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Night Train To Terror - Train Express Pour l’Enfer
(1ère publication de cette chronique : 2005)Titre original :Night train to terror
Titre(s) alternatif(s) :Cataclysm (le cauchemar sans fin)
Réalisateur(s) :Jay Schlossberg-Cohen, John Carr, Phillip Marshak, Tom McGowan, Gregg G. Tallas
Année : 1985
Nationalité : Etats-Unis
Durée : 1h38
Genre : Un ou deux rails, et le film déraille !
Acteurs principaux :Cameron Mitchell, John Phillip Law, Richard Moll, Eva Hesse, Marc Lawrence, J. Martin Sellers
Séance chez le psychanalyste.
- Entrez jeune homme, installez-vous….
- Bonjour, Docteur Glützenbaum. Hé bien, voyez-vous, je dois vous faire un aveu. Je… j’aime les nanars ! Je ne peux pas m’empêcher de regarder des films pourris en espérant chaque fois trouver pire ! *fond en larmes*
- Haha, voilà qui est original. Et selon vous, d’où vous vient cette forme de masochisme ?
- Hé bien… Ce fut dans la profonde horreur d’une nuit d’été. J’étais jeune, j’étais beau, je rêvais. Avec des amis, nous louâmes au hasard une VHS dans un vidéo-club pourri. Ca s’appelait « Night train to terror – Train express pour l’enfer ». On s’était dit qu’on allait voir un chouette film d’horreur. *se tape la tête sur l’accoudoir du canapé*
- Et après ?
- Et après… Mouahahaha ! Je n’ai plus jamais été le même, et depuis je gâche mon temps et ma jeunesse sur des sites Internet malsains. Tenez, pour vous raconter ça, je préfère encore vous faire une chronique de film. Je ne sais plus m’exprimer que comme ça…
- Mais faites donc.
- Bon, vous l’aurez voulu…
« Night train to terror – Train express pour l’enfer » est un film très original. Car il ne s’agit pas d’un film. Il s’agit de trois films et demi. Trois longs-métrages complets, coupés en tranches, jetés dans un mixer et mélangés au hasard avec des bouts de séquences de raccord. Une moussaka de morceaux de daube vérolés et inconcevables, liés entre eux par la sauce la plus frelatée qui soit et servie encore fumante sur l’assiette du consommateur inconscient. Une abomination lovecraftienne !
Prenons le film tel qu’il se présente, « brut de décoffrage ». Un train roule dans la nuit. A l’intérieur d’un compartiment de ce train, une sorte de salon. Dans ce salon, un groupe de rock teenager années 1980 de la pire espèce, avec bandanas mauves fluo. Ils chantent un machin abominable, dont les paroles suivent : « Dance, come on, dance with me ! YEAH ! Dance, come on, dance with me ! » ABDOMIBLATOIRE ! « Mais au fait, où va ce train ? » demandent-ils à un contrôleur noir aux allures de zombie. « Chacun arrivera à la destination prévue » répond le contrôleur avec un sourire satanique. « Ouah, il est cool, ce train ! ».
Dance, come on, dance with me !
Dans le compartiment à côté, deux vieux schnocks discutent. Il s’agit de Dieu et de Satan. On les reconnaît car Dieu est une sorte de Père Noël habillé de blanc, et le Diable un sous-Jack Palance habillé en noir. Nous apprenons que le train va dérailler à minuit. Il s’agira alors de déterminer si les passagers (les p’tits djeunz qui braillent) iront au paradis ou en enfer. A mon avis, rien que pour leur production musicale, ils méritent l’enfer, mais bon… « Peuh ! », s’écrie Satan, « Je suis sûr qu’ils ne prient jamais ! » ; « C’est que vous n’écoutez pas leurs chansons », répond Dieu. (NDR : « Dance, come on, dance with me ! YEAH ! ») Tout à leur discussion pour déterminer le sort des New Kids on the Block dans l’au-delà, Dieu et Satan décident de passer le temps en se racontant des histoires où il s’agira à la fin de déterminer si le protagoniste ira au Paradis ou en Enfer. (NDR : au générique de fin, Dieu est crédité comme jouant son propre rôle et Satan comme étant joué par "Lu Sifer")
Dieu.
