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Chuck Norris
(1ère publication de cette bio : 2003)Consulter la filmographie / Consulter les films chroniqués
Icône incontournable de Nanarland, action-star ayant poussé la logique du film d'action reaganien jusqu'à confondre fiction et réalité, Chuck Norris est l'un des acteurs sans qui ce site n'aurait peut-être jamais existé. Exemple type de la star nanar à la portée de toutes les bourses, aussi connu du grand public pour ses somptueux nanars d'action des années 1980 comme « Invasion USA » ou « Braddock, Portés Disparus III » que pour sa série « Walker Texas Ranger », le karateka texan (d'adoption) est une figure majeure de l'univers de la série B et du nanar bourrin made in USA. Une icone même, dans la mesure où ce dernier poussa sa propre logique promotionnelle jusqu'à faire de lui-même un véritable personnage de fiction, inspiré des rôles extrêmement caricaturaux qu'il endossait sur les écrans.
Né le 10 mars 1940 à Ryan, Oklahoma, Chuck, qui s'appelait encore Carlos Ray Norris aux yeux de l'Etat civil, est l'aîné d'une fratrie de trois et ce détail aura une importance considérable sur sa carrière à venir, tant son frère Aaron comptera énormément par la suite, faisant office de béquille sur laquelle il pourra s'appuyer pour ne jamais perdre pied avec le milieu du cinéma. D'autant que le décès du troisième des frères Norris, Weiland, tué au Vietnam en 1970, ne sera probablement pas étranger à un très fort sentiment de solidarité entre les deux frères survivants. En tant qu'aîné, Chuck aide sa mère à élever les cadets, se substituant dans les faits à un père alcoolique et souvent absent. Disposant par ailleurs d'une filiation indienne via des grands-parents Cherokees, Chuck Norris dira avoir, dans leur jeunesse, souffert du racisme, phénomène qui l'amènera d'ailleurs à la pratique sportive pour pouvoir se défendre dans la cour de l'école. La future trilogie des « Portés Disparus » (dédiée à Weiland) emplie de toute la hargne possible contre les Viets et l'ascendance cherokee du personnage de Cordell Walker dans « Walker Texas Tanger » sont ils autant d'éléments cathartiques pour Chuck Norris ? Nous nous garderons bien de l'affirmer... ou de l'infirmer !
Après sa scolarité, le futur Chuck entre dans l'armée - ses deux frères feront ensuite de même - et se voit stationné en Corée du Sud au sein d'une base de l'US Air Force. C'est là que notre héros, alors policier militaire, découvre l'univers des arts martiaux, notamment le Tae Kwon Do et le Tang Soo Do, deux disciplines dans lesquelles il décroche une ceinture noire et de nombreux titres sportifs, devenant une figure du monde des arts martiaux, saluée par la presse spécialisée. Cette notoriété lui permettra de créer sa propre chaîne de dojos aux Etats-Unis. Comprenant que le développement du cinéma d'action lui offre une opportunité de diversifier ses affaires, il ouvre à Hollywood une succursale de sa chaîne de clubs de sport, notamment destinée aux acteurs qui souhaitent recevoir un enseignement martial leur permettant d'incarner des bagarreurs crédibles à l'écran. Ce centre, dont il assure la direction martiale, recevra la visite de quelques stars comme Priscilla Presley ou Steve McQueen, dont il assurera lui-même la formation. Il poursuit par ailleurs une belle carrière sportive dans le karaté, ne perdant que cinq combats au cours de sa carrière : en 1968, il devient champion du monde de karaté, catégorie mi-lourd, et garde sa couronne durant six ans, avant de se retirer du circuit sans avoir perdu son titre.
Si les contacts qu'il se fait dans le milieu du cinéma lui permettent d'obtenir quelques figurations non créditées dans des rôles d'instructeurs d'arts martiaux ou de petits voyous, c'est en 1972 qu'il entre dans le 7ème Art par la grande porte. En effet, pour les besoins de son film « La Fureur du Dragon », la superstar du cinéma d'art martiaux Bruce Lee recherche un artiste martial blanc susceptible d'assurer le rôle de Colt et de tenir tête au Petit Dragon pour la baston finale dans le Colisée. Le script précisant bien que la victoire reviendra encore une fois à Bruce, plusieurs karatékas américains, peu enthousiastes à l'idée d'être rossés à l'écran par un Asiatique, refusent tout net la proposition. Chuck, contacté à son tour en qualité de champion du monde de karaté en titre, accepte et le duel final de la « Fureur du Dragon » opposant le Chinois Tang Lung au mercenaire américain Colt devient légendaire, d'autant que les deux combattants ont fait ressentir à l'écran toute la violence quasi animale qu'ils étaient capables de donner, ne simulant ni les coups portés, ni les blessures reçues : l'un comme l'autre s'en sortiront avec plusieurs fractures et contusions, mais avec la satisfaction d'avoir tourné l'une des scènes de baston les plus mémorables du cinéma.
