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Arrête de ramer, t'attaques la falaise !


Arrête de ramer, t'attaques la falaise !

Titre original : Arrête de ramer, t'attaques la falaise !

Titre(s) alternatif(s) :Qu'il est joli garçon l'assassin de papa

Réalisateur(s) :Michel Caputo

Année : 1979

Nationalité : France

Durée : 1h10

Genre : Mon dieu, quelle infâmie !!!

Acteurs principaux :Michel Galabru, Bernadette Lafont, Patrick Messe, Daniel Gélin

Gatman
NOTE
1.5/ 5



Bon, pour l’édification des générations futures, je vais vous relater un crime célèbre contre le bon goût commis en 1979.

1979 : en France, le cinéma comique français donne lieu à des œuvres populaires ET drôles comme « Les Bronzés font du ski ». Mais aussi des actes immondes commis par des individus sans scrupules.

Attardons-nous tout d’abord sur la personnalité des coupables (je sais, ils ne sont qu’accusés, mais rien qu’à voir leur casier, ils ont déjà des têtes de coupables).



Et une faute au générique, une !



Je m’excuse par avance de faire mention de détails quelque peu sordides, et de titres de films graveleux qui pourraient choquer nos lecteurs les plus jeunes, mais il convient qu’ils soient prévenus des risques de ce métier.

Le producteur : Jean-François Davy, déjà coupable de films « de fesse » comme « Traquenards érotiques », « Q », « Prenez la queue comme tout le monde » ou encore de comédies lourdingues telle « Chaussette surprise » (aka « Boum à l'hosto ») et futur réalisateur de « Ca Va Faire Mal ! », chroniqué en ces lieux.

Son complice et ami, le réalisateur Michel Caputo (alias Michel Baudricourt), qui fut son assistant sur quelques films. Tout acquis au stupre et au lucre, il tourne les très explicites « Queue de béton », « Double pénétration » et autres « Sodomies brûlantes ». Il oeuvrera également dans le thriller franchouillard avec Brigitte Lahaie (« L’Exécutrice ») et tâtera même du comique troupier avec les « Planqués du régiment » en 1983. On a donc affaire à des multirécidivistes. Et qui vont tout faire pour aggraver leur cas.

Premier crime, et principal chef d’accusation : un massacre littéraire

Pièce à conviction numéro 1 : le résumé de l’œuvre, tel qu'on le trouve au dos de la jaquette DVD (en plus il y a une vilaine fôte dans le générique, c’est « arrête de ramer » et non pas « arrêtes de ramer », la honte sur eux pendant 3 générations) :

« Le cid, revu et corrigé, trois siècles plus tard. Chimène et Rodriguez "couchent" ensemble en attendant toujours qu’on les marie. Don Diègue a mis de l’eau dans son vin et Don Fernand, roi d’Espagne, est devenu sénile. L’œuvre de Corneille est bien malmenée dans cette satire burlesque et farfelue. »

Bien malmenée ? C’est un euphémisme doux et délicat. D’autant plus cruel qu’étant mort en 1685, il aura bien du mal à se défendre, le pauvre Pierre. Il doit se retourner dans sa tombe (et ils en ont profité pour le sodomiser…). Mais nous verrons au fur et à mesure les détails de cet « Apocalypse Now » de la littérature.

Second crime : opportunisme du titre

Le producteur ou le réalisateur (de toute façon, ils sont coupables tous les deux) décident de changer le titre initial (« Qu’il est joli garçon l’assassin de Papa ») en s’inspirant sans vergogne d’ « Arrête de ramer, t'es sur le sable » (« Meatballs » en VO, avec le trio Ivan Reitman-Harold Ramis-Bill Murray) sorti la même année. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué et racoleur ?

3e crime : atteinte à la sobriété du jeu d’acteur

Sous la houlette de ce brigand (on peut difficilement parler de direction d’acteur), les comédiens convoqués pour cette lamentable pantalonnade vont être systématiquement lâchés dans la nature, que dis-je, la jungle !

Par ordre d’entrée en piste dans ce grand cirque :

Dominique Erlanger (l’infante) :

Après un générique (où le pauvre Corneille qui n’avait rien demandé est invoqué) accompagné d’une musique assez débile couverte par des rires enregistrés (au cas où personne ne rirait après), on découvre l’infante d’Espagne qui est présentée dès les premières secondes du film comme « ayant une araignée dans le plafond » et qui aime déclamer des vers au fin fond des supermarchés… En moins de 30 secondes, on a déjà une folle qui met les mains dans les camemberts. On trouve que c’est très fort, et c’est pourtant bien peu à côté du festival de grand n’importe quoi qui va suivre.



Puis sans trop de transition, on trouve Micha Bayard (Elvire) qui vient réveiller notre couple de héros, Bernadette Lafont (Chimène) et Patrick Messe (Rodrigue, alias le Cid)



Chaque acteur qui va entrer en scène va avoir la lourde tache de surenchérir dans l’outrance sur ses petits copains avec des répliques toujours plus cintrées (qui alternent avec les tirades de Corneille). D’ailleurs, vu l’absence d’intrigue, tout repose sur leurs épaules.



Dans cette quête du grand n’importe quoi, les acteurs ont donc eu carte blanche. On invoque donc tout ce qui peut servir : la régression infantile (je me laverai pas, lalalère !) limite scatologique, les jeux débiles, le maternage abusif, les clichés sur le folklore espagnol et la corrida. Olé !

