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Robot Killer
(1ère publication de cette chronique : 2006)Titre original :Mutant Hunt
Titre(s) alternatif(s) :Mutant
Réalisateur(s) :Tim Kincaid
Producteur(s) :Charles Band
Année : 1987
Nationalité : Etats-Unis
Durée : 1h15
Genre : Science-fiction de hangar
Acteurs principaux :Rick Gianasi, Mary Fahey, Ron Reynaldi, Stormy Spill
Les productions du studio « Empire » de Charles Band sont restées dans les mémoires pour leurs capacités à survendre sans vergogne des produits que le plus madré des margoulins aurait hésité à fourguer. Ici, les différentes affiches et jaquettes de ce film titré, selon la fantaisie des distributeurs, « Mutant Hunt » ou « Robot Killer » nous promettent qui un redoutable Terminator prêt au combat, qui un terrifiant mutant-cyborg au bras extensible. La force de l’argument de vente est que ces éléments se retrouvent bel et bien dans le produit fini, mais sous une forme quelque peu inférieure à ce que promettait l’emballage. Au lieu des Terminator, vous aurez une escouade de chanteurs de Ska atteints d’une forme arthritique de la danse de Saint-Guy. Au lieu des bras élastiques s’allongeant à l’infini, vous aurez des effets spéciaux parmi les plus rudimentaires depuis les années 1930. Au lieu d’un film de S-F spectaculaire, vous aurez des escarmouches dans des hangars désaffectés.
Evidemment, si cela vous surprend, c’est que vous n’aviez pas remarqué que le film portait la marque de l’inénarrable duo formé par Tim Kincaid (réalisateur) et son épouse Cynthia De Paula (productrice exécutive). Ce couple infernal, sous-traitant des plus infâmes productions de Charles Band, porte sans doute la responsabilité des Z américains les plus fauchés des années 1980. Le résultat de leurs efforts est souvent assez fascinant : on reste bouche bée devant un tel cocktail de misère financière et d’incompétence artistique, combinées à une recherche désespérée du spectaculaire. Un peu comme un cinéaste amateur agoraphobe, reclus dans son garage, qui se persuaderait d’être Orson Welles en filmant la copulation de ses cochons d’Inde.
« Inteltrax », la multinationale de l’affreux Z, logée dans un HLM du Bronx loué au noir par la production.
Un laboratoire de pointe.
« Robot Killer / Mutant Hunt / Mutant / Matt Riker » (choisissez le titre que vous voudrez) se passe à New York, dans un futur mal défini. Deux méchants à la fois alliés et rivaux, Z et Domina, se disputent le monopole de la production d’androïdes de combat, destinés à produire l’armée ultime. On ne voit pas trop comment, car les robots sortis de leurs chaînes de montage se présentent comme une bande d’ahuris raides comme des piquets, d’une balourdise ahurissante, qui se feraient rétamer dans la première baston venue par des grabataires en déambulateur.
L’Affaire Louis Trio... pardon, il s'agit de l'ignoble Z et de ses sbires robotiques.
La vénéneuse Domina, jouée par une actrice qui semble toujours bayer aux corneilles.
L’affreux Z a eu pour brillante idée d’injecter à ses nouveaux prototypes de robots (appelés « cyborgs » dans le dialogue, mais présentés comme des robots dans le scénario) une douteuse substance nommée l’ « euphoron », censée booster leur puissance et leur agressivité, mais qui a essentiellement pour effet de les faire progressivement se décomposer et de leur faire commettre des agressions gratuites dans New York. Incapable de décider si son film devait parler de mutants ou de robots (d’où la multiplication de titres comme « Robot Killer » et « Mutant Hunt »), Tim Kincaid a donc eu pour idée d’en faire des robots mutants. C’est tout simplement génial, voilà de quoi contenter les amateurs de robots et ceux de mutants. Il aurait dû en rajouter un troisième couche pour en faire des robots mutants ninjas, la fête aurait été complète.
...et donc Monsieur Z, en discutant à table de votre projet secret, avec ma femme et mes enfants on a eu cette idée rigolote d'utiliser vos fonds pour créer des tueurs qui seraient à la fois des robots et des mutants, pas mal comme idée, non ?
