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Athisayan (Indian Hulk)

(1ère publication de cette chronique : 2012)
Athisayan (Indian Hulk)

Titre original : Athisayan (Indian Hulk)

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Vinayan

Année : 2007

Nationalité : Inde

Durée : 2h22

Genre : En vert et contre tout

Acteurs principaux :Devadas, Jackie Shroff, Kavya Madhavan, Jayasurya, Mukesh, Jagadish, Karthika, Thilakan, Harisree Asokan, Baburaj, Rajan P. Dev, Sadiq, Ponnamma Babu, T.P. Madhavan, Ramu

John Nada
NOTE
3/ 5


A moins d'être complètement hermétique au nanar, voici le genre de visuel qui a de quoi exciter la curiosité. A vrai dire, en voyant cette tête d'enfant copiée-collée sur le corps d'un géant ravageant une ville, on soupçonne d'abord une imposture (c'est vrai quoi, un truc pareil c'est trop beau pour être vrai, ça sent carrément le fake torché par un p'tit rigolo sur Photoshop, non ?). Sauf qu'en cherchant bien, on découvre avec stupeur que ce démarquage exotique de Hulk existe bel et bien. A partir de là, votre serviteur en a tiré la conclusion qui s'imposait (il me le foooOOOOooo !!!).


The Power of Google Traduction : "Athisayan" (en malayalam) ou "Naya Ajooba" (dans la version doublée en hindi), en bon english ça veut dire "Wonder Kid" (soit "L'Enfant prodige"), mais ces grands farceurs d'Indiens ont préféré l'usage de l'engrish et traduit ça par "The Power of Child" ("Le pouvoir d'enfant").


Maya est une jeune et brillante reporter télé, qui s'occupe également d'orphelins. Parmi les enfants des rues qu'elle recueille, il y a Devan, un petit surdoué. Par un singulier hasard scénaristique, dans la maison à côté de la leur, un scientifique travaille à l'élaboration d'un sérum d'invisibilité. Lors d'une de ses enquêtes journalistiques, Maya parvient à filmer la rencontre à huis-clos entre de riches entrepreneurs arabes et un groupe de politiciens véreux, au cours de laquelle ces derniers acceptent d'importants pots de vin.


Devan (interprété par "Master Devadas"). Un mioche au QI stratosphérique qui rejoint avec mention notre galerie de gosses énervants.



L'habituel lot de méchants à l'élocution crispée, dont les spasmes du visage laissent penser qu'ils ont dû oublier leur vaccin anti-tétanique.


La journaliste a juste let temps de copier les preuves sur une clé USB, avant d'être enlevée par des bad guys à la mine patibulaire et à la moustache luxuriante (dans les films d'autrefois, les preuves compromettantes étaient sur microfilm, puis sur disquette, cassette, CD-ROM, DVD-ROM et aujourd'hui sur clé USB : vous noterez que si les supports évoluent, les ficelles scénaristiques, elles, restent les mêmes…). Pour la délivrer, le jeune Devan pénètre dans le labo de son voisin et s'empare de la potion d'invisibilité encore en cours d'expérimentation. Il parvient ainsi à sauver Maya, mais pour avoir consommé le produit en trop grandes quantités, il se métamorphose bientôt en un monstre gigantesque…


Le nanar, c'est parfois une question de patience. Car il faut tout de même tenir jusqu'à la 120ème minute pour voir le pseudo-Hulk tant attendu enfin entrer en scène. Cette tisane médiatico-politico-socio-judiciaire infuse lentement, avant de basculer brutalement en un creature movie faisant la part belle aux CGI foireux. L'attente en valait-elle la peine ? Oui, définitivement.


Cette grosse friandise nous vient d'Inde, et pour une fois il ne s'agit pas d'une production Bollywood ou Tollywood mais Mollywood, le cinéma en langue Malayalam basé dans l'Etat de Kerala, dans la pointe Sud du pays. Ceci dit, pour le spectateur non averti, la distinction avec les productions tournées à Mumbai, Hyderabad ou Chennai est mince comme un papadum, puisqu'en dehors du lieu de l'action Athisayan est un produit formaté pour plaire à un milliard d'Indiens (et plus si affinités extra-territoriales). On retrouve l'habituelle tambouille des genres - ici un mélange de drame social, de comédie pour enfants, de thriller politique, de film de super héros et de blockbuster catastrophe - qui constitue ainsi le ferment d'une oeuvre étonnante, où le sordide le plus crû, ancré dans une réalité bien tangible (des enfants des rues kidnappés par des réseaux mafieux qui les forcent à mendier) côtoie la fantaisie la plus légère (les inévitables scènes chantées et dansées, saturées de couleurs et filmées comme une pub pour on ne sait trop quel produit). Si les muscles abdominaux ne sont pas aussi sévèrement mis à contribution qu'avec d'autres productions indiennes - voire pas du tout, soyons honnêtes - l'apparition providentielle de bébé Hulk vient brutalement changer la donne.


