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Sabotage


Sabotage

Titre original :Last Target, Sabotage 2

Titre(s) alternatif(s) :Chantage à l'Apocalypse

Réalisateur(s) :Efren C. Piñon

Année : 1978

Nationalité : Philippines

Durée : 1h25

Genre : Plagiat scandaleux de James Bond (mais « Un policier américain » selon la jaquette)

Acteurs principaux :Jim Gaines, Don Gordon Bell, Mike Cohen, Tony Ferrer (dans le role de Tony Falcon, l’agent X44 et son charisme de lampadaire en panne), Tony Carreon

Ouze & Baron du Flutiô
NOTE
3.5/ 5

Spécialité : 1er prix du manque de cohérence dans l’enchaînement des scènes.
Qualité : image correcte (autant que peut l’être une vieille cassette), présence remarquée de quelques stock-shots. Son convenable, doublages typiquement nanars, bruitages hilarants.

Camouflant ses origines purement philippines, en surfant sur une apparence américaine, italienne voire russe, il semble au premier abord que « multinational » soit le premier mot qui vienne à l’esprit pour décrire cette œuvre nommée avec beaucoup d’à-propos « SABOTAGE ». Il s’agit en effet d’une entreprise dirigée par plusieurs collaborateurs de différentes nationalités dans le but d’obtenir… un nanar.


La jaquette est digne des meilleurs crûs du genre et tente désespérément de convaincre le chaland qu’il en aura pour son argent : des agents secrets avec des grosses lunettes de soleil, des explosions atomiques, de l’action, des hélicoptères partout et des potiches en maillot de bain sexy avec fusil d’assaut, on distingue également la voiture « spéciale » de notre sympathique héros, avec ses deux canons de DCA (nous y reviendrons). Trois lignes de texte en haut de la jaquette achèvent ce hideux dessin :
TOP SECRET – STOP – MISSION DANGEREUSE – STOP – OPERATION SABOTAGE EN COURS – STOP – COMMANDO PRET A INTERVENIR.
Le nanardeur averti ne peut décemment pas rester insensible devant un tel objet. La pochette de dos vaut aussi son pesant de cacahuètes : 4 pauvres photos dont la plus grande ne montre pas le héros mais un insignifiant méchant qui n’apparaît guère longtemps dans l’histoire – si tant est qu’il y en ait une.
Le scénario a très certainement nécessité une période d’écriture d’au moins 30 bonnes minutes. Celui-ci est « expliqué » sur l’arrière de la pochette et attention, le rédacteur doit avoir quelques problèmes de dyslexie :
« Le colonel Camus charge son meilleur agent, Tony Falcon, de protéger Madriaga, mais il s’aperçoit rapidement que le complot n’est qu’une manœuvre de diversion auprès d’Interpol afin de mettre au point des missiles qui vont permettre aux assassins de faire du chantage au gouvernement pour s’approprier le contrôle des mines d’or du pays. »
Comprenne qui pourra…


Tony Falcon, la classe incarnée (1).

Tony Falcon, la classe incarnée (2).


Dès les premières minutes, une scène nous fait comprendre qu’on a affaire à du nanar de premier choix au cours d’une séance diapo bien particulière. Des personnages regardent attentivement l’écran de projection, vide de toute image. Au bout de la troisième diapo qui ne montre rien, un homme lance « c’est bien de cet homme qu’il s’agit, il va falloir faire attention ». Lamentable ! Est-ce un mauvais éclairage (l’écran est tout noir) ou plus probablement l’oubli de foutre des diapo dans le projecteur, voici en tout cas le premier fou rire d’une longue série.


"Vous devriez vous occuper... faire du ski".


Il faut admettre que la qualité de l’image est, comme toute cassette d’occasion perdue sous une pile poussiéreuse chez un obscur vendeur d’occasion, assez douteuse, à croire que les précédents propriétaires le regardaient en boucle. Mais même avec toute la bonne volonté, cet écran reste désespérément vide…
Dès son arrivée à l’aéroport aux Philippines, Don Franco Madriaga est interviewé par des journalistes locaux. Le doubleur français s’en donne à cœur joie dans l’accent espagnol de cours de récré : « y’en soui convaincou », « y’ai souasi dé mé rendrrrrre aux philipinèsse pour affairrres ». Et vas-y que j’exagère mon coco. A côté, l’accent de Julio Iglesias dans « Je n’ai pas changé » ressemble à du norvégien.


Diego de la Madriaga, un type à qui on ne la fait pas.


Puis suit une course-poursuite en bagnole : pour faire croire que les voitures roulent très vite, on a rajouté des bruitages de crissement de pneus. Seulement, là où un bruiteur professionnel exploiterait 5 ou 6 sons différents, le bruiteur de « SABOTAGE » n’en utilise qu’un seul. Grotesque ! Le pire c’est que même sur une route complètement droite, les pneus produisent des crissements en continu, au moins un par seconde ! Tous les clichés de la course-poursuite sont présents, dont cette étrange manie qu’on les conducteurs (que dis-je, les pilotes) de tourner le volant dans les lignes droites ne constitue pas le moindre.


Même les méchants ont la classe.