Face au Dragon, dans ce qui restera quoiqu'il arrive son plus grand moment de cinéma.
Chuck l'index levé dans « Massacre à San Francisco » (Slaughter in San Francisco alias Chuck Norris Vs. the Karate Cop, 1973), à l'époque où il jouait encore le méchant gweilo des productions hongkongaises...
Porté par le succès du film, Chuck aurait pu devenir le Petit Dragon américain (enfin, le Grand Dragon américain à barbe ou moustache...), d'autant que les propositions affluent. Cependant, tout excellent artiste martial qu'il soit, Chuck Norris cède à la facilité de l'autopromotion, s'incarnant quasiment lui-même dans « The Student Teachers », puis « Slaughter in San Francisco ». Ces tournages révèlent également l'une des faiblesses majeures de Chuck, qui contribueront par la suite à la nanardise intrinsèque de beaucoup de ses futures prestations : un jeu d'acteur totalement monolithique et inexpressif qui, s'il peut s'avérer efficace lorsqu'il s'agit d'incarner un second rôle de cogneur taciturne et silencieux, sera en totale inadéquation avec l'interprétation d'un personnage de premier plan plus travaillé. Les années 1970 voient ainsi Chuck traîner ses guêtres dans nombre de petits nanars gentillets, tatanant avec une certaine jovialité quelques malfrats ici (« Le Commando des Tigres Noirs », 1978), ou quelques camionneurs indélicats là (« Les Casseurs », 1977). Tranquillement, Chuck promène sa grande carcasse dans ces films peu ambitieux et bon an, mal an, commence à acquérir une petite réputation dans le milieu de la série B de baston.
Mais voilà que se profilent à l'horizon les années 1980 et tous ce qu'elles incarnent en terme de politique couillue et de besoin pour l'Amérique de se doter de héros populaires susceptibles de casser du communiste, de venger l'affront subi au Vietnam, d'étriller du Cubain à cigare ou de rosser de belle façon du déviant en milieu urbain ! Dès 1980, la « révolution conservatrice » amène Ronald Reagan à la Maison Blanche et voit débuter l'une des périodes les plus serrées de la guerre froide : les Etats-Unis doivent incarner aux yeux du monde le Bien, le Beau, le Vrai, le Transcendant et l'Immanent face à l'Empire du Mal et ses cauteleux et méphistophéliques séides. Hollywood comprend très bien la tournure que prennent les événements et s'adapte à la demande du public : les Bolcheviks vont manger sévère et la racaille rouge va être nettoyée au karcher ! Si le « Rambo » de Sylvester Stallone reste le personnage de référence de cette décennie, passant de paumé inintégrable à machine à tuer du coco par paquets de trente, Chuck Norris, repéré par le dynamique tandem de producteurs Menahem Golan et Yoram Globus, patrons de la Cannon, devient pour sa part la star du film d'action dit « Reaganien ». La trilogie des « Missing In Action » (« Portés Disparus » en VF), « Invasion USA », les deux « Delta Force », « Héros » sont autant de nanars sévèrement burnés, réponse couillue de l'Amérique conservatrice à ces hippies libéraux de réalisateurs pacifistes rouges des années 1970 ! Fini le tapettocentrisme d'Hollywood, la série B américaine pose ses burnes sur la table : on ne négocie pas avec les terroristes et les pieds, Chuck les met où il le veut, et c'est souvent dans la gueule. Incarnant une galerie de héros parfaitement interchangeables, Chuck va, à l'écran, regagner la guerre du Vietnam à lui tout seul, aller libérer les prisonniers américains en Asie du Sud-Est, repousser une invasion communiste aux Etats-Unis, botter le cul à des émules de l'Ayatollah Khomeiny et de Pablo Escobar, bref, devenir l'incarnation d'un certain fantasme vengeur d'une Amérique revancharde qui croit en son destin immanent de guide des nations.
Dans le même temps, Chuck, puisqu'il sauve le monde dans ses films, décide de lutter contre la drogue aux USA en créant l'association « Kick Drugs Out of America » qui aide les jeunes à sortir de la dépendance en leur apprenant à donner des coups de latte à droite à gauche. Toujours coaché par Golan et Globus, mais aussi de plus en plus par sa propre famille, Chuck Norris devient, en outre, un véritable produit marketing comme seules les années 80 en ont eu le secret. Il devient non seulement le héros de la série animée « Chuck Norris Karate Kommandos » le mettant lui-même en scène face à des hordes de nuisibles, mais une ligne de jouets ainsi qu'une bande dessinée voient également le jour. En politique, Chuck se radicalise de plus en plus et ne cache désormais plus sa proximité avec certaines figures de l'aile la plus droitière du Parti Républicain et de la Christian Coalition.