Et voici le résultat Monsieur Z ! Alors, vous en pensez quoi ?
Le scientifique responsable du projet se rebelle contre Z et est fait prisonnier. Sa sœur court demander de l’aide à une sorte de mercenaire du nom de Matt Riker. Dérangé en plein coït avec une douteuse radasse, Matt Riker doit successivement accueillir sa visiteuse et affronter en slip kangourou les robots poursuivant cette dernière, au cours de l’un des pugilats les plus mal filmés et chorégraphiés de toute l’histoire du cinéma d’action. Notons au passage que Tim Kincaid, sans doute influencé par son expérience dans le porno hard, montre une nette tendance à filmer les bastons en plans très longs, voire en quasi plan-séquence, ce qui est la meilleure façon de tuer toute dynamique dans la scène.
Notre héros, Matt Riker (Rick Gianasi, futur héros de « Fatal Frames »).
Tel un fauve en slip, il n'hésite pas à se jeter sur les redoutables robots mutants. Quel homme !
Notre héros emploie la technique Shaolin de l'âne qui rue : et paf !
Oooh, Matt !
Conscient de la menace, Riker va partir à la chasse aux robots mutants, accompagné d’une équipe de sidekicks aussi finauds que lui – un latino moustachu karatéka et une rouquine agente du FBI utilisant comme couverture son métier de strip-teaseuse – tandis que la méchante Domina met au point un super-robot plus fort que tous les autres. Ca va chauffer ! (Enfin, moyennement)
La fine équipe en plein brainstorming (bon euh... ces robots mutants sont décidément bien méchants, je crois bien qu'il faudrait qu'on les élimine, z'êtes d'accord les copains ?).
Bricolage de cyborg do-it-yourself.
Cette femme est une agente du FBI (on ne saura d’ailleurs pas à quoi lui sert sa couverture).
La totalité du film est marquée par une la même incapacité à rendre quoi que ce soit de crédible. Que ce soit le scénario à la fois basique et confus, comme un mauvais épisode de dessin animé écrit à la va-vite par une équipe de scénaristes ne se concertant pas entre eux, les acteurs mous comme des serpillières livrés à eux-mêmes ou les effets spéciaux pitoyables, « Robot Killer » suinte une misère aussi angoissante qu’une file d’attente aux Restos du Cœur.
Une scène de combat où l’actrice se retrouve sans aucune raison en sous-tifs.
Elle se positionne d’ailleurs en concurrente redoutable pour le titre de pire kickboxeuse de tous les temps.
L’agent latino, seul acteur à bien se débrouiller dans les scènes de fight. D’ailleurs, il en fait plus que le héros, comme un vulgaire sidekick de Miles O’Keeffe !
La plupart des scènes sont filmées dans divers lieux désaffectés, grossièrement déguisés en appartements, bureaux ou laboratoires ultra-secrets dont les décorateurs, ou ce qui en tient lieu, ne tentent même pas de cacher le vide. Voilà un film américain, vendu dans le monde entier (car le père Band a de l’entregent), et pourtant plus pauvre et mal foutue que la plus misérables des bisseries philippines. L’organisation secrète de Z, suffisamment fortunée pour financer la construction de robots censément ultra-perfectionnées, loge ainsi son QG dans une usine abandonnée n’attendant plus que les démolisseurs, ce qui donne le sentiment que le méchant est quasiment SDF. Quant au laboratoire ultra-secret, il ressemble tellement à un parking souterrain que c'en est probablement un. Ca ne fait pas très sérieux pour un aspirant maître du monde.
Un maquillage étonnamment réussi : il semble presque déplacé dans un film pareil ! On comprend mieux en voyant le nom d'Ed French au générique, qui est quand même une pointure du maquillage.
