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Joe D'Amato

(1ère publication de cette bio : 2005)

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(1936-1999)



Amis nanardeurs, nous allons maintenant vous parler de Joe D’Amato. Ou plutôt, nous allons vous parler de Steve Benson, Hugo Clevero, David Hills, Kevin Mancuso, Peter Newton, Michael Wotruba, Robert Yip, Zak Roberts, George Hudson, Federico Slonisko, Gerry Lively, Igor Horwess, et d’un nombre effarant d’autres noms. Car celui qui atteignit la célébrité en tant que nabab du nanar sous le nom de Joe D’Amato détient sans doute le record du plus grand nombre de pseudonymes utilisés (quoique Jesus Franco ou Godfrey Ho...). Joe D’Amato n’est que le nom d’emprunt le plus connu de Aristide Massacesi, l’homme qui incarna mieux que quiconque la démesure du cinéma bis italien : pour le meilleur (l’activité débordante, l’inventivité) et pour le pire (le mercantilisme, le trash sans limites ni vergogne), Joe D’Amato aura laissé une marque de fabrique unique dans l’histoire du cinéma en général et du nanar en particulier. S'il ne fut pas le plus doué des artisans du cinéma italien, il fut certainement le plus prolifique et le plus fou.

Un jeune Aristide qui s'offre une apparition sur ses premier westerns (photo déniché par l'excellent site anglophone spaghetti-western.net)

Aristide Massacesi naît le 15 décembre 1936 à Rome. Il baigne d’emblée dans le cinéma, où son père travaille comme chef-électricien. Dès son adolescence, Aristide commence à faire des petits boulots sur les tournages, en tant que caméraman, électricien, grouillot à tout faire et assembleur de lettres pour les génériques (!). S’affirmant comme un technicien efficace et dur à la tâche, dont le doigté et la compétence permettent d’économiser du matériel, il travaille aussi bien sur des séries B que sur des productions plus importantes tournées en Italie : on le retrouve ainsi assistant caméraman sur « La Mégère apprivoisée » de Franco Zeffirelli et « Le Mépris » de Jean-Luc Godard. S’occupant de plus en plus de photographie, il devient chef-opérateur à la fin des années 1960 et travaille sur des dizaines de films. Son habileté et sa rapidité sont particulièrement appréciées dans le milieu de la série B italienne. Il collabore régulièrement avec le réalisateur-producteur Demofilo Fidani, alias Miles Deem, spécialiste du film d’aventures à budget microscopique (« Karzan ») et du western-spaghetti miteux. Aristide Massacesi devient le chef-opérateur attitré de ses westerns, et fait également quelques apparitions en tant qu’acteur sous le pseudonyme d’Arizona Massachusset (Ha, ha !).




C’est en 1972 qu’Aristide va passer à la réalisation, pour les besoins du film « Planque-toi minable, Trinita arrive ! », western semi-parodique produit par Fidani et tourné en quatre jours dans le décor de western construit par Gordon Mitchell (qui joue également dans le film). Massacesi doute quelque peu de sa vocation de cinéaste et ne souhaite pas trop attacher son nom à ce pseudo-Trinita, afin d’éviter d’entacher sa réputation professionnelle. Aussi, l'oeuvre sera signée par l’associé de Fidani, Diego Spataro, qui emploie son pseudonyme habituel de Dick Spitfire. Le film est un nanar hallucinant, rempli de scènes loufoques, comme celle où un méchant fou se balade avec un guidon de mobylette fixé sur la tête de son cheval et demande qu'on lui fasse le plein de super. Mais Aristide Massacesi, enhardi par cette expérience, va enchaîner les tournages. Il continue d’user de divers pseudonymes, comme Michael Wotruba, gardant son vrai nom pour son travail « sérieux » de chef-opérateur ; il signe néanmoins de son patronyme le giallo « La Morte ha sorriso all’assassino », avec Klaus Kinski.



La filmographie du futur Joe D’Amato est alors assez complexe, du fait du nombre de ses pseudonymes et des conditions de travail de ce mercenaire du cinéma : films commencés par lui et terminés par quelqu’un d’autre, commencés par quelqu’un d’autre et terminés par lui, multiples co-réalisations non créditées, l’historien ne sait parfois plus trop où donner de la tête. Il s’illustre en réalisant toutes sortes de films d’exploitation (généralement des grivoiseries sur la lignée du « Décameron ») et de séries B (westerns, thrillers, films d’action). Massacesi affirme dès le début ce qui fera sa marque : une absence assez complète de style, compensée par une habileté technique à toute épreuve. Aristide est avant tout un artisan du cinéma comme d’autres sont des artisans boulangers : il sait tourner en un temps record et à coûts réduits des films avec un début, un milieu et une fin, destinés notamment au public populaire des salles de quartier mais présentables sur les marchés internationaux.