Arrivées dans une bourgade, les voitures des poursuivis et de leurs poursuivants sont gênées par le trafic. Nous avons droit au classique camion (une camionnette blanche en l’occurrence) qui barre subitement le passage au milieu de la route. Oui mais dans « SABOTAGE », on n’a pas peur du ridicule et c’est avec un certain plaisir qu’on revoit la même camionnette 30 secondes plus tard rebarrer la route au cortège, puis encore une troisième fois ! Vous avez tout compris, ce modèle a sans doute été très vendu aux Philippines (on va dire ça…). Cette mystérieuse camionnette réapparaît d’ailleurs plus tard dans le film.


Notre héros en mauvaise posture.


L’histoire continue et les méchants sont toujours décidés à dessouder Don Franco. D’ailleurs, nous avons droit à une scène d’attentat des plus gratinées. Ca se passe dans un hippodrome, pendant une partie de cricket. Nous voyons la partie se dérouler, avec tantôt un plan large des 2 équipes (stock-shot dans une plaine), tantôt un personnage du film isolé avec des montagnes dans le fond. Soudain un évènement capte notre attention : un méchant active une télécommande, puis le cheval de l’un des héros est filmé au ralenti (un de ces ralentis nanars, dix fois trop lent) et tout à coup explose. Grandiose ! Un attentat au cheval explosif, il fallait y penser. Merci « SABOTAGE » ! [Note de Nanarland : en visionnant attentivement la scène, on remarque un jet de sang important et ultra réaliste s'écoulant par saccades du flanc du cheval paniqué, laissant peu de doutes quant au fait que l'animal a réellement été sacrifié. Du coup, la scène devient toute de suite beaucoup moins drôle...]




Un cheval explosif.


Mais la bande des gentils contre-attaque. Le héros Tony Falcon se rend dans une discothèque, dont la musique se réduit à une sorte de mandoline italienne honteuse. Don Franco Madiaga est dans la salle, alors Tony Falcon se doute bien qu’il devrait guetter les méchants au lieu d’écouter cette musique envoûtante. Ni une ni deux, il sort des lunettes design « mouche » puis tourne discrètement une molette sur une branche. Et là il voit tout le monde à poil. Vous avez bien compris, il utilise un gadget que même Pif Gadget n’a pas osé sortir : les lunettes-qui-voient-les-gens-tout-nus. Pas con le Tony, avec ça les méchants ne peuvent plus se dissimuler dans la foule !


Un gadget bien utile…

...les lunettes à rayon X !


Plus tard, Don Franco joue au golf, escorté comme d’hab’ par une bande de flics discrets comme des guirlandes. Un tireur d’élite qui a l’air plutôt louche est posté sur la terrasse d’un immense immeuble, au 50ème étage. Il vise, il vise… (zoom infâme) il vise, il vise et PAN raté, juste à côté du pied de Don Franco. Et là attention mes amis : un des flics présents au sol sur le green qui était dos à l’immeuble dégaine son petit flingue de poche, fait demi-tour et décoche dans la seconde un tir qui atteint le tireur d’élite en pleine tête ! Devant une scène pareille on reste bouche bée. Il ne fait aucun doute que ce flic-là a été embauché dans la police pour ses talents de tireur hors pair !


Mort d'un sbire à moustache.


Mais le film touche bientôt à sa fin et comme toute mauvaise fin de James Bond, le héros est capturé dans la base secrète des méchants. Que le nanarophile se rassure : ordinateurs clignotants partout et stock-shots de paraboles de 30 m de diamètre sont au rendez-vous. Le chef de cette base s’appelle STOSVSKI. Ce nom, cette barbe en collier, cet accent qui roule les R, mais surtout cette veste orange accommodée d’une cravate rouge à carreaux ne trompent personne : STOSVSKI est russe, et il veux envoyer des missiles atomiques sur le monde. « Ce n’est pas l’arrrgent qui m’intérrresse Tony Falcon, c’est le pouvoirrr ! » qu’il raconte.


Skovsky (Mike "le Parrain" Cohen), le grand méchant.

Jim Gaines, figure récurrente du nanar philippin, ici dans un rôle de sbire.

Don Gordon Bell, lui aussi habitué aux rôles de sbire, passe un mauvais quart-d'heure entre les mains expertes de Tony Falcon.


Et attention, il ne rigole pas STOSVSKI : pour montrer l’étendue de sa force, il lance un missile, un gros missile, un truc thermonucléaire ou que sais-je encore. Quelle est sa cible ? Une ville ? Une école primaire ? Une base militaire ? Non, un misérable chalutier, qui n’a rien demandé à personne, dont tout le monde se fout éperdument. Et là mes amis, quelle explosion !


Un déguisement astucieux.


Pour déjouer ses plans, Tony Falcon sera aidé par le GIGN philippin. Alors eux, c’est le pompon : ils portent des combinaisons aux couleurs chatoyantes qui font curieusement penser à un sac de couchage. Le pire c’est que chaque soldat est habillé différemment, les acteurs ayant probablement tenté de battre le record du costume qui ressemble le moins à un soldat. Les méchants de seconde zone jouent leur rôle et se font tous abattre (la vache c’est que y’en avait un bon millier ! Normal, quand un meurt deux réapparaissent…) et Tony Falcon s’en va en hélico. FIN


Lattage de sbire en série.


