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Les Amazones du temple d'or


Les Amazones du temple d'or

Titre original : Les Amazones du temple d'or

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Jesus Franco, , Alain Payet

Producteur(s) :Marius Lesoeur

Année : 1986

Nationalité : France / Espagne

Durée : 1h26

Genre : Les ménagères du temple en plomb

Acteurs principaux :Olivier Mathot, Stanley Kapoul, Jean-René Gossart, William Berger, Lina Romay, Analia Ivars, Françoise Blanchard, Jean-Claude Lerner

La Team Nanarland
NOTE
3.5/ 5


Chambre correctionnelle de Bolbicquette, juillet 2006
Le ministère public contre MM. Marius et Daniel Lesoeur, propriétaires de la société Eurociné, MM. Jesus Franco et Alain Payet, cinéastes, pour atteinte aux bonnes mœurs cinématographiques au sujet du film « Les Amazones du Temple d’Or ». L’accusation sera représentée par le procureur Nikita du barreau de Paris et la défense assurée par maître Rico du barreau de Grenoble. Le décès de M. Lesoeur père n’a pas été retenu comme motif suffisant pour lui éviter le procès.
La parole est à l’accusation.
Le procureur Nikita se lève, lance un regard froid et inquisiteur aux prévenus dans le box des accusés puis, d’une voix impérieuse :

« Vous avez aimé "Les Mines du Roi Salomon" ? "Les Aventuriers de l’arche perdue" ? Vous adorez les bons films d’aventure parcourus du souffle de l’épopée ? Passez votre chemin, messieurs et mesdames les jurés, parce que là, ce n’est pas ça du tout.


Une grande aventure de proximité.


L’aventure exotique vue par Eurociné, la société de production des Lesoeur père et fils (je dirais même « le gang Lesoeur »), c’est du spectacle de patronage anémique, interprété par des figurant(e)s pris de boisson et des acteurs confondant expressivité et spasmes nerveux. Un brouillon de film ni fait ni à faire, bidouillé de bric et de broc, dont l’intense pauvreté, concrétisée par des images misérablement incohérentes, finit par susciter chez le spectateur une douleur de chaque instant. Il s’agit-là d’un véritable attentat contre les cinéphiles de bon goût, commis par des accusés au lourd passif !


« Les Amazones du temple d’or » sont une sorte de « 2 en 1 » à la manière Eurociné qui, pour ce qui est de l’absurdité, n’en cède qu’à leur précédent forfait, « La Pension des Surdoués ». S’agissant du délit dit « 2 en 1 », je vous invite pour en connaître toute la subtilité à consulter le casier judiciaire de M. Godfrey Ho. Mais examinons tout de même celui qui nous occupe. Prenons tout d’abord un film tourné en Espagne par Jesus Franco, « Tundra y el templo del sol ». Marius et Daniel Lesoeur, devant le produit fini, le trouvent probablement insuffisamment attractif, et décident de le rallonger. Pas question cependant d’envoyer à nouveau une équipe en Espagne : c’est l’illustre Alain Payet (auteur inspiré de « L’Emir préfère les blondes », « Les Enfonceuses expertes » et « Adolescentes à dépuceler ») qui se charge de tourner des scènes de raccord au bois de Vincennes et dans la forêt de Fontainebleau. Disposant d’un produit initial extrêmement médiocre, la famille Lesoeur le transcende en y rajoutant des scènes au-delà de toute description : prendre l’un des plus mauvais films du monde et le rendre encore plus nul, c’est cela, la « méthode » Eurociné, mesdames et messieurs les jurés !



Une tension insoutenable.


Détaillons, si vous le voulez bien, l’action du film : le récit se situe dans les tréfonds de l’Afrique noire. Un missionnaire et son épouse sont assassinés par la cruelle tribu d’amazones blanches qui terrorisent la région : leur fille Liana, rescapée de la tuerie, grandit dans la jungle et devient une sorte de Tarzane vêtue de peaux de bêtes diverses et variées (on reconnaît une queue de raton-laveur, probablement achetée à des trafiquants interlopes par une production sans scrupules) et impeccablement permanentée, qui fait risette aux éléphants et se balade accrochée à des branchettes camouflées en lianes.