Une affiche qui louche pas mal du côté d'Indiana Jones...



Ce n’est qu’en 1975, pour les besoins du western « Bill Cormack, le fédéré », qu’Aristide Massacesi va prendre son pseudonyme de Joe D’Amato. Les cinéastes italo-américains (Coppola, Scorsese…) étant alors à la mode, un producteur lui suggère de prendre un nom dans ce genre. Aristide a trouvé ce qui sera sa « marque de fabrique ».




Il va ensuite trouver son filon le plus fructueux en bifurquant vers l’érotisme, qui finira à terme par représenter l’essentiel de sa production. "Avant, j'avais fait du western, puis on m'a appelé pour tourner ça", déclarait-il, "Je suis un professionnel, et je peux m'attaquer à tous les genres !" Bitto Albertini ayant tourné « Black Emanuelle en Afrique » avec la belle Laura Gemser (fausse noire, mais vraie indonésienne), Joe D’Amato souffle aussitôt l’actrice à son collègue pour lui faire tourner « Black Emanuelle en Orient », suivi de toute une série de films qui feront longtemps les belles soirées de certaines chaînes de télévision. Laura Gemser deviendra son actrice-fétiche et se reconvertira plus tard comme costumière, toujours sur les films de Joe. A noter que le film « Emmanuelle et Françoise » est co-réalisé par Joe D'Amato avec l'illustre Bruno Mattei, ce qui constitue quand même une sacrée dream team !


Joe et sa muse (et Gabriele Tinti en arrière plan)...

 

 

 

 

 

 



L’érotisme, soft puis hard, va faire la fortune professionnelle de Joe D’Amato, qui sait flairer les bonnes affaires. Il passera au porno hard dès que la censure italienne le permettra. Notre homme, faute d’être un artiste (de son propre aveu), est en effet un commerçant madré qui fait du cinéma avec une mentalité de marchand de tapis et serait prêt à montrer n’importe quoi dans ses films pourvu que ce soit vendeur. Joe, devenu avec le temps réalisateur-producteur, ne se montre pas toujours scrupuleux : il bidouille le montage des « Plaisirs d’Hélène », rajoutant plus de scènes de sexe que prévu, ce qui fait que le malheureux Richard Harrison se retrouve, selon ses dires, héros d’un quasi-porno à l’insu de son plein gré. Anna Bergman, la fille d’Ingmar, désirant faire du cinéma, Joe D’Amato l’engage comme actrice et réalisatrice (c’est en fait lui qui tourne le film) de « Blue paradise », plagiat érotique du « Lagon bleu ».




Outre les films érotiques qu’il usine désormais au kilomètre, le rusé Joe D’Amato s’attaque à toutes les modes du cinéma bis, montrant davantage d’opportunisme que Godfrey Ho et Bruno Mattei réunis. Il combine l’érotisme et l’horreur avec « La Nuit fantastique des mort-vivants » dont le titre italien (« Le notti erotiche dei morti viventi », soit Les Nuits érotiques des mort-vivants) est un peu plus explicite. Il surfe sur la vogue des films de cannibales en dirigeant Laura Gemser dans « Emanuelle chez les cannibales ». Le succès de scandale du « Caligula », semi-porno de Tinto Brass, lui inspire un « Caligula, la véritable histoire ». « Conan le barbare » est à peine sorti que notre homme se lance dans l’heroic-fantasy avec « Ator », interprété par le culturiste Miles O’Keeffe. La mode du post-apocalyptique débarque en force ? Joe D’Amato sort « Le Gladiateur du futur » et « 2020 Texas gladiators », deux fleurons du genre (le deuxième étant co-réalisé par son vieux complice George Eastman). Autant de produits réalisés à l’économie et délicieusement kitschs, qui imposent la figure de Joe D’Amato comme l’un des principaux et plus délirants artisans du cinéma bis italien. Qu'il s'agisse de ses érotiques ou de ses films "tout public", les films de Joe se vendent dans le monde entier, et son nom devient un véritable label.




C'est avec le film d’horreur gore que Joe D’Amato se montre le plus inspiré, ce qui lui vaudra chez certains le surnom hilaro-poilant de « D’Amato ketchup ». Sa mise en scène, habituellement foutraque, se fait parfois plus élégante dans les films d'épouvante, pour créer des ambiances morbides et malsaines. "Blue Holocaust" est même une jolie réussite dans les limites du genre, et constitue sans aucun doute son meilleur film. Il fait quelque bruit avec « Anthropophagous », où les méfaits d’un cannibale fou interprété par l’inquiétant George Eastman sont prétextes à une succession de scènes cra-cra où l’on étale tripes et boyaux. Le flair de Joe l’amène à faire quelques belles découvertes : c’est ainsi qu’il produit le thriller « Bloody bird », dont il confie la réalisation au jeune comédien Michele Soavi. Le résultat sera l’une des meilleures réussites du cinéma bis italien des années 80.


