, pour redescendre, l'ascenseur destiné aux laveurs de carreaux. Seulement Chuck a dû rester derrière pour retenir quelques hommes de main.
- Comment va-t-il faire pour s'enfuir, se demande le scénariste n°1 ? On a déjà utilisé la feinte de l'ascenseur des laveurs de carreaux, la sortie normale est bouchée… Attends, j'ai une super idée ! Et s’il se laissait glisser le long du câble de l'ascenseur sus-cité en évitant de se cramer les mains grâce à sa veste ?
- Mais il est au 30ème étage, répond le scénariste n°2 ! (mais étaient-ils vraiment deux pour pondre ce truc…)
- Boaf, plus c'est gros plus ça passe…


Les sbires dépités admirent la technique vestimentaire de notre héros.


C'est pas le tout mais l'heure tourne et il y a des enfants à sauver. Brian atomisera donc notre aimable gweilo avec l'aide d'une bouche d'égout mobile (un plan le gweilo tombe dessus sur le vent, le plan suivant ce vil mobilier urbain lui a écrasé le larynx), disputera son 728ème combat dans le gymnase de l'école, aidé par sa famille au complet qui débarque de nulle part (on est plus à ça près), et libérera les enfants sans tuer Charles. Quel talent !


La classe incarnée je vous dis !


Voilà un bon p'tit nanar récent qui rassurera tout Nanarland : les Hongkongais sont encore capables de pondre d'honnêtes nanars même en n’utilisant pas la technique du 2-en-1. On ne s'ennuie pas trop devant le film qui a assez d'action et de moments d'humour lourdissimes typiques de nos amis chinois pour tenir en haleine entre deux pics de nanardise. Il y a même un début de message politique sur la situation difficile des anciens de l'armée anglaise dans le Hong Kong chinois. La nanardise est quant à elle assurée par la grande scène à VTT et un gweilo qui n'en veut. N'oublions pas non plus les combats pesants et improbables, les nombreuses incohérences du scénar, le jeu peu inspiré des acteurs, la musique insoutenable et le montage à la serpette. Tout cela contribue à faire monter la note à un honnête 2,5/5.

- Minsk -

Cote de rareté - 1/ Courant

Barème de notation
Edité en DVD par "TF1 Vidéo" (jaquette en en-tête de la chronique), le film est assez facilement trouvable en France. A noter qu'Amazon France attribue la mise en scène du film à Tsui Hark. Mouahahaha !