Chuck est une star, même en Afrique : en témoigne cette affiche ivoirienne peinte à la main.
Toutefois, le pire cauchemar de Golan et Globus survient en 1989 : le Mur de Berlin tombe et les hordes d'abominables communistes mangeurs d'enfants deviennent autant de gentils Russes susceptibles de consommer les bons produits américains (sauf quelques mafieux et terroristes revanchards dans telle ou telle production direct-to-video, mais ça ne suffit plus à alimenter la mode du film d'action reaganien). Le duo, connaissant par ailleurs quelques difficultés, lâche Chuck dont la cote s'épuise au début des années 1990 tant son image d'invincible karatéka colle de plus en plus mal avec un âge qui avance doucement mais sûrement et une demande filmique qui a changé. Poussé vers la sortie par les figures montantes du film de tatanes, comme Steven Seagal ou Jean-Claude Van Damme, Chuck Norris comprend que l'époque des têtes d'affiches et des visuels 4 x 3 à l'entrée des cinémas est terminée. Désormais, c'est à la télévision et dans le direct-to-video qu'il accomplira de nouveaux et nombreux exploits, le plus souvent sous la caméra de son frère Aaron. « Forest Warrior », « Sidekicks » ou « Top Dog » sont autant de films qui permettent à Chuck Norris de viser un public familial et troquer son image de tueur impitoyable contre celle de mentor, de grand frère sympa toujours là pour donner de bons conseils à la jeune génération, mais c'est surtout la série télévisée « Walker Texas Ranger » (1993-2001) qui fait renouer Chuck avec le succès. Loin d'Hollywood, c'est en famille que Chuck travaille. Outre son frère Aaron, son neveu Ed, son fils Eric, et sa belle-sœur Rebecca participent à l'écriture des scripts, à la production et au tournage des films.
Chez les Norris, tout se fait en famille et cette relative autarcie, loin des grandes boîtes de production, permet à Chuck Norris de poursuivre une carrière sur les écrans, autofinançant ses propres produits, tels la mini-série de téléfilms « L'Homme du Président » (qui connaîtra deux épisodes dont le second, fortement marqué par les attentats du 11 Septembre 2001, est une incroyable relecture des événements). Mais cette tentative de renouer avec la formule qui avait fait le succès des « Portés Disparus » et « Delta Force » dont « L'Homme du Président » est la synthèse, est un demi-échec. Chuck n'a plus 20 ans et s'il est toujours capable de lever haut la papatte pour balancer un low-kick bien senti dans la face d'un bad guy, le manichéisme primaire qui se dégage de cette série n'attire plus un public dont les goûts ont évolué.
Rangé des voitures, Chuck annonce en 2003 qu'il prend sa retraite cinématographique et décide de ne se consacrer qu'à ses activités caritatives.
...Mais les héros ne meurent jamais vraiment et l'appel du cinéma se fait rapidement à nouveau entendre. Mettant ses convictions chrétiennes évangéliques en avant (ce qu'il n'avait jamais vraiment fait dans sa carrière), Chuck revient dans les bacs DVD avec « Bells Of Innocence », un thriller fantastique où, confronté à Lucifer himself, il renvoie le grand cornu en Enfer par la peau du cul. Hélas, bien que prometteur sur le papier, ce pitch s'avère extrêmement décevant une fois mis en images. Toujours en 2005, il endosse une dernière fois le stetson de Cordell Walker pour les besoins du téléfilm « Walker, Texas Ranger : Trial By Fire », ultime épisode (pour l'instant) de la série éponyme. Cependant, toute une carrière placée sous les auspices du cinéma ultra-bourrin et patriotico-mogoloïde laisse quelques séquelles. Chuck Norris devient dans la mythologie populaire américaine l'icône du héros ringard dont il est de bon ton de ricaner. Un petit phénomène de mode, né sur Internet au milieu des années 2000, consiste ainsi à inventer et diffuser de petites assertions et autres proverbes au ton quasi religieux énonçant les nombreux exploits et les qualités magnifiées du personnage. Ces « Chuck Norris Facts », comme ils sont appelés, sont autant de variations sur le thème « Chuck Norris est tellement balèze que... » (« Certaines personnes portent un pyjama Superman. Superman porte un pyjama Chuck Norris. », « Chuck Norris peut gagner une partie de puissance 4 en trois coups. », « Il n'y a pas de sélection naturelle, juste des organismes que Chuck Norris décide de laisser en vie ou non. ») Cette mini-mode de fausses citations, comparable à celle des métaphores philosophiques de Jean-Claude Van Damme, connaît un succès, certes passager, mais suffisamment important pour que des institutionnels la reprennent, à l'image de l'hallucinant Mike Huckabee, ancien gouverneur de l'Arkansas et candidat aux primaires du Parti Républicain pour les présidentielles américaines de 2008. Dans un spot de campagne mêlant naïveté totale et second degré plus ou moins assumé, le candidat pose aux côtés de Chuck et égrène quelques-uns de ces petits proverbes en guise de base-line politique... avec un résultat des plus inattendus, puisque ce quasi-inconnu quelques mois plus tôt se classe alors parmi les challengers pour l'investiture du G.O.P.