George Eastman, monstre anthropophage assez chargé !



L’industrie du cinéma italien décline cependant, et le film de genre n’en a plus pour longtemps. Joe D’Amato essaie bien de revenir à l’heroic-fantasy (« L'Epée du Saint-Graal », nouvelle suite d'« Ator », sans Miles O'Keeffe) et au film d’horreur (« Return from death - Frankenstein 2000 ») mais le marché s’assèche. Toute la fin de carrière de Joe D’Amato va désormais être consacrée à l’érotisme, et plus précisément au porno hard, où sa compétence technique s’exprime pleinement dans des tournages ultra-rapides. Tournant à une vitesse folle (jusqu’à 100 films dans les années 90 !), Joe devient l’un des maîtres du X italien, metteur en scène régulier de vedettes comme Selen et Rocco Siffredi. Il n’aura plus l’occasion de revenir à un autre genre de cinéma : le 23 janvier 1999, l’hyperactif Joe D’Amato meurt à Rome d’un infarctus.




Aristide Massacesi / Joe D’Amato, maquignon intelligent et fabuleusement actif, laisse derrière lui une filmographie dont la qualité peut donner matière à discussion mais qui restera comme un témoignage de la prodigieuse vitalité qui fut celle du cinéma italien. Sans quelqu’un comme Joe D’Amato, le bis italien des années 70 et 80 aurait certainement manqué d’un brin supplémentaire de folie, et le monde du nanar d’une partie de son charme.




Icono (certains sites ont hélas disparu depuis) :
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- Nikita -

Films chroniqués

Filmographie

Réalisateur :

