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Exterminator City

(1ère publication de cette chronique : 2021)
Exterminator City

Titre original : Exterminator City

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Clive Cohen

Producteur(s) :Clive Cohen

Année : 2005

Nationalité : Royaume-Uni

Durée : 1h20

Genre : Robots et Roberts

Acteurs principaux :Julie Strain, Brinke Stevens, Syn DeVil, Teresa May, Cathy Barry, Lana Cox, Jill Kelly, Mistress Persephone, Fembomb, Katarina, Jacklyn Lick, Lilith Stabs, Jessica Rose, Taylor Wayne, Mistress Rhiannon, Zenova Braeden, Penny Lynn, Cory Lane, Crystal White, Siana, Sara Jay, Misty Teal Varady, Amy Lynn Best

John Nada
NOTE
1.75/ 5

Nous sommes en 2027, dans la mégapole d'Atro City. Une blonde dotée d’une poitrine proéminente prend une douche dans son appartement. Gros plan sur une poignée de porte actionnée par un inconnu. La blonde créature n’a rien entendu, elle continue à se frotter lascivement la poitrine. Plan de la porte qui s’entrouvre, lourdement appuyé par un dramatique effet sonore (TA-DA-DAM !). La future victime se frotte toujours la poitrine, encore et encore, elle devait décidément être très sale. Vue en caméra subjective qui s’approche de la douche. La victime aperçoit soudain son agresseur. Hurle. Agite pathétiquement les mains devant l’objectif. Gros plan sur un couteau. Cut.


Le futur.

Après s’être enquillé des Himalayas de VHS, des cordillères de DVD, des téra-octets de .mp4, .avi ou .mkv, le nanarophile en mode Schtroumpf à lunettes se fait parfois fort de pouvoir identifier en quelques instants n’importe quel type de production.

- Alors ça, ça ressemble à un western spaghetti, mais lui je le reconnais c’est Hüseyin Peyda, donc c’est un western kebab. Et comme il y a la musique de Mon nom est Personne, c’est postérieur à 1973 !

- Oh ça c’est un actionner direct-to-video lambda, au vu de la musique et de l’esthétique je dirais 92-95, peut-être un PM Entertainment ?

- Mmh… ça ça ressemble à un film indien mais… en fait non c’est pakistanais. Mais ils parlent pas en ourdou là, ça doit être du pachtoune. Donc c’est sans doute une prod Pollywood. Ce qui veut dire que même si visuellement on dirait un film des années 70, ça date vraisemblablement de la fin des années 90, voire début 2000.

- Haha, mais ça c’est trop facile, c’est une sexy comédie italienne avec Nadia Cassini, regarde il y a tous les habitués du genre : Alvaro Vitali, Lino Banfi, Mario Carotenuto… trop fastoche !

Bref, avec le temps vient l’expérience, l’oeil du nanarophile s’aguerrit, on joue les blasés, on fait les malins… et pourtant il nous arrive encore d’être déconcertés par certaines trouvailles.

Deux têtes en caoutchouc et une paire de costards bon marché sur cintre : en 2027, le Ministère de l’Intérieur subira de sérieuses coupes budgétaires.

Oubliez Robocop et Judge Dredd : le futur des forces de l’ordre, c’est ce rutilant Robot-flic et son joli badge.

- Ça ? Euh, attends… pfff, ça euh… oulah, je dirais que ça a été tourné entre euh… 1990 et euh… 2010 ? Attends, mais c’est parodique là ou pas ? C’est quoi ces immeubles en carton et ces robots pourris, ils ont fait un reboot cyberpunk de Téléchat !? Ah mais OK, la meuf se déshabille, c’est un porno c’est ça ? Non ??? PUTAIN MAIS C’EST QUOI CE TRUC !

Et puis qui regarde ce genre de films en vrai ? A qui ça s’adresse ?? Y a vraiment un public pour ça ???

Nous sommes donc en 2027, dans la pluvieuse mégapole en carton d'Atro City. Un robot psychopathe commet de sauvages meurtres en série parmi la population, qui semble exclusivement constituée de jeunes femmes à forte poitrine. Pour tenter de l’arrêter, un robot détective de la crim' et un robot psychiatre mènent l’enquête. Celle-ci les emmènera « dans un terrifiant périple aux confins d’un cauchemar technologique tordu, plus terrifiant que tout ce que vous pourrez imaginez ». C’est du moins ce que nous promet le résumé au dos du DVD, emporté dans un lyrisme frelaté à défaut d’être convaincant.


Le script, d’une taille inversement proportionnelle à la poitrine de ses personnages féminins, suit en fait un schéma quasi-immuable : une femme les seins à l’air mène une activité complètement random. Elle se fait surprendre et trucider par un robot psychopathe. S’ensuit généralement un plan de coupe nocturne sur une maquette d’immeuble. Puis l’arrivée sur les lieux du crime du duo de robots enquêteurs, qui ne peut que constater les dégâts. Nouveau plan de coupe sur une maquette d’immeuble de nuit. Et rebelote.