Satan.
Vous voyez qu’on ne vous ment pas.
Scoop : au lieu de s’intéresser aux destinées du monde, Dieu et le Diable se font des soirées nanars !
C’est ici que le film démarre vraiment, et que sa vraie nature nous saute aux yeux : il s’agit d’un film à sketches, le train n’étant qu’un prétexte pour lier entre elles des histoires horrifiques sans aucun rapport. Mais la vraie originalité du film tient dans sa nature profondément branque et malhonnête, qui surpasse de loin Godfrey Ho et ses montages bidouillés. Il s’agit ici non pas d’un vulgaire « deux en un » mais d’un « trois en un », voire d’un « quatre en un » si l’on compte les scènes de raccord. Le plus horrible étant encore que la nature de l’arnaque saute aux yeux du premier spectateur venu, les « styles » de mise en scène et la photographie étant radicalement différentes d’un sketch à l’autre. Différentes, mais constantes dans la nullité : le film garde du début à la fin une réalisation oscillant entre l’apathie et le parkinson et une photo cra-cra à faire honte au premier réalisateur « philippin venu.
La VHS française.
Les trois longs-métrages utilisés pour le montage existent bel et bien en version complète et purent naguère se trouver dans certains vidéo-clubs anglo-saxons. Il s’agit de films d’horreur minables dont chacun, pour simplifier les choses, porte plusieurs titres différents : le premier s’intitule alternativement « The Case of Harry Billings » et « Scream your head off ». Le second, « Carnival of Fools » et « Death Wish Club », le troisième, « Cataclysm » ou « The Nightmare never ends ». Les deux premiers furent tournés par le même cinéaste, John Carr, le troisième, par Tom McGowan, Gregg Tallas, et Philip Marshak (ils s’y sont mis à trois, ce qui explique peut-être que ce sketch semble le plus « professionnel » des trois). Le tout fut bidouillé et recousu ensemble par un certain Jay Schlossberg-Cohen, producteur-Frankenstein qui sortit ensuite le film à sketches en le signant de son nom comme réalisateur.
Le résultat est un véritable choc esthétique qui explore les tréfonds de la nullité, en en redéfinissant la profondeur à chaque millimètre de pellicule. Déjà mauvais au départ sous leur forme de long-métrages, les sketches ressortent totalement incohérents d’un montage à la tronçonneuse qui rend leur récit haché et brumeux. De plus, leur intégration au film définitif ne se justifie en aucun des cas, le rapport avec la discussion entre Dieu et Satan étant plus que difficile à établir (on ne comprend souvent même pas qui est censé aller au Paradis ou en Enfer à la fin, malgré les efforts des deux acteurs qui en débattent à la fin de chaque histoire !).
La première histoire nous montre le pauvre John Phillip Law, qui dort debout dans le rôle d’un homme enfermé dans un asile psychiatrique dont les patrons font du trafic d’organes. Les affreux le manipulent pour rabattre des victimes, mais il finit par se rebeller contre eux. Tourné pour trois dollars et demi dans des décors misérables, le film n’est qu’un prétexte à des effets gore en Giclorama dont l’outrance ne cache pas l’amateurisme.
John Phillip Law a dû être mis en camisole de force pour l'obliger à rester sur le tournage.
Là, il va à l’église pour draguer une paroissienne.
… tout ça pour la mettre dans cet état (ouééé, un plan nichon) !
Le méchant docteur et son sbire Otto…
…responsable du découpage des victimes (à la scie à métaux !!)
Le trafic d’organes le moins soigneux de la création (on ne vous raconte pas dans quel état doit être la marchandise !).
