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Stargrove et Danja, agents exécutifs


Stargrove et Danja, agents exécutifs

Titre original :Never too young to die

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Gil Bettman

Année : 1986

Nationalité : Etats-Unis

Durée : 1h30

Genre : Never Too Young To Cut Your Squeele

Acteurs principaux :George Lazenby, John Stamos, Vanity, Gene Simmons, Robert Englund, Peter Kwong

Zord
NOTE
4/ 5




Comme le disait Rousseau, « la destinée est souvent une vieille pute vérolée et capricieuse » (Raoul Rousseau, maréchal des logis chef au 1er Régiment Parachutiste d'Infanterie de Marine, philosophe méconnu à ses heures). Une morale pleine de bon sens, qui pourrait être celle de la petite histoire qui est à l'origine de la rédaction de cette chronique. En effet, comme beaucoup de forumeurs du site Nanarland, j'ai tout de suite été à la fois séduit et intrigué par la merveilleuse jaquette du film « Stargrove et Danja » (« Never Too Young to Die » en VO) qui, en plus de sa laideur naturelle déjà fascinante en soi, a contribué à l'enrichissement du vocabulaire nanarlandais via son accroche mythique :

« Des cascades, des poursuites, des bagarres A COUPER LE SQUEELE ! »


Vu le barouf que la révélation de l'existence du « squeele » (un concept dont la somme des implications tendrait vers l'infini et dont nous n'avons pour l'instant exploré qu'une infinitésimale partie) avait provoquée parmi les membres de notre petite communauté, ce film était devenu pour moi un trophée à conquérir, un sarcophage pharaonique à exhumer, une Atlantide à découvrir. Voire même, comme disaient les jeunes, mais déjà ringards, publicitaires des années 80 : une top priorité sur ma shopping-list !

Malheureusement, ce film semblait introuvable dans les lieux habituellement consacrés à l'exhumation des perles dans son genre : vidéoclubs glauques, brocantes à la limite de la légalité et autres farfouilleries à prix discounts de la région parisienne, pourtant bien fournie en la matière.

Bref, je désespérais de mettre un jour la main dessus, jusqu'à ce que les fêtes de Noël et les contraintes familiales subconséquentes, ne m'obligent à revenir dans la déprimante petite ville de Lorraine dans laquelle j'avais passé les 18 premières années de ma vie. Or, durant mon séjour, l'envie me prit d'aller faire un tour dans le vieux vidéo-club de quartier dans lequel j'avais autrefois mes habitudes et qui, par chance, a pour l'instant échappé au rachat par une enseigne de type « Video Futur ». Et quelle ne fut pas ma surprise de constater que l'objet de mes convoitises était là, juste devant mes yeux, posé négligemment sur la petite table consacrée aux ventes de VHS d'occasion, trônant fièrement au-dessus d'une pile d'autres invendus ! Le film pour lequel j'avais retourné tous les Cash Converters d'Ile-de-France était tout simplement là à m'attendre depuis des années, dans la petite boutique devant laquelle je passais tous les jours pour me rendre au collège et au lycée.

Comme quoi, « le destin, c'est pas d'la merde en barre, quand même », comme disait Platon (Emile Platon, tenancier du Bar-PMU « Chez Mimile et Ginette », autre philosophe méconnu).

Soit. Mais au final, le film vaut-il la peine d'une introduction aussi émouvante et chargée en pathos que longue et sans rapport avec la choucroute ? En d'autres termes, est-ce qu'en dépit d'une alléchante jaquette, « Stargrove et Danja » constitue t-il un mauvais film sympathique, un gros nanar à couper le squeele ?

Non.

Non, tant de nanardise ne se contente pas de couper le squeele. Elle le sabre sans pitié ! Elle le lacère ! Elle le déchire ! Elle le déchiquette ! Elle le confettise ! Elle en fait du mou pour les chats ! Attention ! Une seule vision de cette chose filmique peut provoquer des dégâts irréversibles au plus solide des squeeles ! La plupart des médecins squeelologues déconseillent fortement la projection de « Stargrove et Danja » aux personnes souffrant d'insuffisances squeelatoires !

