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Les 3 Supermen dans la jungle
(1ère publication de cette chronique : 2007)Titre original :Che fanno i nostri Supermen tra le vergini della Jungla ?
Titre(s) alternatif(s) :Aucun
Réalisateur(s) :Bitto Albertini
Année : 1970
Nationalité : Italie / Espagne
Durée : 1h37
Genre : Les Charlots en collant rouge
Acteurs principaux :Brad Harris, Frank Braña, Sal Borgese, George Martin, Femi Benussi, Pilar Zorilla
Avez-vous déjà assisté à un concours de bêtise ? C’est ce à quoi ressemblait grosso modo un certain cinéma italien dans les années 1960. Une idiotie joyeuse, décomplexée et parfois aux limites de l’hystérie, dont la série des « 3 Fantastiques Supermen » est un exemple particulièrement probant. Après un premier épisode réalisé en 1967 par Gianfranco Parolini, les aventures des trois gugusses en collant – jamais joués tout à fait par les mêmes acteurs au cours d’une série à la cohérence aléatoire – n’allaient pas s’arrêter, générant un spin-off (« Supermen contre Amazones ») et un avatar turc (« 3 Supermen and Mad Girl ») dans une désopilante surenchère de stupidité. Le concept ? Trois guignols – un héros plus ou moins « premier degré », affublé de deux sidekicks plus ou moins comiques – habillés de collants rouges à l’épreuve des balles vivent à travers le monde des aventures aussi frénétiques que débiles, propres à faire passer les exploits de Terence Hill et Bud Spencer pour des marivaudages rohmeriens.
Dans ce troisième film de la série, l’agent Scott du FBI (Brad Harris, ancien héros de péplum), Superman à ses heures, est interrompu alors qu’il s’apprête à se marier et envoyé en mission en Afrique pour empêcher les Soviétiques de s’emparer d’un gisement d’Uranium.
Brad Harris.
Le mariage interrompu, un running gag dans plusieurs films de la série.
Scoop ! Les bases secrètes de la Nasa se trouvent dans des cimenteries !
Mais il lui faut d’abord récupérer ses deux sidekicks Martin (George Martin) et Dick (Sal Borgese). Les deux zouaves sont en effet des malandrins de première bourre, qui se sont faits arrêter dans un pays arabe pour avoir volé une cargaison d’or. Sur le point d’être empalés (apparemment, les collants pare-balles ne protègent pas leurs fondements d’un si funeste sort), les deux Supermen à la manque sont sauvés par Scott et le trio, enfin reconstitué, peut partir à l’assaut de la jungle africaine. Là, ils rencontreront des Soviets de carnaval, des cannibales tous droits sortis de « Tintin au Congo » et une tribu d’amazones aussi blanches que bien roulées.
Jungla, la reine des amazones (personnage piqué à une BD érotique de l'époque, publiée chez nous par Elvifrance).
Il est très difficile de résumer tout l’attrait d’un film comme « Les 3 Supermen dans la jungle », dont le titre original italien signifie littéralement « Que font nos Supermen parmi les vierges de la jungle ? ». Nous sommes en effet en présence de ce qui doit être l’une des idioties les plus frénétiques jamais portées sur grand écran. Le film semble avoir été scénarisé par un mauvais auteur de BD, sous l’emprise de quelque alcool extra-fort : les personnages accumulent pitreries, grimaces et actions absurdes, se livrant entre deux bastons à des facéties de cours de récré en s’agitant comme des perdus.
La palme revient de très loin à Sal Borgese – acteur que l’on vit dans de nombreux films comme « La Folie des grandeurs » avec Louis de Funès ou « Salut l’ami, adieu le trésor » avec Hill et Spencer – : interprétant le membre le plus « comique » du trio, le cher Salvatore tient le rôle d’un muet, capable de parler… uniquement aux animaux, ce qui implique par ailleurs de les imiter. Ce qui nous vaut de nombreuses scènes où Sal Borgese imite des pigeons ou des singes en battant des records de cabotinage psychopathe, ressemblant à force de n’importe quoi à un macaque atteint de tics nerveux et du syndrome de Tourette.
S’il demeure indépassable, son surjeu semble avoir contaminé le pourtant stoïque Brad Harris, qui ne manque pas une occasion de jouer sur un registre « defunèsien » en décalage avec son physique d’armoire à glace. George Martin est encore le plus sobre des trois, jusqu’à en sembler un peu transparent, mais la relative fadeur de son jeu est largement compensée par l’idiotie de ce qu’on lui fait faire à l’écran.
