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Feeders
Titre original : Feeders
Titre(s) alternatif(s) :Aucun
Réalisateur(s) :Mark & John Polonia, Jon McBride
Année : 1996
Nationalité : Etats-Unis
Durée : 1h08
Genre : Aliens anthropophages en papier mâché
Acteurs principaux :Jon McBride, John Polonia, Mark Polonia, Todd Carpenter, Sebastian Barran, Melissa Torpy, Gary LeBlanc
Mark Polonia. Une vraie tête de vainqueur !
En duo ou en trio, "Polonia Brothers Entertainment" accouche au fil des ans de titres excessivement bis, tels que "Saurians", "Blood Red Planet", "Razorteeth", "Dinosaur Chronicles" ou "Splatter Beach". A partir des années 2000, ils s'essaient aussi au mockbuster. Ainsi, quand Tim Burton sort "Planet of the Apes" en 2001, le trio Polonia-McBride-Polonia signe dans la foulée "Gorilla Warfare: Battle of the Apes". Et quand sort "Alien vs. Predator" en 2004, les jumeaux pondent la même année un opportuniste "Preylien: Alien Predators". Volontaires mais fauchés, passionnés mais pas franchement talentueux, le profil des frères Polonia rappelle celui de leur compatriote Jeff Leroy, ou de Norbert Moutier. Ils peuvent d'ailleurs être considérés comme l'équivalent américain de ce dernier, tant leurs productions n'ont rien à envier à un "Ogroff, the Mad Mutilator" ou un "Dinosaur from the deep" : ça a beau avoir été réalisé dans les années 90 ou même les années 2000, la qualité d'image est toujours aussi dégueulasse et les effets spéciaux faits maison tout aussi stupéfiants.
Tourné dans leur Pennsylvanie natale - comme quasiment toutes leurs productions - le film qui nous intéresse ici figure sans doute parmi les plus étranges spécimens pondus par les frangins Polonia. Car si le cinéma regorge d'extraterrestres ringards, rares sont ceux qui se montrent aussi fauchés que les spécimens de "Feeders"… Après une introduction réalisée par le neveu de Jamy Gourmaud venant d'apprendre à utiliser Movie Maker, et une voix off qui nous explique vaguement qu'il y aurait de la vie ailleurs, un logo et une soucoupe volante probablement rippée d'un jeu PS1 nous annoncent le topo : la menace vient de l'espace. Cette même soucoupe se dirige alors vers la Terre, plus précisément en Amérique. On la voit se déplacer au-dessus d'une petite forêt pendant un bon bout de temps. Puis elle s'arrête quelques instants, et profite de l'occasion pour relâcher un petit régiment d'aliens dans un effet spécial foncièrement émouvant.
La vache, même le paysage a l'air faux...
Prenons le temps d'évoquer un peu ces extra-terrestres, puisqu'après tout ce sont eux les vedettes du film. Les aliens de "Feeders", ce sont des marionnettes en papier mâché dont on ne verra jamais le bas (pour ne pas voir le bras du technicien qui les anime). On ne verra pas non plus leur tête s'animer : ils semblent effectivement venus d'un monde lointain dans lequel personne n'ouvre la bouche, bien qu'ils parviennent tout de même à cracher une sorte de venin acide quand ça les arrange.
Nos aliens, tout aussi gâtés que leur créateur.
Ne riez pas, ces extra-terrestres venus sur Terre pour nous dévorer s'avèrent être de fins stratèges : pour commencer leur invasion à but alimentaire, ils ont choisi d'investir un petit bled perdu dans lequel tout le monde est tellement stupide qu'ils n'arrivent jamais à échapper aux monstres, bien que ceux-ci ne fassent qu'une petite quarantaine de centimètres de haut et passent leur temps à courir dans la nature en beuglant comme des dératés...
Un plan en vue subjective d'alien.
Telle la mère d'un enfant hideux, pour qui son fils sera toujours le plus beau des garçons, Mark Polonia semble très fier de ses créatures, et n'hésite pas à les faire passer à l'action dans des scènes gores qui n'ont d'extrême que leur indigence. Le réalisateur utilise tout ce qu'il a pu trouver dans son grenier pour nous concocter ces scènes horrifiques : un morceau de frigolite, un peu de sirop de grenadine et le tour est joué ! D'autres séquences ont recours à la technologie numérique, notamment une scène abominable où l'on constate que la tête d'un docteur est toujours capable de gigoter et d'émettre des signes de douleur même après décapitation. Ailleurs encore, on note l'emploi de ce qui semble être un squelette probablement emprunté à un prof de Sciences Naturelles. Tout ça combiné à un savoir-faire unique donne évidemment un résultat… inoubliable : entre les maquillages artisanaux et les effets spéciaux numériques, difficile de dire lesquels sont les plus ringards.
Tiens, v'là Oscar, le squelette du cours d'anatomie !
Un meurtre version maquillage artisanal (avec de la vraie gouache magenta et de vrais câbles qui dépassent).
Un meurtre version effets spéciaux numériques (réalisé avec un vrai logiciel pour les grands sur un vrai ordinateur).