Les déclencheurs de fou rire :
- Les nombreuses explosions sont de deux types : pétard fumeux ou « truc à étincelles qu’on met sur les gâteaux d’anniversaire ».
- Vers le milieu du film, sur une durée de deux minutes, le réalisateur a le bon goût d’enchaîner des scènes sur trois lieux différents : un cabaret, la base des méchants et le bord d’une piscine où le héros drague avec classe. Cela engendre une infâme macédoine du style « augmentez le rendement des réacteurs, puissance maximum – musique de cabaret et applaudissements – vous voulez que je vous raccompagne chez vous ? ».
- La voiture du héros est tunée avec moults gadgets : pour se débarrasser d’un hélico qui le poursuit, il fait sortir du toit deux espèces de canons tout moches. Ma main à couper que c’est des rouleaux carton de PQ collés les uns aux autres dans le sens de la longueur.


Des gadgets high tech (mais si).


- Si on en croit ce film, le beau sexe aux Philippines semble exclusivement composé de jeunes bimbos en petites tenues ! Dans le shoot'em up final, on retrouve les pin-up en maillot de bain armées de fusils mitrailleurs qui ornaient la jaquette, mais tout au long du film on a aussi droit à un festival de donzelles en bikini travaillant pour Stosvski, et qu’on voit s’affairer autour de leur tableau de contrôle du réacteur atomique (alors que les mecs, eux, sont engoncés dans leurs combinaisons intégrales rouge pétant). Une vision irrésistible !
- Scène mythique : l’explosion de l’hélico (des méchants bien entendu) : notre héros est cette fois-ci accompagné d’une bande d’hommes qui ne sert à rien, ils sont là c’est tout. Tout à coup un hélico arrive, déluge de sulfateuse, les gentils évitent aisément la déferlante. Les gentils se doivent de répondre : tous les bras visent en direction du ciel, 5 ou 6 gentils tirent au même moment vers l’hélico qui explose façon nanar.
Je vous recommande chaudement « SABOTAGE ». Son quotient nanar est d’autant plus élevé qu’il comporte anormalement peu de scènes ennuyeuses pour un nanar philippin. C’est aussi un bon moyen pour « s’infiltrer » dans cette catégorie peu exploité du nanar d’espionnage.


Et maintenant, apportez-moi la tête de Max Thayer !


Note de Nanarland : Pures friandises philippines, les sous James Bond et particulièrement les aventures de Tony Falcon, agent X-44 font partie du patrimoine de l'archipel au même titre que les films de cape et d'épée en France ou les Cüneyt Arkin en Turquie. Près de 20 films ont été tournés entre les années 60 et 80. Seul celui-ci, par les hasards de la distribution vidéo, arriva jusque chez nous (via semble t-il les Etats-Unis où ce film était aussi sorti en cassette). Malheureusement, comme beaucoup de productions philippines de cette époque, la majorité de la série des Tony Falcon n'est jamais sortie en vidéo et de nombreux Philippins regrettent de ne pas pouvoir mettre la main sur ces films qui ont bercé leur enfance. Il faut espérer que les bandes n'ont pas été perdues et que les autres missions d'X-44 aux titres chatoyants de « Crisis », « Master Liquidator » ou « Modus Operandi » referont un jour surface en DVD.


"Je dédie cette flèche à cette pourriture de Tony Falcon !"



Attention aussi à la confusion au niveau des titres. « Sabotage » (titre original) est sorti aux Philippines en 1967, avec l'Agent X44. Le film chroniqué ici est en fait « Sabotage 2 », sorti lui le 16 mars 1979 aux Philippines, et le 8 janvier 1986 en France.



A noter que Tony Ferrer, titulaire du rôle et qui fait aussi une apparition au côté de Weng Weng dans « For Your Height Only », s'est par la suite lancé dans la politique dans les années 90 (une spécialité des acteurs philippins), ce qui lui valu quelques ennuis pour corruption (une autre spécialité des acteurs philippins depuis le renvoi du président Estrada, ex-star de cinéma, pour détournement de fonds !). Il continue toujours à tourner de nos jours, et s'est même semble t-il lancé dans la chanson. Quel homme !
En 2007 est sorti "Agent X44", une production philippine réalisée par Joyce E. Bernal où l'on retrouve le vétéran Tony Ferrer auprès du jeunot Vhong Navarro. Il s'agit malheureusement d'une parodie très décevante surfant maladroitement sur la popularité de cette icone du cinéma philippin.



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Cote de rareté - 5/ Pièce de Collection

Barème de notation

Une œuvre assez rare, qui a connu deux éditions rigoureusement identiques chez "American Vidéo" et "Moonlight Productions". Seul le logo change. Quelque chose nous dit que c'est la même boîte en fait.



Ces 2 éditions créditent à tort la réalisation du film à Peter Caballes.


Egalement sorti en VHS chez "Antares & Travelling" sous le titre "Chantage à l'Apocalypse".