Joan Virly, de son vrai nom Analia Ivars, alias "mes nichons jouent pour moi". On retrouve cette fidèle de Franco dans « Lust for Frankenstein »).


Dix ans passent, et la relève des missionnaires arrive enfin, incarnée par Olivier Mathot (acteur présent, pour une raison mystérieuse, dans la majorité des films Eurociné).


Olivier Mathot, l'homme à une expression et demie.


Mathot apprend à Liana que ses parents ont été tués par les Amazones, ce qu’elle aurait pu déduire elle-même car elle a été témoin de leur mort. Le père de Liana avait découvert la mine d’or des Amazones : sachant que lesdites Amazones ont construit un temple en or massif, l’information selon laquelle elles disposaient de solides ressources aurifères ne devait pas être trop méconnue dans la jungle, on ne voit donc pas trop ce qui les a poussées à préserver leur secret. Bref.


Le temple d'or.



La chef des Amazones.


Il convient d’étudier la technique du forfait commis. Concernant la répartition des scènes du film, précisons que celles tournées en France par Alain Payet et mettant en scène Olivier Mathot et les missionnaires se situent essentiellement durant les vingt premières minutes du film. Les autres scènes, tournées par Jesus Franco dans un parc naturel en Espagne, occupant environ 80% du métrage. Olivier Mathot semble devoir être un personnage important du récit mais, passée sa révélation à la manque, on ne le reverra plus : et pour cause, il n’est quasiment pas dans le même film ! La jonction entre les deux parties est réalisée grâce à la présence de l’actrice Analia Ivars (Liana).


Liana part donc à l’aventure, dans le but de venger ses parents. Elle rencontrera en chemin divers personnages d’explorateurs d’une compétence à géométrie variable qui seront amenés à l’aider dans sa quête. Et, surtout, Koukou. Qui est Koukou, me demanderez-vous ? C’est le sorcier d’une tribu locale, qui se montrera d’abord hostile, avant de devenir mystérieusement gentil et de se muer en un sidekick comique d’un grotesque achevé.



Koukou, c’est d’abord un acteur : Stanley Kapoul (ou Capoul), dont le teint de peau nettement plus clair que celui des autres hommes de la tribu fait parfois ressembler à un blanc qui aurait déboulé, pris de boisson, dans une tribu africaine dont il aurait endossé un costume typique afin de tourner lourdement en dérision les autochtones. Se livrant à une agitation relevant de la danse de Saint-Guy, s’exprimant en petit-nègre même pas digne de « Tintin au Congo », Stanley Kapoul transforme toutes les scènes où il apparaît en numéro de music-hall digne du sketch « Bamboula et Kono chasseurs d’éléphants » de la revue coloniale de 1912. Apparemment convaincu du talent de son comédien, les auteurs lâchent complètement la bride au sieur Kapoul, qui massacre la totalité du film de son cabotinage, amplifiant de manière démesurée le sentiment d’accablement qui envahit le spectateur à chaque minute de film. De là à considérer que le gang Eurociné vise à infliger délibérément au spectateur une propagande raciste dont même les fantaisistes de la fête des Bleu-Blanc-Rouge ne veulent plus, il n’y a qu’un pas, que je vous invite à franchir, mesdames et messieurs les jurés !


Là dis-donc, présentement, patwon !


Si l’on excepte l’interprétation accablante, la post-synchronisation hasardeuse et les dialogues rédigés sous l’emprise de la boisson, le principal élément à charge des « Amazones du temple d’or », est l’indigence totale, aussi bien financière qu’artistique, qui rejaillit de chaque image. Figurants « indigènes » camouflant mal leur hilarité, cadrages ineptes resserrés au maximum pour éviter de trop montrer le décor, photo surexposée : toutes les tares techniques du mauvais cinéma bis semblent réunies pour anéantir toute espèce de prétention à la crédibilité du film. Sommet du pompon, on aperçoit même une voiture au loin dans la savane : inconvénient mineur du tournage dans un parc naturel à proximité d’une route nationale. Scènes débiles et âneries techniques se succèdent à un rythme suffisamment soutenu pour que l’on reste bouche bée devant un tel étalage d’incompétence et de jemenfoutisme.