Bernard Haller (le curé) :

Parmi cette brochette d’acteurs en total free style, se classe, dans le trio de tête, le personnage du curé (Bernard Haller, déchaîné) qui va accumuler tous les clichés sur l’ecclésiastique allumé, improvisant visiblement ses dialogues (« Heureux ceux qui louchent car deux fois l’esprit saint ils verront ») et riant de son propre délire, lorsqu’il répète un mariage avec un croissant dans la bouche et qu’il postillonne sur tout le monde. On est content pour lui (surtout à l’heure du repas).


Daniel Gélin (Don Gomez) et François Maistre (Don Diègue, quelle bande de dons…) vont quant à eux s’occuper des clichés sur les militaires, agrémentés de répliques toujours plus vulgaires.


Egalement dans ce trio du grand laisser-aller, on trouve Michel Galabru, qui s’en donne à cœur joie dans son personnage de Grand d’Espagne incompétent et incontinent.



4e crime : des dialogues au ras des pâquerettes

Le dialoguiste a eu la main lourde lors de l’écriture :
Raffiné : Ta barrette, je me la mets sur la pointe de mon nœud.
Classique : Oh rage, oh désespoir, oh vieillesse ennemie…
Très fin : Et moi je vous emmerde à la petite cuillère !
Délicat : Tu m’as l’air aussi intelligent qu’une limace qui sort des fraises.
Cordial : Embrasse-lui les fesses, les cuisses, le minou. Fais-lui minette de ma part
Corporel : - …Et porte sur le front une mâle assurance.
- Et sur le cul !

Vengeur : Faites zigouiller Rodrigue, c’est lui qui a tué mon papa !

5e crime : pas d’histoire qui tienne la route

Ca trépigne, ça crie, ça court, ça hurle dans tous les recoins. Personne ne s’occupe de cohérence, de continuité, de gags ou de scénario à part très vaguement suivre la trame du Cid (le vrai). Le sommet de ce grand capharnaüm est une reconstitution de la bataille qui vit vaincre le Cid, sous forme de spectacle avant-gardiste où des figurants hilares jettent tout ce qui leur tombe sous la main dans les couloirs d’un hôtel particulier, et où Galabru se balade sans vergogne avec un grand tapis sur le dos.

Le mot de la fin est celui d’un soldat américain qui se barre en disant qu’il en marre de ce film (et un chameau lui répond : salut mon pote. il a un drôle de goût ton chewing-gum…) Rideau ! N’en jetez plus la cour est pleine. Enfin le jardin des tuileries…


Je précise que je n'ai pas rajouté les sous-titres sur cette image...



Ne pas oublier les hommes de main et les seconds rôles comme les hordes de Maures avec les chameaux du cirque Jean Richard (remercié dans le générique de fin) au jardin des Tuileries (8 figurants et demi).


Des hordes de maures envahissent l'Espagne, euh Paris, enfin la Mère-Patrie.


Euh, comment je sors de ce film ?



Un look-alike de Michaël Youn avant l'heure...



Circonstance atténuante : la durée du film. 1h10 c’est largement suffisant pour dire autant d’âneries. Plus long ça deviendrait un peu pénible. Là, on se laisse porter par cet océan de bêtise et on évite ainsi la noyade.

Circonstances aggravantes : malgré les filmographies plutôt olé olé du producteur et du réalisateur, pas un plan nichon à se mettre sous la dent ! En revanche, on a droit à un plan zigounette qui tombe à plat (un comble).



Verdict du jury : tout le monde se souvient des « Bronzés », tout le monde veut oublier cette chose. Une œuvre criminelle, qui, hélas, engendrera un enfant bâtard : « Rodriguez au pays des merguez » que tournera le non moins coupable Philippe Clair en 1980. Les acteurs s’en tireront avec des fortunes plus ou moins diverses (certains finiront dans la rubrique acteurs comiques de Nanarland, ce dont je ne me vanterais que modérément si j’étais eux...), le réalisateur continuera dans le porno et le producteur ne s’en tirera guère mieux.

Que penser de ce crime hors norme ? L’aspect parodique du film limite un peu le côté purement nanar vu que c’est du n’importe quoi à peu près volontaire. Mais il ne suffit pas de laisser divaguer des acteurs connaissant leur métier pour faire un film drôle. Toutefois, les nanardeurs vicieux trouveront un côté fascinant dans cette entreprise hors norme, au-delà du bien et du mal, du beau et du mauvais. Enfin pas bien loin non plus, ils n’ont pas dépassé la rue de Rivoli.


Les gars, on quitte le navire ! Enfin, vous m'avez compris...


- Gatman -
Moyenne : 2.29 / 5
Gatman
NOTE
1.5/ 5
Nikita
NOTE
2.5/ 5
Peter Wonkley
NOTE
4.5/ 5
MrKlaus
NOTE
1.5/ 5
John Nada
NOTE
2/ 5
Rico
NOTE
2/ 5
Labroche
NOTE
2/ 5

Cote de rareté - 1/ Courant

Barème de notation
On trouve le DVD "Grenadine/Fravidis" (avec la fôte sur la jaquette) à un prix modique dans toutes les bonnes charcuteries. Pas de bonus.
Sinon dernièrement, les mêmes zozos nous l'ont ressorti sur une coffret de 10 films estampillés "les rois de la comédie n°2" avec entre autre "L'Emir préfére les blondes" et une palanquée d'autres films d'humour pas drôle ayant dépassé la date de péremption.