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Les Rongeurs de l'Apocalypse


Les Rongeurs de l'Apocalypse

Titre original :Night of the Lepus

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :William F. Claxton

Année : 1972

Nationalité : Etats-Unis

Durée : 1h28

Genre : Ce matin un lapin a tué un chasseur

Acteurs principaux :Stuart Whitman, Janet Leigh, Rory Calhoun, Deforest Kelley

Dryke
NOTE
3/ 5


AVIS : Cette chronique est une fiction. Elle ne cherche pas à relater des faits réels ni à rétablir une quelconque vérité historique quand à la genèse de « Night of the Lepus ». Elle est juste le fruit d'une imagination débordante, titillée par un nanar de bien belle volée.


Imaginez : nous sommes au début des seventies, la mode des monstres géants et autres menaces d'une autre planète (rouge de préférence) s'est déjà achevée et pourtant, quelque part Outre-Atlantique, une petite société résiste (enfin, petite, tout est relatif). Dans les bureaux de la MGM (RATP Goldwyn Mayer) les têtes pensantes sont réunies à la recherche DU sujet de monstres géants, ultime épopée filmique qui ferait venir en masse les spectateurs friands d'effroi face à ces animaux ou insectes du quotidien, modifiés monstrueusement sous le rayon nucléaire et autres saloperies chimiques.


Extrait de la réunion :

- Messieurs, l'heure est grave : nos concurrents se sont enrichis grâce aux monster movies, la menace nucléaire a fait muter le chiffre d'affaires des studios adverses de façon disproportionnée. Nous devons en faire autant !

- Ben, on a qu'à placer notre argent dans des centrales ! s'écrie l'un des pontes assis à la table.

- Bon... toi tu sors, vu ton niveau tu reviendras quand George Walker Bush sera Président. (…) Maintenant que ce trouble-fête est parti, revenons à nos moutons. Nos super créatifs ont fait le tour du bestiaire : il s’avère qu’Hollywood a déjà tout fait muter ou presque. Nous restent les animaux suivants :

les paresseux…

…les pigeons...

…et les lapins.


Et il y a Bob qui a proposé les girafes ce matin, mais comme c'est déjà super grand on a préféré écarter l’idée. Alors que choisir ?

- C'est marrant, ça ferait un super titre de magazine, « Que choisir ? ».

- Bon, toi, tu rejoins l'autre dehors et ce n'est pas la peine de revenir, c'est une maison sérieuse ici. (...) Reprenons : d'emblée écartons les paresseux : ça dort tout le temps, c'est lent, j'aimerais produire un film de monstres et non un film de morts-vivants. Pour les pigeons c'est sensible comme sujet car avec « Les Oiseaux » d'Hitchcock, j'ai peur que le public fasse le rapprochement. Donc, il nous reste… les lapins.



Silence de mort autour de la table.

- Mais si, voyons ! Le lapin peut être dangereux, voire menaçant : regardez les ravages qu'ils ont causé aux kangourous en Australie. Oui, le filon est bon à creuser : le temps des lapins tueurs est venu ! Mais attention, nous allons quitter l'ornière du nucléaire pour explorer une voie encore inconnue : faisons de ces animaux des créatures modifiées génétiquement, comme ça le public sera étonné. Donnons-leur la taille du cheval ! Donnons-leur la force de l'ours ! Faisons du lapin l'ultime prédateur de l'espèce humaine !

- Chef, chef, j'ai la nouvelle qu'il vous faut ; ça s'appelle "Year of the Angry Rabbit" de Russell Braddon. Il nous suffit de racheter les droits puis on attelle 2-3 scénaristes malins (Don Holliday & Gene R. Kearney) pour nous rendre ça crédible, le temps qu'ils écrivent nous on caste !

Et c'est sur cette phrase décisive que tout ce charmant petit monde quitta la salle de réunion, convaincu d'avoir, à défaut d'un sujet en or, au moins un sujet poilu.


Quelques mois plus tard, sortait sur de nombreux écrans « Night of The Lepus ». Les gars du marketing ayant compris que le lapin, ben... ça craint, ont vivement préféré ne pas montrer sur l’affiche les rongeurs mais plutôt de multiples paires d'yeux : à défaut de distiller la peur, ça colle la parano.


Affiche de « Night Of the Lepus » modèle oculaire.


Le film comprend quelques têtes connues, telle celle de Janet Leigh. Oui, vous avez bien lu, il s'agit ni plus ni moins de la mère de Jamie Lee Curtis, qui accessoirement est devenue célèbre en criant sous la douche dans « Psychose » (à noter qu’aujourd’hui, quand on crie sous sa douche, on finit à la Star Academy). Une présentation très académique des principaux protagonistes nous introduit auprès du héros, sa femme qui est aussi sa secrétaire, leur fille et le Dr Mc Coy (DeForest Kelley) de « Star Trek ». Paf, après Janet Leigh, voilà un autre nom connu : c'est la fête ! T'as raison, Mc Coy, quitte à flinguer ta carrière mieux vaut le faire bien accompagné !

 




S’ensuit le traditionnel présentateur télé censé nous résumer la situation : on nous apprend qu'après l'Australie ce serait au tour des USA de connaître des soucis à cause de quelques rongeurs surdimensionnés. Après le péril rouge voici venu le péril Lapinou ! Donc les lapins sont partout : Stuart Whitman, chargé de les étudier, effectue quelques malheureuses manipulations sur eux ; entre-temps sa fille s'empare d'un lapin-cobaye : ce dernier se carapate et va semer ses gênes modifiés au gré des lapines qu'il croisera.


