Recherche...

Thunder of Gigantic Serpent


Thunder of Gigantic Serpent

Titre original : Thunder of Gigantic Serpent

Titre(s) alternatif(s) :Terror Serpent, Daai se wong

Réalisateur(s) :Charles Lee

Année : 1988

Nationalité : Hong Kong

Durée : 1h25

Genre : L'attaque du traversin géant

Acteurs principaux :Danny Lee, Pierre Kirby, Dewey Bosworth, Danny Raisebeck, Edowan Bersmea, James Chan

Wolfwood
NOTE
4.5/ 5


Il n'y a décidément aucune limite à la folie humaine.

C'est tout du moins ce que laissent suggérer les travaux de Godfrey Ho et Joseph Lai. En effet, quel meilleur exemple pour évoquer les déséquilibres mentaux que les œuvres d'hommes qui ont depuis bien longtemps laissé s'exprimer leurs délires créatifs ? Pour sûr, quelques esprits chafouins prétendront toujours que les géniteurs de ces films pouvaient plaider autre chose que la démence pour se disculper de leurs actes, comme un moyen de gagner de l'argent facilement en mettant en boîte le maximum de titres, sans chercher à donner dans la qualité. Il n'empêche que cette excuse mise à part, on aura bien du mal à nous ôter de l'idée qu'oser distribuer ce genre d'âneries, en espérant trouver un public pour les apprécier au premier degré, mériterait de relever du domaine psychiatrique.



Comme les connaisseurs pouvaient s'en douter, "Thunder Of Gigantic Serpent" s'inscrit dans cette tendance vénale du "2 en 1", avec son traditionnel caviardage de scènes additionnelles amenant le spectateur à intégrer une cellule psychologique pour peu qu'il essaye d'appréhender tous les tenants et aboutissants d'un scénario pour le moins abscons. Boarf, encore un "2 en 1" de chez IFD, soupireront peut-être les plus blasés. A tort, car si on est en terrain connu sur la forme, le fond s'avère lui franchement surprenant : bien loin des élucubrations ninjesques habituelles, c'est sur les monstres géants que nos bouchers de la pelloche ont ici jeté leur dévolu ! Et force est de reconnaître qu'ils ont encore une fois tapé dans le haut niveau, l'œuvre d'origine étant tellement agitée du bocal qu'elle aurait réussit à justifier à elle seule la rédaction d'une chronique bien garnie.

King of Snake le film original servant de base à cette tambouille.


Face à tant d'aberration, il s'avère ardu de choisir par où commencer. Etant donné qu'il faut bien placer les choses dans un contexte, commençons par l'histoire qui va servir de cadre à ce déballage de folie furieuse. Elle débute lorsque Salomon, un dangereux terroriste, décide de s'approprier une formule révolutionnaire, qui lui permettrait de faire pression sur les différents gouvernements de la planète. Prévoyant, notre méchant de service a bien pris soin de se cacher dans un autre film pour qu'on ne remonte pas jusqu'à lui, mais c'est sans compter sur un super soldat du nom de Ted Fast qui va se faire un devoir de mettre fin aux agissements de notre comploteur et de tous ses acolytes.






L'association des gros lards anonymes est fière de vous présenter ses nouveaux adhérents. [NdlR : en lien, la source ce cette private-joke un peu obscure]


Pendant que tout ce beau monde se crêpe la moustache, une bande de scientifiques travaille pour le compte de l'armée sur le fameux projet secret. Le but de leurs recherches est simple : trouver un procédé permettant d'augmenter la taille des êtres vivants. Pour la finalité d'une telle entreprise, par contre, c'est déjà plus confus, car on voit mal en quoi décupler le volume d'un crapaud peut présenter un quelconque intérêt pour l'humanité, autre que permettre à certains de la ramener dans un congrès de savants. Bref, toujours est-il que ce besoin de notoriété va très vite être réduit à néant, la faute à une attaque surprise de leur base de recherches, rappelant aux spectateurs amnésiques que si dans un film il y a une expérience gouvernementale, celle-ci mettra invariablement moins de dix minutes à péter entre les doigts de ses créateurs. Quand bien même une partie d'entre-eux réussirait à échapper au carnage, il faudrait compter sur une course-poursuite rocambolesque pour conduire les quelques fuyards à se faire copieusement massacrer par leurs assaillants. Une méthode qui, vous en conviendrez, s'avère d'une logique redoutable quand on cherche à découvrir un secret connu par une poignée d'hommes seulement.