Chuck fait avancer l'humanité à grands pas avec ce jean's-qui-craque-pas-quand-on-fait-du-kung-fu-avec.
Pas bégueule pour autant, Chuck Norris, manifestement conscient de son image, prouve qu'il a tout de même de l'humour et parvient à s'en amuser, multipliant les caméos ultra référentiels dans des comédies telles que « Dodgeball » avec Ben Stiller ou des séries télévisées, le plus souvent dans son propre rôle. Devenu un personnage plus grand que nature, son apparition surprise dans "Expendables 2" où il balance même des Chuck Norris facts en guise de punchlines est un des moments les plus réjouissants du film. On le voit encore au début des années 2020 apparaître dans son propre rôle à la télévision.
Bien que n'ayant plus tourné depuis plusieurs années, il annonce officiellement la fin de sa carrière en novembre 2017, pour mieux prendre soin de son épouse confrontée à de graves problèmes de santé. Il reste néanmoins actif vendant son image pour diverses opérations publicitaires et en continuant à soutenir l'aile la plus conservatrice du parti républicain en soutenant ouvertement la politique trumpienne dans des sites proches de l'alt right. Une fin de carrière somme toute pas si ratée que ça pour l'ex-Agent Matt Hunter à qui il ne faut pas baver sur les rouleaux pour ne pas finir avec la bite dans un tupperware, et l'ex-Colonel Braddock qui met ses pieds où il le veut et souvent dans la gueule.
Une pub de Chuck pour une banque d'Europe de l'Est, symbole assez singulier de la victoire du capitalisme occidental sur l'idéologie du bloc soviétique.
Le site officiel de Chuck : www.chucknorris.com (Le nom du site est suffisamment parlant... la page d'accueil aussi !)
Ce magnifique poster, en vente sur le site de Chuck...
L'adaptation en BD du dessin animé « Karate Kommandos », dessinée par un Steve Ditko complètement à la ramasse.
La gamme de jouets adaptée du dessin animé : c'est plus viril que les G.I. Joe !
Oui c'est bien un produit officiel malgré ce sosie publicitaire approximatif.
Films chroniqués
Filmographie
2012 - Expendable 2 : unité spéciale (The Expendables 2)
2005 - Le Sang du diamant / L'Artisan (The Cutter)
2004 - Dodgeball (caméo)
2003 - The Bells of innocence
2002 - L'Homme du président 2 (télé)
2000 - L'Homme du président (télé)
1996 – La colère du tueur (Logan's war: bound by honor) (télé) acteur et scénariste
1995 - Top Dog
1995 - Forrest Warrior (vidéo)
1994 – Hellbound
1993-2005 - Walker Texas Ranger (série télé)
1993 - Sidekicks
1991 - Tueur à gages (The Hitman)
1990 - Delta Force 2
1988 - Héros (Hero And The Terror)
1987 - Braddock: Portés disparus III (Braddock: Missing in Action III) acteur et scénariste
1986 - Delta Force
1986 - Le Temple d'or (Firewalker)
1985 - Portés disparus II (Missing in Action II: The beginning)
1985 - Sale temps pour un flic (Code Of Silence)
1985 - Invasion USA (acteur et scénariste)
1984 - Portés disparus (Missing in Action)
1983 - OEil pour oeil (Lone Wolf McQuade)
1981 - Horreur dans la ville (Silent Rage)
1981 - L'exécuteur de Hong Kong (Forced Vengeance)
1980 - Dent pour dent (An eye for an eye)
1979 - La Fureur du juste (The Octagon)
1978 - Force One (A Force of One)
1978 - Le Jeu de La Mort (Game of death – stock-shots du tournage de La Fureur du Dragon)
1977 - Le Commando des Tigres Noirs (Good Guys Wear Black)
1976 - Les Casseurs / Truck (Breaker! Breaker!)
1974 - Slaughter in San Francisco (Chuck Norris vs The Karate Cop)
1973 - The Student Teachers
1972 - La Fureur du Dragon (Way of the dragon)
1969 - Matt Helm régle ses comptes (The Wrecking crew)
1968 - Les Bérets Verts (The Green Berets - uniquement comme instructeur en arts martiaux)