1972 – Planque–toi minable, Trinita arrive !
1972 – Sollazzevoli storie di mogli gaudenti e mariti penitenti : Decameron n° 69
1972 – Le Colt était son dieu
1972 – Un bounty killer a Trinità
1972 – Novelle licenziose di vergini vogliose
1973 – La Morte ha sorriso all’assassino
1973 – Les vierges de la pleine lune (Il plenilunio delle vergini) co-réalisateur non-crédité
1973 – Fra’Tazio da Velletri
1973 – Canterbury No. 2 – nuove storie d'amore del '300
1973 – Pugni, pirati e karaté
1973 – L’Enfer des héros (Eroi all'inferno)
1974 – La Révolte des gladiatrices
1974 – Bill Cormack le fédéré
1976 – Black Emanuelle en Orient / La Possédée du vice (Emanuelle nera: Orient reportage)
1976 – Voluptueuse Laura (Eva nera)
1976 – Voto di castità
1976 – Emmanuelle et Françoise (Emanuelle e Françoise le sorelline)
1977 – Black Emanuelle en Amérique
1977 – Black Emanuelle autour du monde
1977 – Emanuelle chez les cannibales / Emanuelle et les derniers cannibales / Viol sous les tropiques / Bloody Track
1977 – Le notti porno nel mondo
1977 – Le gynécologue de ces dames (Il ginecologo della mutua)
1978 – Emanuelle et les filles de Madame Claude
1978 – Le notti pazze della Amanda Lear
1978 – Le notti porno nel mondo n°2
1978 – Emanuelle e le notti porno nel mondo n°2
1978 – Et mourir... de plaisir / Mourir de plaisir (Papaya dei caraibi)
1978 – Durs à mourir / Hard to kill
1979 – Blue holocaust / Folie sanglante / Bio omega
1979 – The Hot life of Al Capone
1980 – Black sex
1980 – Anthropophagous
1980 – Erotic love
1980 – La Nuit fantastique des mort–vivants
1980 – Super climax
1980 – Blue paradise
1980 – Les Plaisirs d’Hélène
1980 – Hard sensations
1980 – Symphonie érotique
1981 – Porno Holocaust
1981 – Bocca golosa
1981 – Sesso acerbo
1981 – Caldo profumo di vergine
1981 – La voglia
1981 – Una vergina per l’impero romano
1981 – Messalina orgasmo imperiale
1981 – Caligula la véritable histoire
1982 – Delizie erotiche
1982 – Ator
1982 – Etroite et humide
1982 – Horrible
1982 – Orgasmo esotico
1982 – 2020 Texas gladiators
1983 – Les Déchaînements pervers de Manuela
1983 – Le Gladiateur du futur
1984 – L’Alcôve
1984 – Ator 2
1985 – The Pleasure
1986 – Midnight gigolo
1986 – Onze jours, onze nuits
1986 – On l'appelle soeur désir
1986 – Lussuria
1987 – Onze jours onze nuits 3
1987 – Killing Birds / L’Attaque des mort–vivants
1987 – Delizia
1988 – Onze jours onze nuits 2
1988 – Dirty love
1989 – Squali
1989 – Love in Hong Kong
1989 – The loves of a Wall street woman
1989 – Deep blood
1989 – Blue angel café
1989 – Any time, any play
1990 – Onze jours, onze nuits 4
1990 – L’Epée du Saint–Graal / Ator 3
1990 – Passion’s flower
1990 – Passi caldi
1991 – Return from death – Frankenstein 2000
1991 – Ossessione fatale
1991 – La donna di una sera
1991 – Il diavolo nella carne
1992 – Una tenera storia
1992 – Passion
1992 – The last fight
1992 – Francesca’s castle
1993 – I racconti della camera rossa
1993 – Rosa
1993 – La Maîtresse de Saigon
1993 – Chinese kamasutra
1993 – Aladin
1994 – China and sex
1994 – Désirs secrets
1994 – Tarzan x
1994 – Fantasmi al castello
1994 – Casalighe p..gli stalloni
1995 – 120 days of anal
1995 – Some like it hard
1995 – L’Auberge des plaisirs
1995 – Marco Polo la storia mai raccontata
1995 – Homo erectus / Jurassic Pork
1995 – Gangland bangers
1995 – Midnight obsession
1995 – The erotic adventures of Aladdin X
1995 – Docteur Rocco et Mister Sodo
1995 – Don Salvatore l’ultimo siciliano
1995 – Il barone Von Masoch
1995 – Le bambole del führer
1995 – Amadeus Mozart
1995 – Adolescenza
1996 – Sea sex and fun
1996 – Wild east
1996 – Virility
1996 – To girl
1996 – Thief of love
1996 – Robin Hood the sex legend
1996 – Une fille de la campagne
1996 – Anal instinct / Primal instinct
1996 – Penitenziario femminile
1996 – Il Monaco
1996 – Messalina
1996 – Kamasutra
1996 – The Joy club
1996 – Giulietta e Romeo
1996 – Antoine et Cléopâtre
1996 – Anal palace
1996 – Amore e psiche
1996 – All grown up
1996 – A cena con le amiche
1997 – The forbidden diary of the two princesses
1997 – Anal perversions of Lolita
1997 – Raw and naked
1997 – Strip–tease
1997 – Le stagioni di Bel
1997 – Sodoma & Gomorra
1997 – Rudolph Valentino
1997 – Selen, l’affaire de la jungle
1997 – Peccati di gola
1997 – Othello 2000
1997 – Fatal seduction
1997 – Die hure des panthers
1997 – Les Travaux sexuels d’Hercule
1997 – Hamlet
1997 – Goya and the naked Maja
1997 – Caligula : follia del potere
1997 – All the president’s women
1997 – Afrodite : la dea dell’amore
1998 – Showgirl
1998 – Tarzhard
1998 – Selen dans l’île des trésors
1998 – Samson in the amazon’s land
1998 – Fièvres
1998 – Rocco et les sex mercenaires
1998 – Prima e dopo la cura
1998 – La Virginité perdue
1998 – La Maschera diferro
1998 – Ladro d’amore
1998 – Initiation of Belle
1998 – Eternels désirs
1998 – Experiences
1998 – Elixir
1998 – Donna flor
1998 – Crema batida
1998 – Le combat des chefs
1998 – Cop sucker
1998 – Ulysses
1998 – Anima ribelle
1998 – Capricci anali
1998 – The Flying doctors
1998 – Prague exposed
1999 – Rocco et les sex mercenaires 2
1999 – Voyages sexuels d’Eva à travers le temps
1999 – Torero
1999 – Experiencias eroticas
1999 – Calamity Jane
1999 – Sperma spende

Producteur uniquement :

1975 – Emmanuelle et Françoise (Emanuelle e Françoise le sorelline)
1987 – Warrior Queen
1987 – Interzone
1987 – Bloody Bird (Deliria)
1988 – La Maison du Cauchemar (La Casa 3)
1988 – Démoniaque présence (La Casa 4 : Witchcraft)
1989 – Hitcher 2 / Hitcher in the Dark (Paura nel buio)
1990 – House 5 (La Casa 5)
1990 – Troll 2
1990 – Hot Steps : passi caldi
1991 – Le Porte del silenzio
1999 – Magic Eros