Pour autant, ce que les agresseurs n'avaient pas prévu dans leur plan hasardeux, c'est la survie d'une de leurs cibles, laquelle va tout de même perdre dans la nature le fruit de ses recherches ou, tout du moins, une boîte ayant servi au procédé de mutation. Dès lors, une lutte acharnée va s'engager entre les divers protagonistes afin de s'emparer du précieux récipient, lequel a atterri par hasard entre les mains de Tin-Tin, une fillette se servant du pseudo aquarium pour abriter son serpent apprivoisé. Hélas, la boîte à présent irradiée va très vite transformer la bête en une créature gigantesque qui sèmera terreur et désolation dans tout le pays. Ne restera alors plus à l'armée qu'à étouffer l'affaire devant l'insistance de la police locale, tout en cherchant un moyen d'anéantir le redoutable reptile. D'ailleurs, tant que nous sommes à l'évoquer, autant de suite lever le voile sur cette atrocité de la nature, ce monstre répugnant, odieux, produit de la folie de l'homme et de son désir de se prendre pour Dieu. Eloignez les enfants, c'est abominable :




Oui, bon, à partir de là, on peut dire que la crédibilité du projet prend un sérieux coup dans les écailles. J'en ai peut être un poil trop fait, je m'en excuse. Mais, vous comprenez, c'est pas non plus super évident de vendre un film de monstres géants avec une telle bestiole, et entre un perpétuel regard ahuri ou un corps en mousse véritable, il est excessivement difficile de prendre cet animal au sérieux si on n'y met pas un tout petit peu du sien. Pour ne pas arranger les choses, il faut bien avouer que le réalisateur, déjà à moitié sinoque, n'était pas vraiment dans un grand jour. Car non content d'avoir l'une des créatures les plus croquignolesques de toute l'histoire du Septième Art, notre metteur en scène va se sentir obligé de filmer son monstre sous toutes les coutures, histoire d'être bien certain que tout les spectateurs visionnant son film, même les moins observateurs, soient intimement persuadés de ne pas avoir en face d'eux un terrifiant prédateur au sang froid, mais plutôt un manche à air peinturluré à la va-vite, ou bien une énorme chaussette de laine vaguement maquillée avec les moyens du bord. Consciencieux jusqu'au bout des ongles, il a même pensé aux aveugles, et eux aussi risquent d'être assez perplexes à l'écoute du son qu'émet l'animal, celui-ci s'approchant plus d'un mélange entre les cris d'une grenouille et d'un perroquet que du sifflement angoissant que l'on aurait été en droit d'attendre. Et encore, tous ces détails ne sont rien lorsque la bête reste relativement immobile, puisque lorsqu'elle passe à l'action c'est un vrai festival, surtout quand le reptile, au lieu de ramper, se met à voyager à l'écran par petits sauts successifs tel un kangourou pris de la danse de Saint-Guy, ou même s'enfuir par la fenêtre d'une cabane en flammes.


"- Qu'est-ce que c'est ?
- Je ne sais pas, on aurait dit un reptile qui volait".


Il serait pourtant réducteur de n'évoquer que les pauvres trucages relatifs à la bête : que ce soit de la destruction de maquettes en gros plan ou des voitures qui se mettent à exploser bien avant de toucher leur point d'impact, tout sera mis en œuvre pour nous permettre d'admirer le travail d'un responsable des effets spéciaux venant d'un monde parallèle, là où faire étalage de son incompétence est une marque de talent. Bien que la totalité du long-métrage dénombre un bon paquet d'erreurs, le clou du spectacle va être atteint lors de la sempiternelle arrivée en ville de la bête, où cette dernière se fera attaquer par des stock-shots de char d'assaut. Le procédé a beau déjà être très visible, il prend une ampleur encore plus ridicule quand on constate non sans effarement que le monteur ne s'est même pas donné la peine d'atténuer la différence d'éclairage entre les deux scènes, offrant une succession de faux raccords particulièrement grossiers.




Si les missiles mettent déjà une bonne journée pour arriver jusqu'à leur cible, faut pas s'étonner qu'il tienne encore debout l'animal.


En même temps, le budget étant ce qu'il est, on ne peut pas non plus ne s'acharner que sur ces personnes, tant tout dans ce qui défile à l'écran nous laisse supposer que ce n'est pas sur un vrai long-métrage que Godfrey a cette fois-ci posé ses sales pattes, mais plutôt sur un téléfilm monté par une chaîne câblée à deux doigts de la banqueroute. Car mises à part les péripéties de notre sympathique Craignos Monster, la vague histoire de polar mettant en scène nos policiers et leurs molles investigations se trimballe elle aussi son lot d'indigences, comme en témoigne ces pièces faiblement meublées, amenant les gangsters à se cacher dans une chambre absolument vide ou mitrailler leurs opposants en se mettant à couvert derrière la première commode qui leur passe sous le calibre.




