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Le Singe du diable
(1ère publication de cette chronique : 2009)Titre original :The Devil's Gift
Titre(s) alternatif(s) :El Diablo
Réalisateur(s) :Kenneth J. Berton
Année : 1984
Nationalité : Etats-Unis
Durée : 1H25
Genre : Démon de Prisunic
Acteurs principaux :Bob Mendelsohn, Vicki Saputo, Struan Robertson, Bruce Parry
« Après L'Exorciste, "il" revient dans : Le singe du diable ». Traduction : dans notre film qu'est fauché, on n'a p'têt' pas d'grosse vedette hollywoodienne mais on a Satan !
Il existe des films qu'il faut vraiment aller chercher au fond du fond de la vaste poubelle du cinéma mondial. Leur état de décomposition avancée a de quoi rebuter le spectateur de passage, dont le nez sensible se rebique devant les fragrances de navet faisandé. Malgré tout, certains pervers jusqu'au-boutistes assument leur déviance et se sacrifient au nom d'une mission sacrée qu'ils se sont confiés à eux-mêmes, dans une sorte d'attrait masochiste pour le sordide de l'édition vidéo. Et c'est grâce à ces gens-là que des métrages comme "Le Singe du diable" alias "El Diablo" ne sombrent pas dans l'oubli, et conservent même un semblant de vie culturelle à laquelle rien ne semblait les prédestiner.
« Encore plus terrifiant que L'Exorciste ». Ben voyons...
Premier et dernier vrai film de Kenneth J. Berton, un papa qui assume de nombreuses fonctions auprès de son rejeton malformé (scénario, réalisation, montage...), "Le Singe du diable" n'est vraiment pas à mettre devant tous les yeux. Pur produit dégénéré du bis américain en grande souffrance financière, l'œuvre peut sans problème rejoindre la décharge de ce sous-genre que j'apprécie beaucoup personnellement, à savoir l'Amateur Mou Hypnotique. Comprenant l'unanimement reconnu ("Eaux sauvages") comme le plus méprisé ("Wendigo") voire l'indicible expérience ("Telephone Killer", "La Nuit des mille chats", "Manos, the Hands of Fate"), cette branche égarée de la phylogenèse cinématographique partage nettement son public et réclame une résistance à toute épreuve.
Un manoir digne du "Retour des tomates tueuses".
D'autant plus que dans le cas présent, mieux vaut ne pas se mentir et reconnaître que l'on n'a pas affaire au meilleur de la famille.
Une vieille bonne femme invoque involontairement avec sa planche ouija un démon qui s'incarne dans une peluche de singe à cymbales. La séance de spiritisme tourne court et, alors que le fameux singe frappe de ses cuivres, un éclair tombe sur la bicoque qui prend feu. Le jouet finit en cadeau pour Michael Andrews, un jeune garçon de banlieue américaine typique. Mais le sinistre singe accomplit son œuvre maléfique, jugez plutôt : les plantes se mettent à crever, les mouches tombent raides mortes, le poisson rouge se noie (!) et David, le paternel de Michael, fait des cauchemars. A croire que la maison a été construite sur un vieux cimetière indien.
Joyeux anniversaire, Michael...
...tu es content de ton cadeau, j'espère ! (Comment ? C'est une Game boy que tu voulais ?)
J'ai prévenu que ça allait être rude, et contrairement à John Matrix, je n'ai pas menti ; pendant 45 minutes, attendez-vous à ce qu'il ne se passe rien. Mais vraiment rien. C'est du vide avec un souffle audio de silence vertigineux, du qui ronge la tête. On voit David qui lit son journal, sa copine Susan qui passe dans le coin, Michael qui joue avec ses maquettes Star Wars et le singe posé immobile sur la télé et dont les yeux souffrent d'accès myxomateux. On ne comprend que difficilement la situation familiale (ce qui est très fort avec aussi peu de personnages), à part que le voisin ne ressemble à rien. Ne sauvent les meubles que l'étrange doublage atone (a priori québécois au vu de la prononciation anglo-saxonne des prénoms), et le curieux montage audio avec une musique de cartoon, des bruitages inexistants et des sources de bruits très étouffés. Mixé avec le souffle du silence sur la bande de votre antique VHS, c'est la transe assurée, version descente aux enfers.
Ce film est tellement horrible que même David en fait des cauchemars...
...et que les plantes en pot crèvent dans un drame botanique silencieux.
Plus pragmatique, Pete, le voisin qui s'arrose les pieds.