Autre clou du film, les Amazones elles-mêmes. Interprétées dans les scènes tournées par Alain Payet par de vagues laiderons embarrassées par leur tenue topless, elles gagnent dans les scènes de Franco le privilège d’être dirigées par une cheftaine borgne, sorte d’Ilsa ibérique aux fesses molles, et par un grand sorcier dont le rôle consiste à les féconder toutes pour garantir la pérennité de la tribu. A la propagande raciste s’ajoute un machisme insidieux passible, depuis les dernières réformes de la Gauche Plurielle, de six mois de travaux d’intérêt général et 20 000 € d’amende !



Mesdames, vous avez les fesses qui tombent ? Utilisez la crème anti-cellulite "Amazon's", de Lierac !


Dans le rôle d’Uruck, le sorcier libidineux, William Berger bat tout simplement des records de ridicule, cabotinant frénétiquement sous une toque de fourrure qui a dû contribuer à lui faire bouillir la matière grise au soleil de l’Espagne.


William Berger, vétéran du cinéma bis, ici au nadir de sa carrière.


Croulant sous un intense ridicule de la première à la dernière image, « Les Amazones du temple d’or » fait figure de véritable OVNI. Tournée en 1986, en plein boom du cinéma d’aventures à grand spectacle, l’œuvre semble témoigner d’une totale inconscience de la part de ses auteurs et financiers, dont on hésite à croire sérieusement que l’idée de la viabilité du projet les ait seulement effleurés. Comment, dans les années 1980, pouvait-on espérer faire gober au public un spectacle qui aurait déjà paru risible au temps de « Comtesse Hachisch » ? Les Lesoeur étaient-ils des escrocs à l’assurance qui misaient sur l’échec de leurs films pour rentrer dans leurs frais ? Jesus Franco était-il à jeun sur le tournage du film ? Alain Payet avait-il demandé une autorisation préfectorale pour tourner au bois de Vincennes ? Autant de mystères qui nous saisissent devant un tel diamant brut de nanardise et de forfaiture.


Le barbu Antonio Mayans, alias Robert Foster, présent dans un grand nombre de films Eurociné.


Malgré un rythme parfois indolent, « Les Amazones du temple d’or » sont suffisamment intenses pour constituer une authentique agression contre tout spectateur au bon goût un tant soit peu développé. Rarement l’aventure à la Indiana Jones aura connu d’avatar d’une débilité aussi profonde et violente !
C’est la raison pour laquelle je requiers la condamnation des ces odieux personnages pour crime contre le cinéma, l’ouverture d’un fond d’indemnisation pour les gens qui par mégarde auraient pu voir ce film et l’interdiction pour tous ces personnages de s’approcher d’une caméra à moins de cinquante mètres. Et encore ils ont de la chance que les socialos-communistes aient supprimé la peine de mort ! »
Brouhaha dans la salle,
- La parole est à la défense, maître Rico.
Maître Rico se lève, esquisse un sourire rassurant à l’attention les accusés, lisse sa robe et entame sa plaidoirie.

