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Les Transformeurs de l'Espace
(1ère publication de cette chronique : 2008)Titre original :Space Transformers, 마이크로 특공대 다이야트론 5
Titre(s) alternatif(s) :Diatron 5 - Micro Commando Force
Réalisateur(s) :Johnny T. Howard (alias Jeong Su-yong)
Année : 1985
Nationalité : Hong Kong / Corée du sud
Durée : 55 mn dans sa VF
Genre : Space Transmorphers
Acteurs principaux :Des martyrs de la cause...
Un magnifique plagiat de "Macross" et "Akira".
Pour l'auteur de ces lignes, "Les Transformeurs de l'Espace" s'est imposé comme la preuve irréfutable qu'il ne faut jamais abandonner la quête du nanar. Car le nanar, voyez-vous, ne s'offre pas au premier venu telle une catin vulgaire aux cuisses grossièrement écartées, non : le nanar se réserve à ceux qui le méritent. Certes, le chemin est long et semé d'embûches et il arrive que le doute s'installe lorsque, à force d'indigestion de médiocres dessins animés, on en arrive à souffrir dans sa chair : l'estomac distendu comme une vieille bouilloire, un persistant goût de vomi en fond de bouche, l'œil vitreux frappé de fixité devant un écran diffusant de sa lueur blafarde les sempiternels affrontements de robots à la laideur interchangeable, accablé par le sentiment d'être devenu une sorte de boulimique du nanar, tout honteux de ses massives et écœurantes ingestions de produits filmiques de provenance douteuse.
A l'origine, il s'agit d'un dessin animé coréen réalisé par Jeong Su-yong et sorti en 1985 sous le titre 마이크로 특공대 다이야트론 5 (qu'on pourrait traduire en anglais par "Diatron 5 - Micro Commando Force"). Racheté par le producteur Joseph Lai via sa firme ADDA, il sera doublé en anglais et retitré Space Transformer en 1989, avec un nouveau générique avec des noms en anglais pour masquer son origine coréenne, et vendu comme tel dans le monde.
La VHS coréenne.
Après tant d'excès, faut-il pour autant s'arrêter et se refuser cette petite menthe fraîche de fin de repas télévisuel ? Certainement pas ! "Les Transformeurs de l'Espace", c'est ce petit rien qui pourrait être de trop, mais qui finalement va se révéler être une source de joie pour le spectateur au visage marqué par des heures d'exposition à de profondes et répétitives débilités. Oui, "Les Transformeurs de l'Espace" est un excellent nanar, un très bon digestif de la cuvée "Les DA de Tonton Lai", un que l'on tourne en bouche pour bien jouir de son plein potentiel, et bénéficier d'un véritable coup de fouet. Après ça, on est de nouveau d'attaque pour se fader même la pire daube.
Voyons comment se compose le produit.
Une fois le masque de contrefaçon passé (un générique avec images volées on ne sait où et un défilé de patronymes anglophones complètement bidons), le canevas classique se met en place : alors que le vaisseau Star Wars (sic) patrouille dans l'espace, il est sauvagement agressé par un robot géant qui lui éventre les flancs et effraie son équipage. L'attaque est diligentée par le chef des Tongs, qui rêve d'asseoir sa domination sur... heu... qui rêve d'asseoir sa domination. Mais un obstacle se dresse à l'encontre de son dément projet : Ivy, IA du Star Wars/de la Terre/du laboratoire du professeur Ping/voire plus si affinités.
Ivy en version gribouillis sur un écran.
Mini-Diatron 3 tente vainement de tabasser un Parus B impassible.
Ce météore étant immobile, on peut en déduire qu'il y a du vent dans l'espace.
Pour s'en débarrasser, un agent ennemi s'infiltre parmi la population humaine afin d'abattre Ivy, qui, en plus d'être une IA, est aussi une humaine. Ou bien un cyborg. En tout cas, c'est une jeune femme contenant "des ordinateurs auto-gérantes" (faute d'accord comprise). Et alors que l'on croit la pauvre fille tout simplement assassinée d'un coup de laser, la sombre machination se fait jour : une bactérie a en fait été injectée dans son corps !
Le chirurgien qui s'en occupe est formel : l'agent pathogène a déjà envahi le cœur et le foie, aucune antibiothérapie ne peut donc être menée sans provoquer la mort de la patiente. Étant donné que son décès entraînerait la fin de l'humanité, c'est la merde. Heureusement, l'expérimentation animale la plus sauvage n'a de cesse de faire progresser la société : en effet, des tests sur crocodile ont permis de perfectionner la technologie de miniaturisation. Il suffit alors d'injecter à Ivy une version microscopique de Diatron 3, le robot de combat de la Terre, afin de détruire in vivo la néfaste bactérie.
Un scientifique observe un crocodile réduit... au microscope (sic) !