Totalement nase, anémique, lamentable, le sketch se laisse voir pour la nullité du jeu des acteurs, renforcée par un doublage français abominable et pour son côté « on n’a rien à montrer, alors on fait dégouliner des tripes partout histoire de ressembler à un vrai film d’horreur ». Détail gouleyant : le film existe sous une version radicalement différente, bidouillée par le réalisateur original, John Carr : « Marilyn Alive and Behind Bars ». Cette fois, Carr a récupéré son métrage original et tourné de nouvelles séquences, pour faire une nouvelle « histoire dans l'histoire », avec un subplot impliquant que dans la clinique des horreurs se trouve une patiente célèbre (et prisonnière), Marilyn Monroe, incarnée par Francine York. Il semble que John Phillip Law n’ait pas tourné de scènes supplémentaires (NB : cette version avec Marilyn n’est pas incluse dans « Night train to terror »).
Rebelote, notre ami Otto, grand prix du tueur sadique nanar (Richard Moll, le comédien, est un bon acteur vu dans pas mal de mauvais plans : « Metalstorm, la tempête d'acier », « Ma Belle-mère est une sorcière », etc.).
La seconde va déjà plus loin dans le psychotronique : une jeune fille tombe sous la coupe d’un dangereux individu membre d’un club de dingues qui jouent à des sortes de roulettes russes élaborées dont le but est de savoir qui va mourir à la fin de la séance. Heureusement, un jeune premier – à l’inexpressivité fascinante – se charge de la tirer de ce mauvais pas. Les modes de suicide sont d’une débilité qui nous vaut des effets spéciaux nanars tout à fait délectables : on se fait piquer par un moustique géant (animé image par image, à la mode 1925), on grille sur une chaise électrique qui nous transforme en Evil Dead fumant, etc.
Le méchant séduit l'héroïne en lui achetant tout son popcorn.
Le héros - incroyablement mauvais - du sketch.
En fait, ils jouent tous ignoblement mal.
Le club DE LA MORT !
Un insecte mortel en pâte à modeler…
Qui va ensuite se poser sur une main en plastique. Quel suspense !
Mais le vrai intérêt tient dans une mise en scène totalement non-professionnelle, incohérente, la caméra étant secouée de convulsions que n’arrangent pas un montage à la serpe et une photo hideuse. Ajoutez à cela des dialogues débiles et un doublage français qui en rajoute une couche, et vous aurez un bon morceau de barbaque nanarde servie à point. Aimable facétie du remontage sauvage des sketches, on nous prive même de la fin de l’histoire, que les acteurs jouant Dieu et le Diable se chargent de nous résumer.
Scoop : Jimi Hendrix est vivant et joue incognito dans des séries Z !
Même principe que la roulette russe, mais avec une chaise électrique.
Immense réplique du Noir sur la chaise électrique : « excusez-moi si je fume ! »
LOL ! PTDR !
Des effets spéciaux à vous couper le squeele.
La troisième et dernière histoire bénéficie, comme il a été dit plus haut, d’une mise en scène légèrement plus « pro ». Un ancien nazi, toujours vivant de nos jours et ayant conservé sa jeunesse, se révèle être un agent de Satan destiné à la destruction du monde. Un écrivain prêchant l’athéisme va être victime des forces du mal (on ne sait trop pourquoi, d’ailleurs : sa propagande devrait normalement plutôt arranger les affaires du Démon) et son épouse va ensuite essayer de contrecarrer les plans de l’envoyé du Diable, dans un très mauvais pastiche de « Holocaust 2000 » et « La Malédiction finale ».
L’écrivain athée, joué par un acteur particulièrement peu motivé (en fait, un incrédule aussi triste ferait presque de la pub à la foi religieuse !).
L’envoyé de Satan, nazi durant la Seconde Guerre mondiale…
… et devenu aujourd’hui un playboy ringard, entouré de laiderons. En fait, être au service du Démon, ça ne paie pas tant que ça.