« Monsieur le président, mesdames et messieurs les jurés. L’accusation s'est complue à dépeindre mes clients sous le jour le plus sombre par un argumentaire des plus tendancieux. Mais de quoi accuse t-on au juste mes clients ? D'avoir fait un mauvais film d'Amazones ? Mais peut-on me citer un seul BON film d'Amazones ?! Ce ne sont certainement pas les déplorables affaires « Les Amazones font l'Amour et la Guerre » ou « Supermen Contre Amazones » qui viendront prouver le contraire. Non, cela n'aura trompé personne, les véritables motifs de cette attaque en règle contre l'oeuvre de mes clients, sont uniquement politiques. Oui ! N'ayons pas peur des mots. Jusqu'à sa mort, l'institution cinématographique derrière laquelle se profile la main sinistre de la censure étatique s'est ingénié à vouloir faire taire les gens comme Marius Lesoeur. Marius Lesoeur dérange, Marius Lesoeur fait peur. Car Marius Lesoeur ose évoquer des sujets qui vont à contre courant des consensus politiques actuels. Faut-il rappeler « La Pension des Surdoués » et son ode vibrante aux services publics postaux en ses temps de privatisation rampante, la douloureuse question des enfants nés pendant la collaboration dans son injustement vilipendé « Le Lac des Morts-Vivants » ?
Mesdames et messieurs les jurés nous avons ici d’authentiques visionnaires qui, sous couvert d’un film d’aventures grand public, n’hésitent pas à lancer un cri d’alarme sur la situation actuelle de l’Afrique. Ces Amazones à l’inquiétante blondeur exploitant une mine d’or au fin fond de la jungle, tuant tout ceux qui osent s’approcher de leur royaume… Mais il faut être aveugle pour ne pas voir là la brillante métaphore des sociétés occidentales exploitant sans vergogne les matières premières du continent noir et n’hésitant pas à user des pires violences envers les populations locales qui pourraient s’opposer à elles. J’aurai l’occasion de revenir plus avant sur ce point au cours de ma plaidoirie, mais reprenons tout d’abord point par point l’argumentaire fallacieux du ministère public.


Un DVD qui survend légèrement le film.


On reproche tout d’abord à mes clients d’avoir monté ce film à partir de « Tundra y el templo del sol » de Jesus Franco. Mais c’est tout à leur honneur. Jesus Franco est un cinéaste qui tourne beaucoup, jusqu’à 8 films par an. Certains diront bâclage ! Moi je réponds générosité ! Mr Franco a un véritable amour du public et s’emploie à lui donner un maximum de films là où un Stanley Kubrick met mesquinement sept ans à en tourner un seul pour, soi disant, le peaufiner. Evidemment quand on tourne beaucoup on n’a pas toujours le temps de veiller sur tous les détails d'une oeuvre, c’est pourquoi les Lesoeur, guidés par la simple volonté de rendre service à leur ami Franco, ont décidé de rajouter une ou deux scènes, histoire de compléter l’ensemble. Noble geste en vérité. D’où l’appel à Alain Payet.
Et là, bien entendu, on déterre le passé. Oui, Alain Payet a tourné quelques films pornographiques tels « Nadia la jouisseuse », « Scrabble partouze » ou « Les Enfonceuses Expertes ». Qu’il est facile pour certains esprits étroits d’enfermer aussitôt cet homme sous l’infâmante étiquette de pornocrate et de ne pas voir qu’il est aussi l’estimable auteur de « Train Spécial pour Hitler », où il prend une attitude courageuse en dénonçant les dérives du nazisme dès 1977, ou « L'Emir préfère les blondes » avec Paul Préboist et Katia Tchenko où il n’hésite pas à s’attaquer à l’épineuse question du commerce pétrolier ! Ne doit-on pas accorder à Mr Payet une deuxième chance de devenir un cinéaste mainstream ? Il faudrait avoir le cœur sec pour lui refuser pareille rédemption. Souvenons-nous de Jean-Marie Pallardy qui a lui aussi commencé dans le film pour adultes avant de nous offrir quelques chefs-d’œuvre honteusement plagiés par Clint Eastwood ou Quentin Tarantino.


Le dos du DVD allemand qui montre bien ce que l'amateur peut espérer trouver dans ce film.


Ensuite on prétend que le film censé se passer en Afrique est tourné en Espagne et dans la région parisienne. Oh mais bien sûr, la facilité aurait été d’aller tourner un film de jungle dans la jungle. Mais les Lesoeur ne sont pas gens à s’adonner à la facilité. Ce sont des producteurs avec une déontologie. La véritable magie du cinéma, c’est l’illusion. Là où un Spielberg, cinéaste bien peu imaginatif, filme le désert au Maroc et la jungle au Costa Rica, les Lesoeur choisissent de recomposer la forêt vierge en Ile de France. Car enfin avouons-le, pourquoi aller chercher à l’autre bout du monde ce que notre beau pays peut nous offrir en son sein ? En matière de luxuriance, le bois de Vincennes vaut bien les Philippines ! Préférer l’enracinement local à la délocalisation, c’est là une réaction de patriotes. Si la France est la première destination touristique mondiale, c’est qu’elle a su mettre en avant ses trésors et les Lesoeur, en vrais Français, ne font pas autrement. Des touristes du monde entier peuvent venir en Ile de France admirer les lieux enchanteurs du tournage. Bien géré, cela peut générer des revenus non négligeables pour toute la région ! Dans une zone économiquement sinistrée comme l’Est parisien, ce sont des emplois en nombre, cela n’est pas à dédaigner !