Mais quand, soudain, notre petit singe à timbales commence à hypnotiser de ses loupiotes oculaires vermillons l'énigmatique Susan pour la pousser à tuer Michael, la graine desséchée de la curiosité se met doucement à germer et une paupière abrutie de néant trouve finalement la force de se relever dans une expression d'intérêt. Faut dire que madame tente avec subtilité d'étouffer le jeunot avec son oreiller ("allez, viens gamin"), avant de se raviser et de le prendre dans ses bras en le rassurant : "ce n'est rien, tu as fait un cauchemar". Mais bien sûr...
Un démon poilu qui passe dire bonjour le temps d'un unique plan (à se demander s'il ne s'agit pas d'un stock-shot).
Heureusement, lui, on nous le montre sous tous les plans.
Depuis les "Poltergeist" et autres "Amytiville", il est devenu systématique de faire appel à un médium à la moindre entourloupe satanique. Les gens ne savent donc plus régler leurs problèmes de possession domestique tout seuls, c'est dingue, ça ! En tout cas, la spécialiste ici consultée est formelle : il ne faut surtout rien faire pour ne pas que le démon se doute de quelque chose. Logique. [NdlR : et sinon, enlever les piles peut-être ?]
Cette médium ne peut rien faire, car "parfois les démons arrivent contre leur gré, ce qui les rend inconstants et hostiles". Merci madame, combien vous dois-je ?
A partir de cet instant, "Le Singe du diable" prend enfin son envol nanar, dans une logique débile et surréaliste où David a bien compris que le singe devait être à l'origine de ses malheurs, mais fait comme si de rien n'était, alors que tout indique que la prochaine cible de la peluche est Michael. Et donc les drames s'enchaînent, le fiston réchappe de peu à un lavage de cheveux mortel, Susan tombe de 3 marches de haut, et ainsi de suite jusqu'à ce que David manque de se faire tuer sous sa douche par de l'eau chaude, dans une séquence d'anthologie où il s'acharne à tenter vainement d'escalader son pare-douche. C'en est si ridiculement pathétique que le singe finit par cesser de lui-même son attaque.
Tout commence par un regard...
...on se laisse prendre au jeu de la séduction...
...et on finit par tomber de haut.
Enfin décidé à agir, l'homme de la maison organise l'exfiltration démoniaque de manière astucieuse : faire le ménage, mettre la peluche sur la table basse, tenter de la faire tomber par inadvertance feinte dans un sac en papier, rater son coup, le reposer sur la table, passer l'aspirateur, le faire cogner dans la table pour enfin faire chuter l'immobile jouet dans le sac, et hop, le mettre à la poubelle devant chez lui ! Du grand art !
Bien entendu, ça ne suffira pas, le singe finira par se faire ramener à la maison, et il faudra un final apocalyptique (avec les moyens du bord) pour que cette histoire se termine... bien ou mal ?
Une friction du cuir chevelu un peu trop sous-marine.
L'enfer des bains de boue. "Le Singe du diable", un film qui dénonce les méfaits de la propagande sanitaire.
"Le Singe du diable" n'est donc à voir qu'à partir de minuit, pour les inconditionnels des films d'horreur ricains fauchés comme les blés, risque-tout prêts à subir une bande-son moisie. Car le pire, c'est que pour réellement profiter de ce plaisir crétin, il est indispensable de s'être bien enquillé le néant introductif afin d'être dans la condition mentale optimale pour savourer sa bêtise. Bah oui, je vous l'avais dit que c'était un loisir pervers l'archéologie des poubelles. A noter que les fans de peluches de petit singe qui tuent en frappant leurs cymbales apprécieront eux aussi le métrage (à ceux qui pensent que ces gens-là n'existent pas, je répondrai : "I want to believe !").
Si je trouve le lapin Duracell, je le bute !
Pour tâcher d'être complets, signalons qu'en 1996, ce film a bénéficié d'un remontage dans une version de 20 minutes sans queue ni tête insérée au sein d'un truc bizarre, sorte de Contes de la Crypte avec Ernest Borgnine intitulé "Merlin's Shop of Mystical Wonders" et manigancé par le même Kenneth J. Berton. A titre d'info pour les plus téméraires, ce bel exemple de "2-en-1" mal troussé, aussi bien noté sur imdb que l'original (1.6/10), est disponible en DVD. Comme quoi Kenneth J. Berton est un cinéaste écolo qui fait l'effort de recycler ses déchets.
Quant aux lecteurs qui trouvent le temps de bouquiner autre chose que des idioties sur Nanarland, ils auront sûrement fait le rapprochement entre le scénario de "Le Singe du diable" et la nouvelle de Stephen King, "Le Singe", parue en 1980. Et ils ne seront pas plus avancés pour autant...
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