TA-DA-DAM !

Notez qu'en l'espace d'un bref contre-champs sur son agresseur, la victime a eu la présence d'esprit de reboucher son flacon de vernis, histoire de pouvoir agiter les bras sans en mettre partout. Bien joué madame !

Damned mon cher Jean-Michel, nous arrivons encore trop tard !

Premier élément qui saute aux yeux : les scènes avec les actrices ont clairement été tournées séparément de celles avec les robots. Tous les meurtres sont filmés en champs-contrechamps, on ne voit jamais le robot tueur et ses victimes humaines ensemble, ce qui donne souvent des allures de « 2-en-1 » à Exterminator City. Même la qualité de l’image varie : d’un côté, les plans avec les victimes semblent avoir été tournés à la va-vite avec une caméra numérique bas de gamme, l’image est baveuse, l’éclairage blafard, la prise de son minimaliste. De l’autre, les plans sur les robots et les effets gore – bien que ridicules – sont plus soignés, plus nets, mieux éclairés.

Champs : des bimbos shootées à l’arrache au caméscope.

Contrechamps : des marionnettes de robots, bruitées avec une visseuse électrique.

Lorsqu’elles sont surprises par leur bourreau, les victimes mènent toutes des activités hautement intellectuelles. L’une prend sa douche, une autre est aux toilettes, une troisième se brosse les dents. Il y en a une qui se rase les jambes, une autre qui se vernit les ongles, et encore une autre qui se fait un masque au concombre. Etrangement, absolument aucune n’est en train de travailler sur un important projet pour un cabinet d’architecte ou dans un domaine scientifique ou artistique, aucune qui soit ne serait-ce qu’en train de lire un roman ou faire des mots croisés. On n’évolue même plus dans un univers de mauvais film peuplé de clichés ou de stéréotypes désolants, mais directement dans l’imaginaire moite d’un beauf en phase terminale. Un type qui fantasme à l’écran ses délires paraphiliques avec des persona féminines indignes des hentai les plus gênants.




Qui n’a jamais joué à faire des bulles de savon, seins nus sur son lit ?

Julie Strain, comme les autres actrices, n’apparaît que 2 minutes montre en main. Rarement un film l’aura aussi peu mise en valeur. Elle semble presque jouer à contrecoeur et on croit lire sur son visage un certain agacement, comme une colère rentrée de tourner dans une purge pareille. La comédienne a beau avoir fait carrière dans le bis et s’y être épanouie, elle touche ici le fond du faitout. Faut dire qu’il y a un monde entre un premier rôle chez Sidaris, avec 3 ou 4 semaines de tournage à Hawaï, et une scènette dans Exterminator City, torchée au caméscope dans une salle de bain.



Julie Strain : la dignité outragée.

En guise de robots, on a de grosses têtes en caoutchouc posées sur des cintres, avec une veste et une cravate. Quand ils parlent, le caoutchouc tremblote, et tout ne semble tenir que par l’opération du Saint Esprit. Histoire de varier les plaisirs, le robot-cintre psychopathe change d’arme à chaque meurtre : couteau électrique, tronçonneuse, fourchette, trophée, clou, flèche, perceuse… trucidant ses victimes dans un rendu très ketchupesque de gros Z résolument campy.


Ecrit, produit et réalisé par un certain Clive Cohen – qui ne semble pas avoir fait quoi que ce soit d’autre – Exterminator City n’a clairement pas été conçu par amour de l’art. Il n’est pas dit non plus que ce soit pour gagner de l’argent, tant la démarche est complètement hallucinatoire. M’est avis que c’était surtout une bonne excuse pour occuper ses week-ends en jouant à l’apprenti-cinéaste, et approcher de près toute une ribambelle d’actrices porno.




Des robots…

...et des roberts.

Bien qu’il ne dure qu’une heure vingt, on a le sentiment terrifiant qu’Exterminator City aurait pu continuer indéfiniment sur son mince canevas : un meurtre de femme à forte poitrine, un bref plan d’immeuble en polystyrène sous la pluie, un dialogue entre deux robots-cintres. Puis un nouveau meurtre, ad vitam aeternam. C’est ultra répétitif, c’est extraordinairement mauvais, et pourtant on ne parvient pas à s’arracher à ce spectacle hypnotique. On est ensorcelé par sa nullité, captif de sa laideur, happé par cette exhibition de poitrines outrageusement factices, envoûté par son rythme immuable. Regarder Exterminator City, c’est comme compter à haute voix jusqu’à l’infini, en ajoutant juste 1 à chaque fois. Et se demander, sans jamais trouver la réponse, si l’expérience est plaisante ou non.

LA PEUR ! (si si)

L’EFFROI !!

LA TETANIE !!!

L’EPOUVANTE !!!!

LA TERREUR !!!!!