Parlons donc des acteurs, que le procureur se plait à brocarder. Analia Ivars ou Joan Virly, comme elle aime se faire appeler dans ce film, illumine celui-ci de son charme et de sa présence. N’est-elle pas ravissante alors qu’elle joue dans une mare avec son éléphant ? N’a-t-elle pas l’air d’une walkyrie farouche et décidée lorsqu’elle part venger la mort de ses parents ? On lui reproche d’avoir l’air permanentée tout au long du film, mais vivre dans la jungle empêche t-il d’être soignée ? De plus, par le jeu subtil du costume composé avec soin à partir de véritables animaux morts tirés des stock-shots des films de Bruno Mattei, elle est les nichons à l’air les trois quarts du temps. Non vraiment il faudrait être aveugle ou singulièrement rétif au charme féminin pour ne pas être enthousiasmé par l’interprétation de cette fidèle de Franco qui ne tourna quasiment que pour lui.


Quant à Olivier Mathot, véritable statue du commandeur des films de chez Eurociné, il a le bon goût de rester d’une sobriété exemplaire là où son rôle de prêtre débonnaire aurait pu lui permettre d’en faire trop. Non messieurs, Olivier Mathot n'est pas monolithique : il intériorise, ce n’est pas pareil.


Et Stanley Kapoul dans le rôle du sémillant Koukou ? Bien sûr on peut, si on est tatillon, reprocher à cet honorable comédien une légère tendance à en faire un peu trop. Et pourtant, son rôle est ici plus qu’indispensable, je dirais même vital : il occupe l’emploi classique du sidekick transformant par ses pitreries bon enfant le film en un spectacle familial. Et puis qu’est-ce qu’un sorcier tribal dans ces sociétés primitives sinon une sorte de docteur, un homme-médecine ? Il s’inscrit dès lors dans une tradition littéraire ancienne : le médecin tourné en ridicule. Le pédant et grotesque Koukou qui s’exprime dans un dialecte incompréhensible, qui croit tout savoir mais ne ramasse au final que des coups de pieds aux fesses, n’est autre que la figure du Diafoirus prétentieux et ridicule lançant son latin de cuisine pour camoufler son incompétence. Ce que le béotien prend pour de l’humour ronge-tête n’est en fait qu’un hommage respectueux aux grands maîtres de la littérature ! Si vous condamnez Jesus Franco, il vous faut condamner Molière !


Quant à Jean-René Gossart qui interprète le père de Liana, son jeu est un vibrant et pédagogique témoignage sur les ravages de l’alcoolisme. Quiconque l’a vu jouer après que son personnage ait englouti une bouteille de whisky, ne touchera plus jamais à une goutte d’alcool de sa vie de peur de tomber dans les mêmes travers.




Les Amazones menées pour la partie Payet par une Françoise Blanchard à cheval, qui intériorise beaucoup elle aussi, et dans la partie Franco par l’Espagnole Eva Leon, qui elle n’intériorise pas du tout, n’ont pas l’heur de plaire au procureur. Déjà, remarque perfidement celui-ci, elles sont topless quasiment tout le temps. Mais dois-je rappeler que dans la jungle il fait chaud et qu’on a tendance à n’y porter que peu de vêtements ? Ce que l’on pourrait prendre pour du voyeurisme n’est qu’un strict respect de la réalité objective de la vie dans la jungle. Quant au jeu de William Berger, il se calque sur le simple fait que dans la plupart des société primitives les sorciers s‘adonnent à des transes rituelles sous l’emprise de drogues hallucinogènes. Là encore, la volonté de ne pas tromper le spectateur, en collant au plus près de la vérité du terrain, motive cette vision des choses qui ne peut choquer que le naïf empêtré dans une vision petite-bourgeoise du monde.