Là, Brad se roule par terre parce qu'il n'est pas content.
L’une des principales forces du film est une totale absence de complexes dans l’étalage de sa crétinerie. On dirait parfois l’une de ces vieilles BD de gare en noir et blanc et petit format, qui oscillaient entre sympathique naïveté et crétinisme abyssal empreint de vulgarité profonde. S’adressant à un public familial, le film ne peut malheureusement pas se permettre de vraies incursions dans l’érotisme – tout juste est-il un peu coquin – mais il ne manque que ça pour toucher le fond.
Les Soviétiques (l'espionne joue particulièrement mal). Dans le rôle de leur chef, on remarque l'Espagnol Frank Brana, qui remplaça ensuite Brad Harris dans « Les 3 Supermen de l'Ouest ».
Y'a quand même un peu de catch lesbien.
Un running gag du film : les Soviets qui dansent le kasatchok.
Si les personnages sont d’une débilité profonde, ils ont au moins l’excuse d’évoluer dans un univers très largement à leur mesure. Sans vouloir nous attarder sur les amazones blanches « vierges » mais toujours prêtes à se faire culbuter par nos héros, ni sur les Soviétiques qui gardent leurs chapkas au cœur de la jungle et se mettent à danser le kasatchok dès qu’ils sont contents, il faut tout de même citer les indigènes africains, que l’on n’oserait pas mettre en scène de nos jours sous peine de se voir infliger un procès carabiné. En effet, les Noirs présents dans ce film, amadoués par les Soviets à l’aide de jouets en plastique, complètement arriérés, sont d’une bêtise si crasse que je ne peux, malgré mon habituelle antipathie pour le politiquement correct, que constater le racisme assez délirant de leur représentation.
Kono 1er, roi des Bamboulas, apprend à jouer du pipeau.
Les "objets précieux".
Lui, il essaie de jouer de la kalashnikov.
Le plus beau dans le film est que le délire ne s’y arrête quasiment jamais, faisant se succéder scènes d’action mongolitesques et gags pachydermiques à un rythme véritablement infernal, dans un véritable crescendo de bêtise heureuse. Chaque scène ajoute sa pierre à l’édifice d’un monument d’idiotie, pour laisser au final pantois et ravi. De la part de Bitto Albertini, futur réalisateur de « Black Emanuelle en Afrique » et « Star Crash 2 », on n’attendait pas tant de délire.
Jungla veut faire de Scott son prince consort.
Un autre atout du film est son amoralité parfaite : les personnages – y compris les gentils – passent leur temps à se trahir sans aucune vergogne, comme dans un dessin animé particulièrement vicieux. Notons par ailleurs que les héros sont des individus particulièrement peu recommandables, puisque Scott trouve désopilant au début du film d’apprendre que Dick et Martin vont se faire empaler – il est envoyé à leur rescousse quasiment de force – et que la mort de leur guide, pourtant le personnage comique le plus sympathique du film, ne semble absolument pas toucher les trois Supermen. Une construction un tant soit peu cohérente des personnages n’est cependant pas ce que l’on demande à un film écrit à l’arrache, réalisé à la diable et joué n’importe comment. « Les 3 Supermen dans la jungle » est au contraire à l’image de son titre : débile, réjouissant et d’une énergie à perdre haleine.
Dick et Martin s'enfuient avec le pognon.
Une poursuite en voiture dans les rues de Washington (dont vous aurez reconnu le décor typiquement américain).
Jungla, l'amazone permanentée, rejoint la civilisation pour poursuivre Scott.
Scott se déguise en chinois pour blouser Dick et Martin ; il marche à genoux pour faire croire qu'il est petit et les autres s'y laissent prendre.
Pur exercice régressif, il ne peut que nous faire regretter son absence de quelconque distribution française. De là à dire que les Italiens nous envoyaient les miettes de leur univers nanar pour en garder les meilleurs morceaux, il n’y a qu’un pas, que nous franchirons allègrement. Vivement une vraie politique européenne du nanar, pour faire partager tous les trésors encore enfouis !
Cote de rareté - 4/ Exotique
Barème de notationPar contre, il faut connaître – ou apprendre – l’italien, car le DVD ne nous propose que cette piste sonore. Pas de sous-titres non plus : un vrai scandale, que les non-italophones soient encore privés des « 3 Supermen dans la jungle » ! Hé ho, les ritals, vous avez peut-être gagné le mondial de foot plus souvent que nous, mais faudrait pas oublier que le monde extérieur existe !