Si les extra-terrestres de "Feeders" valent le détour, les humains ne sont pas mal non plus, entre les acteurs principaux qui jouent comme des patates avariées et des figurants qui, pour la plupart, ne décrochent pas plus de trois mots avant de se faire bouffer. Les héros de "Feeders", Derek et Bennet, sont respectivement incarnés par Jon McBride et John Polonia. Il s'agit de deux copains qui adorent se promener en voiture dans les bois pour satisfaire leurs passions respectives : celle de Derek consiste à photographier des monuments abandonnés (on appréciera au passage l'effet très "gif animé" appliqué à des photos déjà fixes et en sépia), tandis que Bennet drague des femmes hideuses. Interprétés sans talent ni originalité, le duo excite ponctuellement l'aiguille du nanaromètre, notamment quand il s'agit de jouer la terreur.
Derek (Jon McBride) et Bennet (John Polonia et sa très discrète paire de chaussettes).
Quand l'un des héros prend des photos, on a droit à un effet spécial tellement pas crédible que c'en est presque magique.
Une des créatures débordant de sensualité que drague Bennet.
Vous l'aurez compris, le scénario de "Feeders" se limite le plus souvent à une succession de scènes d'attaques plus affligeantes les unes que les autres, dont le simplisme répétitif ménage les neurones du spectateur et aussi ceux des scénaristes, puisqu'ainsi ils s'évitent la peine de développer leurs personnages ou de s'encombrer d'une quelconque construction narrative. Pour autant, la simplicité du script n'empêche pas les incohérences. Ainsi, la première partie du film voient nos héros se balader dans les bois en prenant des photos jusqu'à l'instant où leur voiture heurte une des victimes des monstres (laquelle n'aura pour seule réplique que "LITTLE MEN !!! LITTLE MEN !!!"). Certains qu'ils ont eux-mêmes blessé cet homme, ils l'emmènent chez un médecin mais l'infortuné décédera à leur arrivée. Bien qu'ils aient désormais une mort sur la conscience, cela ne les empêchera pas pour autant de retourner illico dans la forêt y rejoindre leur copines, sans jamais mentionner cet incident à nouveau...
Un casting débordant de charisme…
L'ombre d'un micro-scrupule a quand même dû traverser l'esprit d'un des auteurs, et leur faire réaliser qu'un film, même mauvais, ne pouvait pas se résumer à une succession de meurtres ridicules du début à la fin. Du coup, vers la moitié de "Feeders", nos héros aperçoivent finalement l'OVNI apparu un peu plus tôt dans l'introduction, planant inlassablement dans ce fameux ciel bleu fluo made in Paint. Le duo comprend alors que leur village est sous le coup d'une invasion extraterrestre. Derek et Bennet rentrent aussitôt à la maison et inspectent les lieux dans une scène à suspense où, pour créer une ambiance oppressante, on a juste ajouté une étrange musique faite au synthétiseur.
On dirait pas mais la fille à droite vient de découvrir le corps à demi-dévoré de sa meilleure amie, tandis qu'à gauche Bennet regarde si des aliens sont cachés dans la maison (en inspectant en permanence le plafond, oui).
Quand la soucoupe arrive finalement devant la maison, Bennet se fait kidnapper et séquestrer par les extra-terrestres qui, pour une raison un peu floue, le relâchent peu de temps après au lieu de le bouloter. Les aliens ont en fait créé un double maléfique de Bennet, qui est tout naturellement interprété par Mark Polonia (on le rappelle, John & Mark sont frères jumeaux). Un effet spécial gratuit, ça ne se refuse pas ! On se prend à imaginer que le combat dantesque entre les deux Bennet puisse en fait être une dispute déguisée entre les frères Polonia (Mark devait commencer en avoir marre du jeu de John), ou même une dispute pas déguisée du tout qu'ils auraient par la suite décidé de garder au montage.
"SALAUD ! Tu m'avais promis que je finirai à Hollywood !"
Dans ce final d'une absurdité rarement égalée, Derek s'empare alors d'une faucille et de son jeu d'acteur dévastateur, et s'interpose en tuant un des deux lutteurs au hasard. Malheureusement pour lui, Derek fait le mauvais choix et assassine son meilleur ami, du moins le devine t-on quand le Bennet survivant se met à lui causer de nourriture et de la fin du monde avec une voix bidouillée en post-prod, avant de secouer la tête les yeux fermés et disparaître dans une vilaine pluie de pixels. Terrifié, notre héros se met à courir aussi vite qu'il le peut, en tenant étrangement son genou alors que c'est sa main qui est en train de brûler, jusqu'à ce qu'il apprenne que Mark Polonia a prévu de tourner un deuxième opus... Il s'effondre alors et se met à hurler "NOOOOO" !
Filmé avec les pieds et les moyens du bord, "Feeders" se révèle au final une des pires productions des frères Polonia (donc aucune n'est bien fameuse il faut dire) mais également une des plus drôles, qui n'a pas grand-chose à envier aux nanars de Norbert Moutier. Si vous êtes déjà initiés au meilleur du pire, vous pouvez tenter l'expérience : que vous aimiez ou pas, vous ne ressortirez pas indemne d'un voyage dans le 7ème art polonien…
Icono : Obscurity & Beyond