En pur produit de contrefaçon, Athisayan se démarque de Hulk avec, disons, la même subtilité qu'un polo Laposte ou qu'une montre Reaulèxe. Hulk est vert ? Athisayan, lui, est rouge. Hulk est un adulte, le scientifique Bruce Banner ? Athisayan est un enfant dont le voisin est un scientifique. Pour le reste, on évolue en terrain connu : Athisayan est devenu super fort suite à une expérience scientifique hasardeuse (comme Hulk), il est pas content alors il casse tout (comme Hulk), rien ne peut l'arrêter (comme Hulk). La seule différence à vrai dire tient à la qualité des effets spéciaux. Une différence énorme qui suffit à catapulter Athisayan sur les pages de ce site.




Science sans conscience n'est que ruine de l'âme...




C'est aussi valable pour les FX !


L'Inde a beau avoir la réputation de former d'excellents informaticiens, quand on n'a pas les moyens de post-produire convenablement un film dont le maigre concept repose tout entier sur les CGI, le résultat laisse forcément à désirer (il semblerait d'ailleurs que la post-production ait été assez chaotique, le travail sur les CGI ayant débuté en Inde avant d'être délocalisé à la hâte à Hong Kong, retardant la sortie de Athisayan d'une bonne année). Au final, l'animation manque cruellement de fluidité, les incrustations sont complètement foireuses, et notre Hulk version hard discount affiche un faciès de golmon constipé tout ce qu'il y a de plus réjouissant.






Athisayan : le rictus figé d'un personnage Playmobil™, la démarche souple et la foulée légère d'un bonhomme Lego™.


Là où Hulk, en dépit de sa corpulence, pouvait courir, plonger, bondir etc., Athisayan se meut le plus souvent d'une démarche lourde et pataude, un peu comme un cul-de-jatte à qui on aurait greffé deux bûches en guise de jambes de bois. Dans un esprit proche du kaiju eiga, il détruit quelques éléments du mobilier urbain, donne de temps à autre un coup de pied rageur dans une automobile, sauf qu'au lieu d'avoir un intermittent du spectacle en costume de caoutchouc au milieu de maquettes en plastique, on a droit ici à un mélange peu convaincant de prises de vues réelles et virtuelles. On y perd en poésie, certes, mais pas en ringardise.






La magie du cinéma en action.


Dans son dernier acte, Athisayan braconne si ostensiblement sur les terres de Hulk que le spectateur un tant soit peu exigeant finit par se demander si on ne serait pas en train d'insulter son intelligence (je parle d'un spectateur exigeant qui aurait vraiment mauvais esprit). Comme au fond c'est quand même un super héros, il n'oublie pas de punir les méchants, ni de voler au secours d'enfants en détresse, mais comme c'est un super héros de contrefaçon, au final il ne fait rien de bien nouveau. Pire, comme si ça ne suffisait pas, il plagie carrément King Kong en décidant de grimper en haut de l'Empire State Building indien !






Enième exemple d'un cinéma d'exploitation opportuniste, qui n'a d'autre ambition qu'imiter un succès original - le talent en moins, le ridicule en plus - Athisayan est un film perpétuellement inféodé à la bêtise et aux attentes supposées de son public cible. J'écris "supposées" parce que dans les faits, le public cible en question a méchamment boudé les aventures de ce sous-Hulk pré-pubère et charismatique comme une biscotte sans sel, anéantissant du même coup l'idée d'une suite que les producteurs avaient pourtant caressée. On n'osera pas prétendre que c'est une lourde perte pour le 7ème Art, cette séquelle avortée ne manquera sans doute pas aux thuriféraires distingués d'un Cinémâââ nôôôble et rrrâââffiné… mais quand même, on ne peut s'empêcher de verser une larmichette en pensant au plaisir qu'aurait pu nous procurer un Athisayan 2. Un plaisir coupable, il va sans dire…







- John Nada -

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation

Le film se trouve sur des sites de VPC indiens, notamment une édition en hindi sous le titre Ajooba.