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Badmash Te Qanoon
Titre original : Badmash Te Qanoon
Titre(s) alternatif(s) :Aucun
Réalisateur(s) :Agha Imtiaz Quresh
Année : 2002
Nationalité : Pakistan
Durée : 2h30
Genre : Djihad contre le bon goût
Acteurs principaux :Shaan, Sana, Babar Ali, Sardar Kamal
Une jaquette qui annonce la couleur : y’a du sang et de la meuf !
Déjà alléché par la chronique de « Janbaaz », c’est avec un vif enthousiasme que j’ai découvert ces merveilleux produits exotiques dont certains, ô bonheur, s’avéraient fort récents. « Badmash Te Qanoon », daté de 2002, est la première œuvre à laquelle je me sois risquée et le résultat est à la hauteur de mes attentes. Fier représentant du cinéma penjâbi, le film met en vedette Shaan, mégastar locale, dans un rôle de justicier dans la ville qu’il endossa à de multiples reprises : mélange détonant de mélodrame familial, d’action barrée à la limite du gore et de comédie musicale, le film se distingue également par une esthétique digne des productions les plus extrémistes du cinéma turc des années 1970-80.
Shaan.
Proposé au public occidental sans la moindre espèce de sous-titres, « Badmash Te Qanoon » m’a imposé quelque approximation quand il s’est agi de comprendre tous les ressorts de l’action. Fort heureusement, ce n’est pas du Rohmer…
Shérif senior et Shérif junior.
Le Parrain.
Le récit a pour cadre une zone tribale de la campagne pakistanaise : un village de braves paysans est racketté par d’infâmes gangsters qui leur imposent de lourds tributs. Le chef du village (appelons-le « le Shérif ») s’y oppose, mais le Parrain va lui tendre un infâme piège en lui faisant croire à une réconciliation et le poignarde en traître. Le jeune fils du Shérif, se saisissant de l’arme de son père, fait un massacre parmi les sbires du Parrain et va, du coup, se faire arrêter par les flics, évidemment corrompus.
Gasp, poignardé en traître !
Notons que le gamin agite son flingue sans même viser.
Regardez, commissaire, il a tué mes sbires !
Détenu dans une prison où les enfants côtoient les adultes, le fils du Shérif ne perd pas pour autant la foi et donne aux autres enfants détenus des cours de Coran. Maltraité par des détenus adultes, il est heureusement pris sous son aile par un autre adulte, qui va lui servir de père adoptif.
Et, bien évidemment, il jure vengeance.
Quelques années passent : le jeune et rondouillard enfant est devenu le grand et émacié Shaan, dont la fière moustache dissimule une âme de justicier. Notre héros va désormais parcourir les campagnes à bord de sa carriole et mettre des roustes pas possible aux malfaisants qui ont tué son père et continuent de terroriser les braves gens.
D’autres sbires du Parrain.
Notre héros arrive à la rescousse sur sa carriole de la mort (non, sans rire, il arrive vraiment en carriole).
Cependant, le frère du héros est, de son côté, devenu policier. Attaché au respect de l’ordre, il va tenter de mettre fin aux actions de son frère, qui agit en dehors de toute légalité. Les deux frangins séparés par la vie se réconcilieront-ils pour vaincre ensemble les méchants et, accessoirement, emballeront-ils leurs dulcinées respectives ?
C’est ce que vous saurez si votre cerveau résiste à 2h30 de folie furieuse en penjâbi non sous-titré : scènes mélodramatiques dérangées du cerveau, séquences d’action sous cocaïne, réalisation hystérique, comédiens au-delà de toutes les limites de l’outrance, « Badmash Te Qanoon » laisse pantelant le nanardeur le plus endurci.
Enfer ! Impossible de faire des images correctes des bagarres, ils bougent trop vite !
Si Shaan a de la prestance, sa tendance à prendre la pose en permanence, et surtout au milieu de scènes d’action où il aurait normalement mieux à faire que de frimer, n’aide pas à le prendre au sérieux. Mais cela n’est encore rien à côté de la chorégraphie totalement ahurissante de scènes d’action pouvant faire passer celles de « Death Warrior » pour des modèles de crédibilité. Sauts en trampoline, bruitages de dessin animé, mouvements de caméra psychédéliques, montage en pleine frénésie, les nombreuses bastons du film laissent le cinéma de Hong Kong loin à la traîne sur le terrain du n’importe quoi.
Notre héros se prépare à tataner les méchants à grands coups de crachoir en métal.
Un festival de tronches.
Héros qui accourt à la rescousse sur une charrette d’agriculteur et assomme ses adversaires avec un crachoir en métal, avant d’encaisser vingt rafales de mitraillette à bout portant et de se relever quand sa mère l’encourage ; méchants agitant leurs flingues n’importe comment et arborant la plus belle collection de looks ringards jamais vue ; comédiens prenant la pose pour déclamer des dialogues face caméra, en pleine scène de bagarre, sans oublier de tourner le dos à leurs adversaires qui attendent bien sagement : on est en pleine quatrième dimension. Les acteurs semblent parfois se croire sur la scène d’un mauvais théâtre, tant leurs tirades sont déclamées et mises en scène de manière peu « cinématographique ». La baston se montre de surcroît excessivement sanglante – une constante dans ce genre de films d’action pakistanais : le ketchup coule à flots, le héros perdant des hectolitres de sang avant de se relever sans une égratignure. C’est un cinéma du bout du monde, arrivé au bout de la raison et de la logique. A mourir d’épouvante ou de plaisir.
A nous deux, gredin !
L’action résolument furieuse du film est de surcroît entrecoupée de séquences chantées et dansées, nettement moins délirantes que celles des films indiens – le manque de budget se fait sentir sur ce point – mais amusantes dans leur constance : c’est l’héroïne qui chante et danse en prenant des poses plus ou moins lascives, tandis que le héros la regarde en prenant des poses avec son gros flingue.
Le summum du délire est atteint quand action et musique sont mêlées en une scène audacieuse où l’héroïne, gravement blessée par les méchants, se lance dans une danse de mort en battant des mains tandis que son sang dégouline sur elle. Ici, le nanar exotique rejoint presque l’œuvre d’art, la folie intrinsèque du métrage semblant se cristalliser en une chorégraphie gore et mortifère. De quoi faire vaciller toutes vos certitudes artistiques.
Vingt balles dans le corps, et elle danse encore : c’est carrément « Die Hard » !
L’outrance totale et hystérique qui empreint chaque milliseconde du film fait de celui-ci une œuvre brute de décoffrage, l’absence de sous-titres contribuant encore davantage à la violence du choc artistique : nous sommes face à un « cinéma total » qu’Abel Gance n’aurait osé imaginer dans ses pires cauchemar. Allah est grand et le nanar pakistanais est son prophète. Si un penjabophone nous lit, qu’il sache que son aide sera grandement appréciée pour décoder les scénarii de ces films car nous ne comptons pas nous arrêter en si bon chemin !
Ceci dit, le héros aussi survit à une vingtaine de balles dans le corps, mais lui c’est normal, c’est le héros.
Malandrin, tu vas faire connaissance avec le pieu de la justice !