Avec les mêmes éléments qui reviennent encore et encore comme un gimmick absurde, Exterminator City vous donne parfois l’impression d’avoir 40° de fièvre, quand l’esprit délirant ressasse en boucle les mêmes fragments d’images, jusqu’à épuisement. Le ton est donné dès le générique d’intro, qui égrène une interminable liste de noms de scream queens, de playmates de magazines et (surtout) d’actrices porno. Idem d’ailleurs avec le générique de fin, qui liste consciencieusement les sites internet des actrices (on vous paiera en visibilité les filles !).

Et dans la catégorie « Actrices porno », le prix de l’url la plus nanarde est attribué à…

Soyons honnêtes, des scènes un peu différentes viennent parfois s’intercaler entre deux meurtres. Elles nous montrent notamment le robot tueur se confesser auprès d’un robot prêtre, regarder un robot évangéliste à la télévision, ou bien être victime d’hallucinations mystico-religieuses peuplées d’insectes et de créatures en caoutchouc.



Une bible qui parle façon Necronomicon.


On a aussi droit – et c’est sans doute le clou du film – à un combat à l’épée. Sur le papier, c’est Terminator meets Highlander. Mais à l’image, pas de grands SCHLING ni de WOOSH épiques et sauvages : juste l’affrontement férocement ridicule entre deux robots-cintres. Leurs lames s’agitent dans un pitoyable cliquetis d’aiguilles à tricoter (clic-clic-tic-clic-clic-tic), invoquant avec clarté l’image d’une mamie s’excitant sur un gilet en laine.

Sur IMDB et les rares sites qui en parlent, Exterminator City est associé à un nombre extravagant de genres ou de sous-genres, preuve de la difficulté à le faire rentrer dans une catégorie : Horreur, Exploitation, Thriller, Cyberpunk, Science-Fiction, Tech-Noir, Black Comedy, Splatter, Erotica…

Exterminator City : le premier thriller de science-fiction érotique Z…

…dans un univers peuplé de robots-chiens…

…et de robots-fers à repasser.

Quand il ouvre la bouche, on s'attend à tout moment à entendre PSSSSCHHH...

Pour tenter de définir la chose, disons qu’en plissant les yeux on pourrait y voir une mauvaise adaptation de Philip K. Dick par un sous-Jesus Franco avec des actrices à la Russ Meyer. Ou bien le croisement dégénéré entre une adaptation robotique et siliconée de Sin City par un David DeCoteau hétéro et un inédit des frères Polonia, le tout avec le budget sandwichs de Despiser. Seule certitude : Exterminator City n’est pas un bon film.


D’ailleurs, dans quelle catégorie du site ranger cette chronique ? SF / Anticipation ? Robots, cyborgs & androïdes ? Erotique ? Allez, va pour Erotique. Quoique non, après réflexion Expérimental conviendrait mieux. Parce que malgré ses étalages mammaires réguliers, le qualificatif d’érotisme reste à relativiser. Ici pas de mise en scène émoustillante, pas de cadrages flatteurs, pas d’éclairage travaillé, rien d’un tant soit peu esthétisant. Clive Cohen filme ses comédiennes comme des vaches laitières à la foire au bétail. Clive Cohen ne sculpte pas la lumière, il travaille à l’ampoule 40 watts et au néon de salle de bains. Pour tout dire, en shootant de la façon la moins imaginative possible des actrices qui jouent sans conviction, il réussit l’exploit de rendre tristounet voire gênant ce qui aurait dû être sexy, allant ainsi à l’exact opposé de l’effet recherché.



Exterminator City est un non-film. Une mauvaise blague torchée par un cancre. Le délire d’un fétichiste d’un genre inédit, amateur de lolos en silicone et de robots en caoutchouc. Une fumisterie seulement rendue possible par l’avènement des tournages en vidéo à pas cher. Du Z dans ce qu’il a de plus Z. Pas vraiment un mauvais film sympathique au sens où on l’entend généralement ici, mais un pur OFNI hors catégorie, qui débarque sur Nanarland comme un VRP s’invitant chez vous pour vous refourguer son lot d’encyclopédies en 15 volumes : une fois Exterminator City lancé, vous êtes fichu. Son pied bloque la porte, il va vous lessiver le cerveau et vous aura à l’usure !

Vous connaissez sans doute le célèbre Orchestre Philharmonique de Prague, mais je parie que vous ne connaissiez pas celui de Prauge.

- John Nada -
Moyenne : 1.75 / 5
John Nada
NOTE
1.75/ 5
Rico
NOTE
1/ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation

Le film est sorti directement en DVD dans des pays comme le Japon, le Mexique ou la Russie, mais pas en France. La version la plus simple à trouver est le DVD américain édité par York, avec VO et zéro bonus.

L'édition DVD russe.

On le trouve aussi dans une édition 4 films sortie en 2009 chez l'éditeur Mill Creek Ent.