 


Car, « Stargrove », c'est un condensé du pire du pire de ce que les années 80 ont pu produire de plus odieusement kitsch. À la manière de « Mégaforce », rien dans ce film ne pouvait esthétiquement et culturellement survivre à la fin des eighties. D'ailleurs, tout comme « Mégaforce », « Never Too Young To Die » se voulait à l'origine le pilote d'une série de films (« Stargrove, The New American Hero », en toute modestie...) qui aurait pu faire des deux acteurs principaux, John Stamos (l'oncle Jesse dans la série « La Fête à la Maison ») et Vanity (ancienne danseuse et éphémère compagne de Prince) d'authentiques vedettes populaires promises aux sunlights de la gloire, aux groupies déchaînées, aux dîners en notes de frais, et aux couvertures de France-Dimanche.

Malheureusement, c'est raté.

 


Soyons francs : ce qui rend « Stargrove » si hilarant et le transforme en nanar de compétition, c'est avant tout son ancrage dans une décennie si pourvoyeuse en mauvais films rigolos. Comme si toutes les scories du nanar des eighties s'étaient retrouvées, par une étrange fusion alchimique, condensées en ce seul film. Le mauvais goût le plus gerbant que cette décennie a pu engendrer, est ici affiché ostensiblement, sans pudeur et avec une fierté déconcertante. Fringues « madmaxiennes » des méchants. Coupes de cheveux improbables des protagonistes. Look rétro-futuriste craignos. Idéologie reaganienne sécuritaire. Mauvais glam-rock et soupe disco-dance. Aucun élément à charge ne manque sur la longue liste des chefs d'accusations qu'on pourrait dresser envers les responsables de cette chose filmique, au premier rang desquels on retrouve David Worth (celui d' Air Strike », « Shark Attack III » ou encore « Le Chevalier du Monde Perdu », c'est pas rien !) bombardé directeur de la photographie et assistant du réalisateur Gil Bettman, obscur yes-man venu de la télé (quelques épisodes de « L'homme qui tombe à pic » et de « K-2000 » en guise de filmo : voilà la tronche du CV !), quasiment disparu dans les limbes depuis. On n'oubliera pas au passage d'avoir une pensée pour l'équipe de production, à peine népotique, puisqu'on retrouve au scénario les deux frères Steven et Stuart Paul, leur mère Dorothy Koster-Paul au casting et, pour finir, leur père Hank, à la production exécutive. À noter que Steven Paul est un scénariste-producteur-réalisateur assez prolifique, particulièrement dans la série B mongoloïde, et qu'il a d'ores et déjà racheté les droits des célèbres jeux vidéos « Castlevania », « Pac-Man » et « Tekken » pour produire leurs adaptations cinématographiques, toutes prévues pour 2006 et 2007.
Bref, Steven Paul : retenez bien ce nom !

 


Et pour porter le coup de grâce, quoi de mieux qu'une distribution aux forts relents de formol ? Outre John Stamos et Vanity, déjà cités, c'est toute une palette de has-beens qui se bouscule au portillon du casting afin de palper les quelques dollars nécessaires au règlement de la facture du gaz à la fin du mois. N'ayant manifestement pas les moyens d'embaucher des « grands » du cinéma, la famille Paul a dû se contenter de ce qui se faisait de moins pire dans le marigot des seconds couteaux du bis hollywoodien afin de s'assurer la présence de quelques têtes connues à l'affiche. C'est ainsi qu'on retrouvera Georges Lazenby, peu motivé par son rôle d'agent secret d'élite ; Robert Englund, venu cachetonner entre deux « Freddy » ; Branscombe Richmond, le futur sidekick indien et grassouillet de Lorenzo Lamas dans la série « Le Rebelle » ; John Anderson, un visage récurrent de la série TV américaine et Peter Kwong, éternel sidekick asiatique dans une infinité de séries TV et de téléfilms miteux.

Reste enfin la cerise sur le gâteau, la star du film, la vedette qui, par la grâce de sa seule présence, contribuera à transformer ce qui jusqu'à présent n'aurait pu être qu'un banal téléfilm, en authentique nanar de compétition : Gene Simmons, bassiste de Kiss, le groupe aux 80 millions d'albums vendus.

Simmons, par son jeu de scène exubérant et sa capacité à tirer la langue au public, avait largement contribué aux performances scéniques du groupe dans les années 70 et au succès du film semi-parodique « Kiss Contre les Fantômes », en 1978, en cannibalisant littéralement l'écran grâce à ses dons innés de cabotin. Mais en 1986, Kiss était au creux de la vague, engoncé dans un carcan glam-rock et une volonté de « redevenir sérieux » (renonçant notamment aux maquillages et aux costumes de scènes déments qui avaient contribué à son succès) ne produisant qu'une soupe musicale insipide et peu inspirée qui trouvait de moins en moins d'écho auprès des fans. Or, Simmons, qui avait d'ores et déjà tâté au cinéma dans de petits rôles, commençait à envisager sérieusement un changement de carrière et un recyclage comme acteur. Il sauta donc sur l'occasion lorsque les producteurs lui proposèrent d'incarner le grand méchant de « Never Too Young to Die », faisant même annuler la tournée « Animalize » du groupe pour ça (on imagine surtout la tronche qu'ont du tirer ses collègues lorsqu'ils virent sur grand écran la raison de l'annulation de leur show-tour...).