Après une demi-heure un peu laborieuse – comprenez par là que la présentation des différents protagonistes est d’une banalité sans nom – le "massacre" commence : une, puis deux puis trois victimes tombent sous les assauts des lapins géants.








Attack of the killer rabbits!


Pour illustrer ces séquences, pas de plans gore, juste quelques acteurs et actrices peinturlurés en rouge. Pour les lapins on a juste droit à d'extrême gros plan de lapins, ou des lapins dans des décors réduits voire, pour les séquences intenses, des peluches enflammées. A mon avis Cüneyt Arkin a voulu faire référence à « Night of the Lepus » lors du final de « Death Warrior » (ceux qui l'ont vu comprendront !).




Stuart Whitman, le héros du film, tente de convaincre les autorités de l'imminence d'une invasion de lapins géants.


Pourtant, avec le docteur McCoy à ses côtés, c'est une garantie de sérieux !


Dès lors, rien ne semble pouvoir arrêter le réalisateur qui, comme pris d’une frénésie destructrice passé la seconde moitié du métrage, enchaîne les scènes hallucinantes par leur manque total de crédibilité à un rythme insane. Le constat est comique : filmer les lapins en gros plan à grands renforts de bruitages glougloutesques ne fait pas forcément peur, mais jusqu'à présent le lapin géant et l'humain n'avaient pas encore été filmés ensemble au cours d’une scène. Quand ça arrive, ça donne ça :


Oui, oui, vous avez bien vu, le ciel n'a pas la même couleur des deux côtés de l'écran.

Mesdames et messieurs, ceci est :

LE PIRE FAUX RACCORD DE TOUTE L'HISTOIRE DU CINEMA !!!!!


C'est désastreux au point que ce genre de séquence jouissive n'est malheureusement pas réitérée : pour rire autant, il faudra patienter jusqu’à l’incroyable attaque d'un troupeau de chevaux par des acteurs honteusement engoncés dans des costumes de lapins pelucheux. Entre-temps, ce sont des plans larges de lapins couplés avec des plans rapprochés sur les acteurs feignant d'être cernés par la meute aux grandes oreilles, ainsi qu’une foultitude de scènes champêtres où l'on voit avec bonheur nos bunnies courir à travers champs, effrayant au passage un stock-shot de vaches apeurées, puis s'attaquant à un drive-in (enfin, restons relatifs : on voit un lapin traverser un grand papier blanc figurant l'écran). Bref, même si le rythme est assez lent, les lapins reviennent assez souvent à l'écran pour réveiller le nanardeur qui sommeille devant son écran.




Contre la racaille lapinesque, autant employer les grands moyens.


Les scientifiques font appel à la garde républicaine, qui ne peut pas intervenir. Mais comme d’hab’ le héros a un plan ô combien astucieux qui a cette simplicité propre aux authentiques traits de génie : il suffit de guider les lapins vers un champ et là on les aura sous la main pour les éliminer tous d’un coup, paf ! Janet Leigh, elle-même menacée par les lapins, ne va pas se laisser faire : dans la famille Leigh-Curtis, on est habitués aux tueurs fous : quand ce n’est pas Norman Bates, c’est Michael Myers, alors des lapins…








Janet combat par le feu les ignobles lapinous.


Stuart Whitman, agressé par un intermittent du spectacle en habit de peluche.


Bref, la population s'arme, retrouve les lapins plus bugs que bunny et fait un joli carton typiquement dans l'esprit américain. A savoir à coups de Colt, de Winchester, de fusil à pompe, de machine-gun et de lance-flammes : face à tant de choix on ne peut que saluer la démocratie triomphante ! S'ensuit un carnage lapinesque à faire dérailler Brigitte Bardot.


Après un tel forfait cinématographique lapinocide, le réalisateur a passé de nombreuses années dans les affres de la télé en se coltinant l'intégralité de la série « La Petite Maison dans la Prairie ».


Des affiches parodiques annonçant un remake fictif du film.


Quand au reste du casting, allez savoir : après ça on peut tout faire, jouer dans des Godard, donner la réplique à Catherine Deneuve, tenir la dragée haute à Matt Damon, chausser le costume de Daredevil où tout connement se faire moine pour oublier cette douloureuse expérience.

Je terminerai par ce dialogue entre Janet Leigh et sa fille :

"I love bunnies, mom !"

"Yes, and the bunnies love you too."

- Dryke -
Moyenne : 3.20 / 5
Dryke
NOTE
3/ 5
John Nada
NOTE
2.5/ 5
Rico
NOTE
4/ 5
Labroche
NOTE
3.5/ 5
Jack Tillman
NOTE
3/ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation


Deux antiques éditions VHS existent en France (toutes deux chez "MGM Home Vidéo"), mais pas de DVD ou BR avec VF en vue.


Aux Etats-Unis, après une longue période de purgatoire (il n'était jamais sorti en VHS là-bas, malgré de fréquents passages sur les chaînes câblées !), « Night of the lepus » a été réédité en DVD (un zone 1 facilement achetable en ligne chez "Warner Bros" avec une V.F. et des sous-titres français et plein de suppléments !), puis en 2018 l'éditeur Shout Factory a sorti le film en Blu-ray. Ces éditions remplacent l'ancien DVD-R artisanal de chez "Five Minutes To Live".

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