Malgré son intense pauvreté, le film semble avoir quelques prétentions à montrer de la S-F sérieuse, qui ne font que l’enfoncer plus avant. Les héros se repèrent ainsi à l’aide de montre-bracelets munies d’écran ultra-sophistiqués faisant apparaître des croix luminescentes sur un plan de Manhattan, là où leur cible est censée se trouver. A ceci près que vu la taille de Manhattan d’une part et l’imprécision de leur carte virtuelle de l’autre, ils peuvent se tromper de trois ou quatre pâtés de maison. Leurs méthodes laissent également songeurs : qu’on en juge par cette scène où l’une des héroïnes, appelant à l’aide par téléphone un coéquipier, lui dit exactement où elle est, mais celui-ci, qui se trouve à un pâté de maison, perd un temps précieux pour vérifier grâce à sa montre-bracelet-radar le temps qu’il mettra à arriver (95 secondes).
Quant aux moyens ultra-technologiques employés pour se repérer, ils suscitent également la perplexité. Averti d’une agression de quidams, Matt Riker reçoit de sa montre le message suivant : « Extermination de vie humaine en cours au secteur 1-35 ». Pourrait pas indiquer simplement le nom de la rue, le gadget ?
Bien que souffrant d’un rythme plus qu’aléatoire (Kincaid est apparemment incapable de donner un vrai peps à autre chose qu’un film porno), « Robot Killer » est une telle accumulation d’impéritie pathologique et de bêtise insane qu’il se hisse bien haut sur le piédestal de la stupidité des années 1980. Entre la série Z et le film quasi-amateur, avec parfois des allures d’œuvre expérimentale, le film a quelque chose d’un film de SF improvisé par Andy Warhol, mixé avec du hard-rock eighties, les locaux de l’ancienne Factory comme décors et du mobilier post-moderne pour symboliser l’aliénation de l’homme moderne en slip kangourou dans l’univers urbain. Si cela avait été, « Robot Holocaust » serait peut-être étudié aujourd’hui dans les écoles d’art et projeté en boucle au Centre Georges Pompidou. Y’a pas de justice ! En attendant une éventuelle réhabilitation, les nanardeurs les plus téméraires pourront se risquer à (re)découvrir ce bel objet à la stupidité pétrifiante.
Une capsule temporelle sur la faune des années 1980.
T'as le look, cocotte !
Des loubards qui respirent l'intelligence.
Robot Killer a entièrement été tourné à New York, en 1985. Un des lieux qui sert de décor au film présente une architecture imposante et remarquable, qui donne du cachet et un côté futuriste au repaire des méchants.
Il s'agit du Brooklyn Army Terminal, un gigantesque complexe conçu par Cass Gilbert (l’architecte du Woolworth Building, l'un des plus anciens gratte-ciel de Manhattan). Lorsque sa construction fut achevée, en septembre 1919, il s’agissait alors du plus grand bâtiment en béton du monde. Ce complexe de 38 hectares était la plus grande base d’approvisionnement militaire des États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale, et avait sa propre ligne de chemin de fer. Les marchandises étaient chargées dans les trains depuis les nombreux balcons en porte-à-faux d’un atrium à ciel ouvert. Au total, plus de 3 millions de soldats et 37 millions de tonnes de fournitures militaires ont transité par le terminal. Après avoir été fermé dans les années 1970, le parc industriel a été réhabilité et accueille aujourd'hui de nombreux artistes et entreprises, attirés par des loyers très modérés. (Source : https://www.duventdanslesvoiles.com/2018/02/10/brooklyn-army-terminal/)
Cote de rareté - 3/ Rare
Barème de notationAvec la complicité de chez "Wizard Entertainment", le film est ressorti en DVD toutes zones aux Etats-Unis dans une pompeuse collection Grindhouse (c'est à la mode). Version anglaise only et peu de bonus à part une petite intro.
Toujours pas de DVD français en vue, alors en attendant on peut toujours tenter de dénicher les antiques VHS d’époque, chez "Scherzo" dans leurs collections "spécial Avoriaz" ou "Editions Impériales" (ça en jette !), changeant de nom selon les envies, sous les trois titres de « Mutant Hunt », « Mutant » et « Robot Killer ». Il existe aussi une édition sous le nom de « Mutant Hunt » chez l'éditeur belge "Eagle Vidéo".