Le fameux crocodile agressé par des bactéries (avec en bonus un faux-raccord sur la taille de sa cage de verre).
Improbable croisement entre "L'Aventure Intérieure" et "Il était une fois la vie", la suite de cette galactique épopée qui part de l'infiniment grand pour explorer l'infiniment petit n'a de cesse de surprendre son spectateur. Car le système biologique de Ivy est tout autant constitué d'univers et de planètes que de mondes féériques composés de confiseries et de vieux roi dépressif. Les guerriers blancs (les leucocytes ?) ont bien du mal à faire face à des créatures verdâtres armées de sagaies et de flèches (les bactéries ?), chapeautées par le Red Star et son maléfique couple de frère et sœur débarqué de nulle part. Quoi qu'il en soit, de rudes et destructeurs affrontements de méchas sont à prévoir.
Voilà de quoi est constitué l'intérieur d'une IA cyborg : des galaxies, des cascades, des arbres à pain et une fontaine de glace à la fraise.
Samba, le plus grand guerrier blanc que le système immunitaire ait jamais connu.
La base sanguine de Red Star, probable plagiat non-identifié d'un autre dessin animé.
Le concept d'ensemble est donc plutôt perméable à la compréhension. Mais dans les faits, on a surtout l'impression d'assister à un recyclage de diverses séquences reliées entre elles avec moult contorsions. Ce n'est pas dû à l'emploi de stock-shots (les personnages circulent bien d'un lieu à l'autre), mais plutôt à un ramassis d'idées éparses qu'on aurait déjà commencé à mettre sur papier avant de se rendre compte qu'il manquait 80 minutes autour pour en faire un film. Associer des mondes fantasy conçus sous LSD à des bases technologiques de SF avec des robots qui défoncent des primitifs à la roquette atomique sur fond de vague métaphore leucémique, n'est qu'une énième preuve de la démence commerciale de Joseph Lai.
On peut occuper un emploi de despotique boss de Red Star, et afficher son amour pour Mireille Matthieu.
Diatron 3, beta version, en mission kamikaze.
Bien évidemment, dans un tel fatras, difficile pour les personnages de conserver un semblant de cohérence. On a souvent le sentiment qu'aucun de leur comportement n'arrive à tenir la route plus de 30 secondes, les pauvres déclarant une chose et son contraire avant de finalement changer d'avis. Par exemple, la jeune et inutile héroïne Karen qui, à peine débarquée dans le système circulatoire de Ivy, décide qu'elle souhaiterait vivre à tout jamais dans cet endroit merveilleux.
Cette instabilité peut sans doute s'expliquer par les incessantes variations de la réalité, auxquelles nul n'échappe : visages et morphologies changeant du tout au tout selon les séquences, pilosité aléatoire, accessoires, cheveux ou vêtements qui changent de couleur d'un plan à l'autre, plan fumeux (en quoi le fait d'exploiter les blancs dans des mines va-t-il permettre à Red Star de se débarrasser d'Ivy et ainsi de permettre aux Tongs de ne plus végéter dans l'espace ?), etc.
Le commandant du Star Wars, souffrant de dysmorphofacie.
Le suprême commander des Tongs, affecté du même mal que son adversaire.
Voici un même groupe de personnages, vu de dos puis de face. Z'ont ben rajeuni, dites-voir.
La chirurgie est un art si stressant qu'il peut provoquer une perte pileuse cataclysmique.
La version finale de Diatron 3, en pleine forme.
La même version finale, mais pas exactement pareille.
Et comme dans tout bon dessin animé de cette envergure, les moyens techniques sont à la hauteur des ambitions affichées et offrent au spectateur les grands classiques qui en ont fait le succès : travelling en boucle flagrante, voire traveling dans le mauvais sens (vive les robots qui volent en marche arrière), couleurs douteuses (du rose pour des météores ?) clignotements intempestifs des yeux (et même des oreilles !), animations aberrantes, dessins bugués, perspectives au chômage technique, proportions jetées aux oubliettes, et pour la première fois à ce point, des taches particulièrement visibles sur les celluloïds (on a parfois l'impression que les personnages font de la buée en parlant) !
L'art de la découpe d'ombres en carton.
Le techno-armement du Star Wars. Notez les missiles fantômes (leur position finale est déjà dessinée).
Le professeur Ping parle du nez.
Un art martial qui défie la gravité.
Quant à l'inspiration graphique, c'est encore une fois le jeu des devinettes. Entre Voltron et Sailor Moon, il y a un monde que Joseph Lai n'hésite pas à confortablement occuper. Les designers ont par ailleurs joliment plagié des collections de jouets (voir l'onglet "images en plus").
En provenance directe de nulle part, voici Shaker et sa compagne Shelley (prononcez Chalet), sorte de Bunny Sailor Moon mal digérée.
Un robot de transport inspiré des Armored Trooper VOTOMS, qui fait aussi office de projecteur cinéma.
