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American Force

(1ère publication de cette chronique : 2007)
American Force

Titre original :Phantom Raiders

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Dan Harvey & Sonny Sanders

Année : 1988

Nationalité : Philippines

Durée : 1h30

Genre : Ninja Platoon vs Fuckin’ commies

Acteurs principaux :Mike Monty, Miles O’Keeffe, Jim Moss, Kenneth Peerless, Anthony East, Dave Anderson

Nikita
NOTE
3/ 5


La guerre, c’est chouette : ça donne l’occasion de réaliser plein de films. La guerre du Vietnam, c’était extra-super-chouette : elle a donné la possibilité aux Américains (et aux autres) de la refaire – et de la gagner – pendant près de quinze ans et laissé à la postérité une kyrielle de nanars souvent estomaquants. Ici, ce sont les Philippins, grands imitateurs du cinéma guerrier américain, qui s’y collent et le résultat dépasse nos espérances : « American Force » est tout simplement l’un des films d’action les plus crétins des années 1980. Avez-vous déjà vu une partie de paint-ball entre copains, filmée au caméscope ? Imaginez maintenant une telle scène, filmée avec des moyens à peu près professionnels, et tentant de se faire passer pour un vrai film : vous avez « American Force ».


« Apocalypse Now » avait pour figure marquante le Colonel Kurtz, officier américain devenu chef de guerre des indigènes au fin fond de la jungle. C’est une bonne idée, on va faire pareil, se sont dits les auteurs d’ « American Force ».


Dans l’Apocalypse Now du pauvre, normal qu’on ait le Colonel Kurtz du SDF.


Sauf qu’ici, Kurtz s’appelle Marshall, qu’on le voit dès le début, qu’il n’a ni mystère ni consistance, et qu’à la place de Marlon Brando, c’est cette vieille raclure de bidet de Mike Monty qui s’y colle. Le Colonel Marshall est donc un officier américain passé à l’ennemi, et devenu carrément chef des maquisards communistes, complotant contre les USA depuis la jungle et torturant les soldats ricains qui tombent de temps à autres entre ses mains. On ne voit pas trop pourquoi, dix ans après la guerre du Viêt-Nam, il y aurait encore des maquisards dans la jungle, surtout qu’il s’agit bel et bien de Viêt-Congs résidant dans des bases secrètes et pas de l’armée nord-vietnamienne. Quelques indices m’ont fait supposer qu’il pourrait s’agir, dans la VO, non pas de Viêt-Congs en retard d’un conflit, mais bien de Khmers rouges au Cambodge, ce qui serait déjà plus logique. En tout cas, la VF a évacué cette précision et il ne nous reste plus qu’à y voir le Viêt-Nam. Ce ne serait pas la première fois, d’ailleurs, que l’évocation du conflit du Cambodge dans un film philippin devienne celle de la guerre du Viêt-Nam dans la VF : c’était déjà le cas dans « Fireback », de Teddy Page.




Marshall se divertit à faire occire les soldats américains tombés entre ses mains. Ici, le malheureux est empalé sur des pointes en bois. Notons que les acteurs et figurants blancs ressemblent à des marines comme ma concierge à un petit rat de l'opéra.


Bref, le gouvernement américain décide de sévir contre le traître et d’envoyer à sa poursuite leur meilleur agent, Python Lang, interprété par ce bellâtre de Miles O’Keeffe. Super-soldat au rictus satisfait, Python Lang s’empresse de former un commando pour partir à l’attaque. Pour cela, il lui faut… LES MEILLEURS !


Le chef de la CIA des Philippines.


Et là, c’est le drame.

Car plutôt que d’aller chercher des mercenaires fin prêts au combat, Python va embringuer dans l’aventure trois vieilles badernes du Viêt-Nam tombées dans la débine et les trafics louches, et leur faire subir un stage de remise en état. Les trois individus en question sont interprétés par Kenneth Peerless, Anthony East et Jim Moss, de vieilles trognes occidentales présentes dans un grand nombre de films bis tournés aux Philippines dans les années 1980 (on peut voir l’un ou l’autre de ces jeunes premiers dans « Alien, la Créature des Abysses », « Tough Cop », « Zombie 4 : After Death » et bien d’autres merveilles).


Anthony East.


Kenneth Peerless.


Jim Moss.


Miles « Danger : Diabolik » O’Keeffe.


Ventrus, délabrés (seul Jim Moss semble avoir à peu près la forme), l’air largué de piliers de bistrot venant de perdre leur partie de 421, les trois winners sont l’une des équipes les plus comiques jamais vues dans un film d’action. Car, au terme de l’éprouvant entraînement imposé par Miles, les trois clodos auront l’air…de trois clodos toujours aussi largués qu’avant. Ce n’est pas pour autant la faute de notre héros, qui y met du sien : tir à balles réelles, enseignement des techniques ninja de combat, tout est fait pour transformer la bande d’épaves en machines de guerre invincibles. Ce qu’ils deviendront en théorie, à ceci près qu’on n’y croira pas un instant en voyant les zigomars.


Ces hommes vont sauver le monde libre !


Les Ninja Warriors.



A la fine équipe de mercenaires-ninjas s’adjoint le fils du Colonel Marshall, désireux de régler son Œdipe en vengeant l’honneur de la famille.