C'est sûr que se planquer dans un vulgaire F1, c'est pas ce qu'il y a de plus évident.


Peu aidés par le script et le manque de moyens, il faut en plus reconnaître que les différents protagonistes du récit prennent aussi leurs rôles très au sérieux. Evidemment, ce n'est pas un défaut en soit, mais on aura beau dire, on aura beau faire, voir une bande de civils apeurés devant un stock-shot de monstre en mousse ne fait qu'accentuer ce décalage entre les prétentions affichées et le résultat obtenu, plongeant encore un peu plus le spectateur dans les délicieuses profondeurs de l'hallucination cinéphagique. Parmi tout ce beau monde, on passera rapidement sur les scientifiques, dont l'un est incarné par Danny Lee, illustre interprète du "Colosse de Hong Kong" et de "Super Inframan" (ou bien encore "The Killer" de John Woo dans un tout autre registre), mais qui ici ne fait que passer, ainsi que sur les militaires et autres gangsters, bien disposés à en faire trop dès qu'il s'agit de passer de vie à trépas.


"- Ah, bonjour monsieur Lee, j'aime beaucoup ce que vous faites.
- Euh oui mais non… vous n'étiez pas obligé de dire que j'étais là non plus…"


A vrai dire, s'il fallait nous attarder sur quelqu'un en particulier, ce serait sans aucun doute l'inspecteur en charge de l'enquête sur la tuerie du laboratoire. Chaw, puisque c'est son nom, est le genre de type à qui on ne la fait pas. Lui, les histoires de monstres géants, ça le fait bien marrer. On peut bien détruire la moitié de la ville, c'est pas ça qui l'empêchera de répondre au téléphone comme si de rien n'était, tout juste un peu de stress. Mais n'allez pas croire que c'est un planqué de la bureaucratie, loin de là. Aussi revanchard que Charles Bronson, plus expéditif que Clint Eastwood, c'est avant tout un vrai homme d'action qui n'hésitera jamais à donner de sa personne pour abattre froidement dans le dos les gouapes de tapette qui cherchent à occire son principal témoin. Même lorsqu'il s'agit d'interroger un suspect, Chaw impose sa différence avec éclat. Alors qu'un bon nombre de ses collègues parlementeraient des heures avec les pires racailles pour un bien maigre résultat, notre policier favorise lui l'intimidation, en appliquant à la lettre l'adage qui propose de tirer d'abord pour ensuite poser les questions. Bien entendu, cette méthode a ses limites, le suspect ayant toujours tendance à décéder prématurément avant de parler, surtout lorsque l'enquêteur ne se contente pas d'une simple balle mais de carrément toute une rafale de mitraillette. Que voulez-vous, il faut bien ça pour faire régner l'ordre et venir à bout de la vermine qui sème la terreur dans nos belles cités.


L'inspecteur Chaw met les pieds où il veut et pas seulement dans la gueule.


Le second de l'inspecteur, après avoir perdu son pari avec le costumier.


Il y a cependant un personnage sur lequel nous n'avons encore rien dit dans cette partie orientale, et c'est donc vers Tin-Tin que nous allons à présent nous tourner, sérieuse candidate au titre de gosse la plus énervante que la Terre ait jamais portée. Alors que les nanarophiles avertis croyaient avoir atteint le point de rupture avec le gamin de "La Nuit du Risque" ou celui de "Gameka et les 3 Super Women", Tin-Tin prouve que l'on peut encore pousser très loin l'auditoire au-delà de son seuil de tolérance, avec ses piaillements incessants, ses lamentations perpétuelles, sa tête incroyablement petite par rapport au reste du corps mais aussi son comportement ô combien suicidaire, l'amenant notamment à prendre la défense d'un gentil serpent géant. Ce dernier détail est par ailleurs l'un des autres points forts du récit puisque si on pouvait déjà noter que le scénariste avait un certain manque d'imagination, on sait grâce à l'intrusion de cette fillette qu'il était en plus accroc au cirage. C'est du moins l'hypothèse la plus sérieuse visant à nous éclairer sur ses agissements : comment justifier autrement le besoin d'intégrer au script une belle petite histoire d'amitié entre une écolière et un monstre gigantesque, voyant les deux complices jouer à la baballe ou encore à cache-cache au beau milieu de ces fusillades et autres complots internationaux, amenant petit à petit la trame de "Thunder of Gigantic Serpent" vers une fusion improbable entre "Godzilla" et "Belle et Sébastien" ?


Les serpents sont nos amis, il faut les aimer aussi…








Ah oui, en plus j'ai oublié de vous dire : elle joue effroyablement mal.