Mais un dessin animé nanar, ce n'est pas qu'un mauvais scénario et une animation en charpie, ce sont aussi du son, de la musique, des mots, des intonations... Merveille de l'homogénéité, cette dimension sonore est au niveau du reste du métrage, c'est-à-dire loin au fond. Enfin, je suis un peu vache de tout résumer ainsi, car la musique n'est pas trop mal, proposant de la dark indus et une chanson coréenne (?) psychédélique. Elle est cependant mal accompagnée, avec des bruitages pioupious dignes de ces petits boîtiers que, plus jeunes, on accrochait à nos vélos, et qui reproduisaient en boucle des bruits de bombardements, d'explosions et autres bouillies sonores indéfinissables.
Le retour de la lunette de vue microscope et la découverte de l'oscilloscope à bulles.
Biapam passe ses nerfs en bottant des culs.
Quant à la cerise sur le gâteau, la grande star du monde ADDA, c'est bien sûr le doublage français. Et ici, la cerise est aussi grosse que le gâteau. Ben oui, c'est du pur "un pour tous", avec un service minimum qui semble se composer d'un homme et d'une femme pour l'ensemble des personnages. Un couple dont on imagine sans mal qu'il était enchaîné dans le studio, martyrisé par des distributeurs pervers qui devaient probablement organiser des concours marathon entre différentes équipes de doublage pour parier sur les vainqueurs. Ou alors c'est qu'ils étaient payés suffisamment pour survivre le temps de doubler ces infamies venues d'Orient, et devaient donc taffer en permanence pour continuer d'exister.
Quelque soit l'explication, le résultat est vraiment catastrophique comme on aime : modifications ridicules des timbres de voix pour donner l'illusion du nombre, intonations nanars par excellence, voire accent Michel Leebien (Biapam le petit robot est un sketch constant sur le parler asiatique français), dialogues débilitants composés de jargonneries pseudo-scientifiques et de remplissage de rien à base de locutions vides, telles que "heuu, ouiii mais bon, mmh, aaah...", capables d'en faire des phrases entières, dans une synchronisation douteuse. C'est du grand, grand spectacle.
Une scène particulièrement débile, où le chirurgien tient un plateau sur lequel Diatron 3 est en train de reprendre sa taille initiale.
Ce tank glandouille est en fait un mécha-patin à roulettes.
D'une durée plutôt brève (moins d'une heure), "Les Transformeurs de l'Espace" a la politesse de ne jamais être ennuyeux, proposant en permanence des occasions de rire sainement, osant sans aucun complexe afficher les plus stupides des idées : l'attaque finale montre ainsi un mécha géant qui vole dans des couloirs minuscules, avec sur ses jambes un personnage qui flingue les gardes au spatio-Thomson camembert dans une espèce de remake futuriste des "Incorruptibles". Le film ne se permet de faire du remplissage que sur ses 5 dernières minutes, et ce dans les règles de l'art, avec des plans sur les pieds de Diatron 3, des zooms et des marches arrières sans intérêt, dans une sorte de touchant hommage au genre.
Le postérieur de miss Red Star attire décidément tous les objets phalliques qui traînent.
N'ayez donc aucune crainte de crise de foie en regardant ce "Space Transformers", car le spectacle est généreusement nanar, et le divertissement au rendez-vous.
Note : Compléments d'information sur les repompes des collections de jouets trouvés sur la page anglaise wikipedia de Diatron 5.
Entretiens
Cote de rareté - 3/ Rare
Barème de notationAttention à ne pas confondre avec cette VHS au visuel quasi-similaire, distribuée par Scherzo, et qui contiendrait "Les Aventuriers du Système Solaire" (d'un autre côté, on ne perd rien au change vu qu'il s'agit d'un pur chef-d'œuvre nanar).
"Les Transformeurs de l'Espace" inside.
"Les Aventuriers du Système Solaire" inside.
Les DVDphiles peuvent aussi trouver ce dessin animé en zone 1, sous le titre "Space Transformers". Les sites de vente en ligne indiquent une durée de 75 minutes, ce qui ferait un bon quart d'heure supplémentaire de délire, mais bon, ma VHS aussi indique 70 minutes. Il existerait encore une autre édition, nommée "Diatron 5 - Micro Commando Force", qui contiendrait elle une version alternative du film (on nage en plein roman) avec des voix, noms de personnages et score musical totalement différents. Apparemment, "Space Transformers" conserverait le thème coréen original, et il est à parier que c'est cette version qui est arrivée en France.
L'affiche coréenne originale.
Et voici les jouets du film !
Le Battle Buffalo de Diaclone (Diatron 3).
Le Warudaros version démontée de Diaclone (Parus B).
Le Warudaros version montée de Diaclone (Parus B).
L'Armored Trooper VOTOMS Scope Dog (le robot projecteur cinéma de Red Star).