A compter de là, nos héros partent en mission. Ensuite ça se canarde. Ca se canarde. Ca se canarde. Et puis ça se canarde encore. Et enfin, ça se canarde. La seconde moitié du film n’est plus qu’un jeu de massacre, une boucherie continuelle, une sorte de concours de la meilleure façon de tuer son prochain. Il faudrait qu’un quelconque autiste tente de compter toutes les cartouches tirées dans le film, car on doit sans problème approcher les 275945897331564.


On passe d’une mise à mort de Viêt’ à une autre, en procédant périodiquement par grappes de dix : le compteur des victimes passe tranquillement à dix, vingt, cinquante, pour atteindre probablement les quatre cent en fin de métrage. Pas un seul temps mort dans un film qui comporte, dans sa seconde partie, extrêmement peu de dialogues : on dirait un exercice d’abrutissement hypnotique du spectateur. On reste bouche bée, puis béatement ravi devant ce déchaînement de bêtise et de sauvagerie brute, où l’absence totale de crédibilité le dispute à l’énormité.


Aucune stratégie militaire un tant soit peu crédible dans les combats qui se succèdent : nos héros semblent tout simplement invulnérables aux balles, tant les milliers de chargeurs déversés sur eux par les Viêts sont désespérément incapables de les atteindre. C’est sans doute grâce à leurs costumes de ninjas en treillis, que Miles est probablement allé acheter à Bruce Baron. Par contre, les balles tirées par nos amis touchent systématiquement leurs cibles. On n’en est pas encore à descendre les méchants par groupes de cinq avec une seule balle, comme Max Thayer dans « Commando Massacre », mais pas loin.


Devant ce carnage sans fin, il est possible de s’ennuyer, « American Force » étant pour tout dire assez répétitif. Mais la loufoquerie profonde de l’ensemble vaut le coup d’oeil, le spectacle des ces trois charlots habillés en sac à patates et massacrant des Viêts philippins à tour de bras atteignant parfois le niveau de n’importe quoi d’un sketch de Benny Hill.

Et Miles O’Keeffe dans tout ça ? Seul du commando à porter une cagoule (ce qui est pratique pour le remplacer par une doublure quand il y a une cascade à faire), notre ami est celui qui se foule le moins. Il tue sans doute à peine 10% de l’armée viêt’, reste tranquillement en retrait, pour daigner se farcir le grand méchant quand la quasi-totalité du boulot est terminée. Et tout ça en envoyant au casse-pipe trois vieux crevards qu’il aura auparavant entraînés en leur tirant dessus à balles réelles et en leur envoyant des grenades ! Miles O’Keeffe / Python Lang, c’est vraiment qu’un salaud de bâtard d’exploiteur.


S’il n’y a rien à dire sur une mise en scène merdique (ils s’y sont pourtant mis à deux !) et une photo pisseuse, on retiendra de l’interprétation le numéro assez drôle du gros barbu Kenneth Peerless (celui avec les cheveux longs) : s’il est, de très loin, le moins crédible du commando, il semble s’amuser sans arrière-pensées et son plaisir à faire n’importe quoi en jouant au petit soldat est assez communicatif. Peerless, un Canadien, eut par la suite une certaine notoriété sur le Web en animant le site d’informations « News from the edge », jusqu’à son décès en 2004. Un parcours assez original, qui montre bien la variété de la faune du cinéma bis philippin.


Quant à notre ami Miles, il déclara plus tard n’avoir jamais pris connaissance du script et n’avoir pas davantage vu le film. Devant son inquiétude face à un scénario quasi-inexistant, les auteurs l’avaient rassuré en disant «on mettra de l’action partout ! » Et en effet, Miles ne se souvenait que d’avoir cavalé dans la jungle en tuant des figurants philippins pendant tout le tournage.




Ajoutons que la teinture blonde de Mike Monty lui donne l'air d'un vieux gigolo de seconde zone reconverti en maquereau de bas étage.


« American Force » est donc à conseiller pour les amateurs de « shoot’em up » extrêmes et de bourrinades lobotomisées. On avertira simplement nos lecteurs sur son aspect fatalement répétitif : le film s’adresse sans nul doute aux nanardeurs les plus endurcis, amateurs de crétineries assez poussées et aux aficionados de la série Z philippine misérable. En tout cas, si vous souhaitez voir un mélange détonant et consternant d’ « Apocalypse Now », « Portés Disparus » et « American Warrior », les lamentables aventures de Python Lang et de ses trois acolytes débiles sont faites pour vous !

- Nikita -
Moyenne : 3.03 / 5
Nikita
NOTE
3/ 5
Kobal
NOTE
3.25/ 5
Rico
NOTE
3/ 5
MrKlaus
NOTE
2.5/ 5
Wallflowers
NOTE
2/ 5
LeRôdeur
NOTE
2/ 5
Peter Wonkley
NOTE
5/ 5
Jack Tillman
NOTE
3.5/ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation

Pas l’ombre d’un DVD français en vue pour ce truc, qui a fait l’objet d’au moins deux éditions VHS, chez "Vidéo Poche" et "Cobra Vidéo". Par contre, le film est sorti en DVD en Chine et en Afrique du Sud. Z’en ont de la chance !