Quoi qu'on puisse penser des performances de Gene Simmons comme bassiste ou compositeur, l'honnêteté intellectuelle pousse tout de même à avouer que s'il n'est pas le pire acteur du monde, il reste toutefois un concurrent redoutable pour l'obtention du titre ! Tirer la langue et faire le con sur scène pour faire marrer le public lors d'un concert, c'est une chose, faire tenir un film sur ces seuls ressorts dramatiques, c'en est une autre. Il y a un abîme entre les deux, abîme dans lequel Gene Simmons plonge cul par-dessus squeele, éclaboussant toute l'équipe du film au passage.


Après cette longue mise en bouche, qui en valait néanmoins la peine, passons enfin au corps du délit, le film en lui-même :
Lance Stargrove est un jeune type trop fort. Et comme tous les jeunes types trop forts, c'est le roi de son campus. Étudiant doué, gymnaste brillant, Lance fait craquer toutes les jolies étudiantes qui en pincent pour lui. Mais, alors qu'il pourrait abuser de cette situation pour tremper sa trique comme un gros chacal, Lance respecte trop les femmes pour accepter de jouer avec leurs sentiments, car, en plus d'être trop fort, il est aussi trop gentil et trop cool. Tellement trop cool que comme tous les mecs trop cools, il est en permanence flanqué de son meilleur-ami-pour-la-vie, un sidekick chinois à grosses lunettes nommé « Cliff » , super trop balèze en sciences et en informatique, mais qui, à cause de sa tronche de cake, de ses chemises horribles et de ses vannes débiles, n'a aucun succès avec les filles et doit donc se contenter de n'être que le chien fidèle du héros trop fort et trop cool.

 


Mais, en dépit de son attitude cool, Lance Stargrove souffre horriblement d'une blessure secrète à l'intérieur de dedans lui-même ! Orphelin de mère, il est négligé par son père, Drew Stargrove, un quelconque rond-de-cuir dont il ignore presque tout. Une terrible souffrance qu'il compense en battant record sur record et en obtenant bonne note sur bonne note afin de gagner, en vain, l'estime de ce père tellement distant qui ne daigne même pas se déplacer le jour de la remise de diplôme, et dont l'indifférence envers lui est aussi douloureuse qu'une plaie brûlante sur les charbons ardents de son cœur.

 


Mais ce que Lance ignore, c'est que son père n'est pas le technocrate hautain et méprisant qu'il imagine. En réalité, Stargrove Senior est un agent secret d'élite, un crack de l'espionnage, le meilleur, le plus fort de tous les plus forts, le plus mieux de tous les plus mieux, que plus balèze que lui, il n'y a que James Bond (et d'ailleurs, C'EST James Bond... Hum... Enfin, disons plutôt que ÇA A ÉTÉ James Bond. Une seule fois, soit. Mais James Bond quand même !).

 


Et la cause de l'indifférence apparente de ce redoutable espion envers son fils est bien évidemment son travail de sauveur du monde, qui lui prend quasiment tout son temps, et qui le conduit à enquêter sur les agissements d'un gang mystérieux, vaguement punkoïde, approximativement décadent, composé de freaks très inspirés par l'esthétique new-wave, de sauvageons pervers, de drogués vomis par les égouts de la société, de racailles avant l'heure, de type que vos mamans n'auraient pas aimé vous voir fréquenter, rassemblés sous l'autorité de Velvet Von Ragnar, leader hermaphrodite (au vu du film, « transsexuel » serait plus approprié), aspirant maître du monde le jour et drag-queen la nuit, qui projette d'empoisonner toutes les réserves d'eau de Los Angeles.

Dieu merci, Stargrove père réussit, en partie, à empêcher la félonie du félon en lui volant la disquette qui contient les codes d'accès du système informatique des réservoirs d'eau, car dans les années 80, aucun méchant ne peut commettre la moindre méchanceté s'il ne dispose pas de la disquette contenant les codes secrets. Malheureusement, le preux Stargrove Senior y laissera la vie, mais, en même temps, ça tombe bien, vu que le contrat de George Lazenby ne rémunérait qu'une seule journée de tournage.