On nous parle aussi de cadrages hasardeux, de photo surexposée, de voiture apparaissant dans le champ. Moi je réponds « cinéma vérité », où l’urgence d’un monde ravagé par l’avidité humaine est montré par un jaillissement d’images brutes, où la caméra est au plus près des corps, non pas pour cacher je ne sais quelle indigence des décors mais pour saisir dans l’instant la frénésie de l’or qui transforme de frêles jeunes filles en des guerrières sanguinaires. Non, mesdames et messieurs, le monde n’est pas beau… alors pourquoi le film le serait-il ?
Enfin attardons-nous un instant sur la plus grotesque de ces accusations : le film véhiculerait une vision colonialiste de l’Afrique par des clichés nauséeux incarnés par le pittoresque personnage du docteur Koukou et par quelques figurants noirs peu motivés (d’où aussi l’idée géniale de tourner dans l’Est parisien qui concentre en effet pas mal d’indigènes de couleur dont le manque général de motivation est illustrée par la cocasse pratique qui consiste à mettre le feu à quelques voitures du voisinage pour passer le temps). Mais à y regarder de plus près, si ce personnage est interprété par un blanc, n’est-ce pas par respect pour le peuple africain à qui on évite d’avoir à interpréter un personnage aussi chargé ? D’ailleurs tous les personnages ridicules ou méchants sont blancs dans ce film, et le personnage du domestique noir a bien raison de faire les yeux ronds et de prendre des mines effrayées quand on voit la cruauté des Amazones. Ce n’est qu’une juste mise en garde qu’énoncent mes clients, en véritables humanistes désintéressés : les Africains sont des gens bien gentils, spoliés de leurs richesses par des Occidentaux sans scrupules, alcooliques, vénaux et exhibitionnistes !


Voilà les raisons pour lesquelles, monsieur le président, mesdames et messieurs les jurés, ce film devrait être diffusé dans toutes les écoles pour l’édification des masses. Loin de condamner ses auteurs, vous les acquitterez et les féliciterez pour nous avoir offert ce beau moment de cinéma puissant et sincère.
Et plus encore, c’est sur le souvenir de cet esthète méconnu qu’est Marius Lesoeur que je voudrais m’arrêter. Plus que tout autre, cet homme a porté la passion d’un véritable cinéma indépendant, n’hésitant pas à traiter de sujets forts qui faisaient peur aux autres producteurs, tels que les zombis nazis ou les hommes singes violeurs invisibles. Malgré les obstacles et les critiques des esprits académiques les plus étriqués, il a su rester droit pour nous offrir un catalogue de films qui font honneur à l’esprit de créativité française, que dis-je, au génie français !
C'est pourquoi à la mémoire de ce grand visionnaire injustement traîné dans la boue, je demande pour mes clients non seulement l'acquittement mais la légion d'honneur et le transfert des cendres de Marius Lesoeur au Panthéon ! »
(Pour connaître le verdict, cliquez sur l'onglet "Rareté" de cette chronique)

- La Team Nanarland -
Moyenne : 3.33 / 5
La Team Nanarland
NOTE
3.5/ 5
Rico
NOTE
2.5/ 5
Jack Tillman
NOTE
4/ 5

Cote de rareté - 2/ Trouvable

Barème de notation
Le jury rentre dans la salle
« Après délibération, les accusés ont été jugés coupables du crime de nanardise sans préméditation, même si a été retenue la circonstance atténuante du fait qu'ils nous ont quand même bien fait rire.
C'est pourquoi nous demandons à ce que toutes les cassettes "RCV" du film soient réunies pour être brûlées en place publique dans le but de préserver les spectateurs.
Par contre, il convient de les extrader aux Etats-Unis puis en Allemagne où ils sont attendus par la justice depuis que leur film est sorti en Blu-ray chez "MVD Entertainment" en multizone avec VF mais aussi en DVD respectivement chez "New Entertainment World" (avec des scènes alternatives !) et "Shriek Show". »