Le professionnalisme de la mise en scène est hélas ici une notion toute relative qui ne sauve guère les meubles : ce sketch est en effet celui qui nous sert, en quantité astronomiques, les effets spéciaux les plus outrancièrement lamentables jamais vus sur un écran, grand ou petit : masques de démons caoutchouteux, stock-shots d’explosions mal intégrés et surtout, une scène indescriptible qui voit un démon géant en pâte à modeler s’avancer pour écraser un homme… lui aussi figuré par une figurine animée en pâte à modeler, alors que le plan précédent nous montrait un vrai acteur !
Beuaaaargh !
Grâce à ses super-pouvoirs, l'envoyé du démon peut faire apparaître des monstres en pâte à modeler et transformer les gens en bonhommes en mousse qui vont ensuite exploser sur des crucifix.
La « suspension temporaire de l’incrédulité » demandée par tout film fantastique en prend un mauvais coup. A noter également la présence du pauvre Cameron Mitchell (le seul acteur connu du film, avec John Phillip Law), qui traîne les pieds, bouffi et démotivé, dans un rôle de flic particulièrement inutile.
« M’est avis qu’on a affaire à un gros nanar, lieutenant Jones ! »
Incroyable : même pendant la Première Guerre mondiale, il était allemand !
L'opération à coeur ouvert la moins soigneuse de tous les temps (à croire qu'ils ont pris des leçons avec les trafiquants d'organe du premier sketch).
Il va de soi que, pour un nanardeur novice, « Night train to terror » représente un spectacle particulièrement hard, tant le moindre plan, le moindre acteur, le moindre dialogue, suinte de l’incompétence la plus intense. Pour tout dire, ça fait même peur. C’est là où on se dit que, finalement, les scènes de Richard Harrison dans « Ninja Terminator » se tiennent plutôt bien. Sans que l’on puisse vraiment parler de « rythme », le film n’est pas ennuyeux, tant les morceaux de bravoure aberrants se succèdent à une allure d’enfer avec une violence qui explose les rétines. C’est du très, très, très, costaud. Une sorte de retranscription en images de l’indicible lovecraftien. Inimaginable.
Yeah, wock n’woll !
Pourtant, normalement, le fait d’avoir chanté des horreurs pareilles devrait leur valoir d’aller en Enfer.
Fin de la séance. Le patient fond à nouveau en larmes sur le divan.
- Voilà, Docteur, vous connaissez ma triste histoire. Que me conseillez-vous ?
- Ggghh… Mrpltk… Il…
- Docteur ?
- IL ME LE FOOOOOOOOOOOOOOOO !
Merci à Fantomas2 pour ses lumières.
Cote de rareté - 2/ Trouvable
Barème de notationIl a fallu attendre 2014 pour voir "Le Chat qui fume" nous gratifier d'un beau DVD avec un documentaire de 30 mn sur l'histoire du film. Du tout bon.
En France, le film n'avait connu jusqu'alors que des éditions VHS chez "American Producers Associated" (une société qui n'a d'américain que le nom, vous vous en doutez bien !). Une édition française est aussi sortie sous le titre "Cataclysm (le cauchemar sans fin)" chez "Ciné Vidéo International". Il est à noter qu'il est illustré par la jaquette de l'un des trois films qui ont servi à ce "3 en 1", à savoir le troisième sketch, qui est donc sorti en France dans sa version long-métrage.
Friands de cinéma trash, les Américains l’ont discrètement réédité en DVD, l'édition principale étant chez "Simitar Entertainment". Il est aussi ressorti dernièrement chez "Vinegar Syndrom"en Blu ray avec quelques bonus sympas. On les trouve sur des sites de vente en ligne. Mais vous pourrez aussi le croiser au détour de compilations à bas prix. Chez "Brentwood Entertainment", on nous le sert régulièrement dans les packs horreur de la maison recyclant plein de vieux films d'épouvante faisandés du même style. De même chez "Treeline Films" en compagnie de « La Lunule » et des plus respectables "Driller Killer" d'Abel Ferrara ou "Bad Taste" de Peter Jackson.
A signaler aussi que les Allemands de "Laser Paradise" ont ressorti leur édition dans leur "Red Collection" (on n'est pas là pour rigoler) avec une jaquette similaire à la VHS française.