L'attente pour que notre reptile prenne sa maîtresse pour un apéricube restant hélas vaine tout du long, il faudra s'appuyer sur une poignée de gweilos pour périodiquement relâcher la pression. Pour autant, n'allez pas croire que ce segment est ennuyeux, puisqu'à part la tripotée de sbires en goguette mettant un point d'honneur à afficher leur manque de talent, c'est surtout avec le chef des terroristes, héritier avoué de Pierre Tremblay pour la malveillance du personnage, que nous allons atteindre une autre dimension de l'Actor's Studio, ce joyeux luron étant fermement décider à propulser dans le rouge tous les cabotinomètres traînant sur son passage. Que ce soit pour faire la démonstration de son pouvoir suprême en maltraitant des canettes vides ou partir dans des éclats de rires sardoniques, l'interprète de Salomon, Dewey Bosworth, en fait littéralement des gigatonnes dans le registre du salopard, agrémentant la moindre de ses interventions d'au moins un petit rictus ou regard malsain. Toujours prêt à en rajouter une couche même lorsqu'il lui faut simplement ouvrir la bouche, Dewey nous fera aussi craindre tout du long un claquage des muscles de la mâchoire, les siens et ceux des spectateurs, la faute à un surjeu facial hallucinant, qui ferait par moments passer Stuart Smith pour un comédien austère et subtil. De l'autre côté, le héros de la partie occidentale a bien du mal à exister, et compte surtout sur les bonnes vieilles méthodes pour faire marrer son public, comme passer des coups de fils à droite et à gauche sans passer par l'annuaire ou encore zoner au hasard dans les terrains vagues à la recherche de fripouilles à dézinguer. Pas de soucis, Pierre Kirby (déjà vu dans "Zombie vs. Ninja", "Ninja Untouchables" ou encore "Full Metal Ninja") remplit son contrat sans problème, offrant même au spectateur attentif un vibrant hommage à l'inspecteur Harry dans les dernières secondes du film, qui vient ponctuer à merveille une prestation qui n'avait pas besoin de cela pour sombrer dans le risible.






A tribute to Edowan Bersmea.




Pierre Kirby, à peine plus charismatique qu'une endive braisée.


Débauche d'absurde s'élevant avec légèreté vers les cimes du portnawak, "Thunder of Gigantic Serpent" est sans conteste une jolie pièce qui vous fera passer un agréable moment. Avec son scénario démentiel, ses effets spéciaux chaotiques ou ses acteurs à la rue, ce film enchaîne les pires délires pendant un peu moins d'une heure trente sans grands temps morts, fait assez rare pour être souligné. Certes, on peut déplorer l'absence d'une version française, le film ayant été visionné en anglais sous-titré grec. Cependant, nous pouvons faire confiance aux héritiers de la langue de Shakespeare pour eux aussi ajouter une plus-value non négligeable en matière de post-synchro outrageusement débile, avec une foultitude de dialogues atterrants et de prononciations de noms aléatoires, sans parler d'intonations de voix collant à merveille au jeu des comédiens et faisant croître de manière exponentielle les différentes carences de ces derniers. Un grand bravo à eux, il n'est pas certains que nous autres, Frenchies, aurions réussi à faire pire.

Quoiqu'il en soit, voici bien une nouvelle démonstration de ce que la folie peut offrir de meilleur. Et nul doute que du moment où la démence continuera de fermenter sous le crâne des hommes, il existera toujours des personnes pour trouver du génie même chez le plus grand des fous. Tant mieux.

Merci à Dao, Ghor et Nikita.


Addendum de John Nada :


Le film original utilisé par IFD est un film taïwanais de Chui Yuk-Lung sorti en 1982 sous le tire "King of Snake" (Daai Yi Wong alias Daai Se Wong). 

- Wolfwood -
Moyenne : 3.33 / 5
Wolfwood
NOTE
4.5/ 5
Rico
NOTE
2/ 5
Jack Tillman
NOTE
3.5/ 5

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation

Alors là, préparez vos fers à cheval, parce que ça risque d'être coton. Sorti en Allemagne sous le titre de "Terror Serpent", notre film a visiblement aussi connu une carrière en territoire hellène si on en croit la version visionnée, ce qui pourrait peut-être vous amener à le croiser en prenant vos vacances dans ces deux pays. Et encore, ce n'est pas gagné. On peut cependant, en cherchant un peu, dénicher et commander des transferts DVD-R américains de qualité discutable (vu la source souvent la VHS grecque ou un import asiatique) comme chez de "Attackafant Entertainment" ou "FHK cinema" (entre autres). 



Par chez nous, il semblerait que le film ait connu le même sort que "Robo Vampire" et soit resté totalement inédit. Dommage, dans un pays qui carbure aux anti-dépresseurs, il aurait fait un véritable carton.