Dès lors, Lance, qui se retrouve seul dépositaire de la fameuse disquette, n'aura de cesse de rosser les hordes de sbires nanars du terrifiant Ragnar, accompagné de son fidèle Cliff et de la belle Danja, ex-collègue de son père dans les services secrets, une femme, une vraie, avec des couilles, qui manie l'Uzi et le M-16 comme personne, ce qui ne l'empêchera pas de tomber dans les bras du fringant Lance, comme elle était autrefois tombée dans ceux de son père. Car être héroïque, beau, séduisant et faire tomber les chiennasses permanentées en pâmoison, c'est héréditaire dans la famille Stargrove. Normal : c'est une famille de héros !




Réussiront-ils à échapper aux hordes de l'abominable Ragnar ? Sauveront-ils Los Angeles des plans démoniaques et maléfiques de ce transsexuel à l'esthétique douteuse ? Sachez que je refuse catégoriquement de tuer le suspens en vous révélant que oui, car spoiler la fin des films, ce n'est pas mon genre, pas plus que de vous révéler que le méchant meurt à la fin, juste avant que le héros n'arrête le compte à rebours à quelques secondes de l'explosion. Non, n'insistez pas, je ne vous révélerai rien, pas même qu'à la fin, il emballe la gentille avant de partir avec elle au soleil couchant, vers un avenir plein de stupre et de promesses, sous le regard admiratif de son fidèle faire-valoir qui, lui, n'aura que sa main droite pour s'agiter le squeele, tout seul dans son coin, comme le sale con de sidekick qu'il est.


Étonnamment, ce film n'eut pas le succès escompté et ne donna pas naissance à la série TV dont il était censé être le pilote. Tout aussi étonnamment, il ne lança pas non plus la carrière hollywoodienne de Gene Simmons qui dû repartir la tête basse se contenter de vendre des millions d'albums au lieu de devenir le grand acteur nanar qu'il méritait pourtant d'être. Étonnamment encore, la prestation de Georges Lazenby n'a pas convaincu les producteurs de James Bond de lui redonner une seconde chance. Étonnamment toujours, John Stamos conseille aux propriétaires de la VHS de « Stargrove et Danja » de la brûler.


À croire que ce film leur a coupé le squeele !


Et puisqu'en France, tout se termine par des chansons, que diriez-vous des paroles du générique ? Des paroles d'une profondeur à vous couper le squeele !

Are ya feeling like breaking out?
Looking for danger
Feeling adventurous
Then you must
Put your trust
Not in a stranger

Playin' your own game
Do it your own way
Keepin' your own sound
That you found
Goin' down
Playin' like you play

Who knows what you'll find
You might like it, or not
But all that you find, boy
Is all that you got

(Stargrove!) Flying like you've never flown
(Stargrove!) Runnin' through a danger zone
(Stargrove!) Are you gonna stand alone?
Stargrove! Stargrove!

You feel like takin'
The world on your shoulders
You're just a Robin Hood
Makin' good
Where you could
You're one of the soldiers

Faster than lightning
Nothing can strike you
You got the good stuff
Tough enough
Stayin' rough
There's no one like you

Who knows what you'll find
You might like it, or not
But all that you find, boy
Is all that you got

(Stargrove!) Flying like you've never flown
(Stargrove!) Runnin' through a danger zone
(Stargrove!) Are you gonna stand alone?
Stargrove! Stargrove!



- Zord -
Moyenne : 3.54 / 5
Zord
NOTE
4/ 5
Nikita
NOTE
4/ 5
Kobal
NOTE
3.75/ 5
MrKlaus
NOTE
3.5/ 5
Rico
NOTE
3/ 5
Labroche
NOTE
2.5/ 5
Jack Tillman
NOTE
4/ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation

Là c'est du super rare, le film ayant sombré dans l'oubli le plus total. Seule version survivante, une VHS de "Nelson Entertainment" au visuel tapageur. Trouver ce film en version française peut donc être la quête de toute une vie !


Heureusement avec le tmeps cette oeuvre outrageusement 80's est ressortie en DVD fin 2004... en Allemagne, sous le titre "Lance Stirb Niemals Jung". L'éditeur "KSM GmbH" propose le film au format 4/3, avec pistes audio en allemand et en anglais. 

 

 

En 2017, les Américains de "Shoot! Factory" ont édité une belle édition blu-ray avec quelques bonus mais hélàs en zone A et uniquement en anglais.

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