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Le glossaire du Pr. Ryback

Y comme …

Quota ethnique



Appelé aussi Noir de service.

J’ai fait un rêve : Celui où au ciné, un héros de couleur ne serait pas obligé de céder son siège à un blanc dans un vaisseau spatial. Et puis il pourrait combattre le méchant monstre de l’espace et emballer les gonzesses sous les vivats de la foule en délire.

C’est à peu près en ces termes que Martin Luther King initia la lutte des afro américains pour l’égalité dans les années 60. Le gouvernement américain lança alors une série de lois sur la discrimination positive obligeant les réalisateurs à offrir aux acteurs noirs d’autres rôles que ceux de domestiques ou de porteurs qui leur étaient alors dévolus.

Bien sûr il y eut la Blaxploitation, films purement "noirs" (même s’ils furent très majoritairement tournés et écrits par des blanchettes), mais s'est vite posé la question des films plus généraux. Il a donc fallu intégrer des frères aux productions mainstream.

Le problème c’est que malgré la bonne volonté des producteurs, les mauvaises habitudes ont la vie dure et on vit dans les années 70 et 80 fleurir toute une série « d’emplois » et de stéréotypes qui firent rapidement basculer l’idée généreuse dans la caricature. En gros fallait trouver une place pour caser un noir, sans faire s’écrouler les ventes dans les bastions sudistes de Ploucville, Alabama.

D’où un certain nombre de rôles légèrement typés :

Le flic, généralement sidekick du héros blanc, adepte de la blague à deux balles et qui finit souvent par mourir dans les bras de celui-ci provoquant cinq bonnes secondes de désespoir (Noooooonnnn !!! A deux jours de la retraite ! Pourquoi ?), avant d’entraîner une vengeance forcément sanglante. Clint « Dirty Harry » Eastwood ou Chuck « Tous mes films » Norris en firent une grande consommation.



Mark Fraser, le flic rigolo de service au rôle très très valorisant dans Samuraï Cop



Le sergent, soldat sorti du rang mais pas trop haut quand même, le cigare coincé au bec, le verbe haut en couleur, toujours sur le dos de ses recrues mais en fait le cœur gros comme ça (ses hommes l’adorent). Il finit par mourir dans les bras de la jeune bleusaille en lui transmettant les valeurs d’ordre et de discipline du meneur d’homme de proximité. Après ça, les viets vont ramasser sévère.



Steve James toujours dans l'ombre de Michael Dudikoff alors qu'il a 10 fois plus de charisme que lui !



L’indic, petite frappe au physique de crevette qui se la joue à mort dans ses fringues en skaï. On sait qu’il faut parfois le rudoyer avec bonhomie pour en tirer quelques bons tuyaux sur le parrain local. Il finit souvent abattu par ce dernier, après avoir fouiné un peu trop pour le compte du flic blanc de service. C’est alors l’heure de sortir les flingues pour solder les comptes avec le malfaisant.



Une variante intéressante, le guerrier noir dans le péplum faisandé Supermen Contre Amazones. Mark Hannibal, pas franchement gâté par ce qu'on lui fait jouer.



Le bon copain rigolard qui apporte les joints pour la petite fiesta de fin d’étude dans la cabane isolée au fond des bois où, dit-on, rode un maboul à la hache qui fait rien qu’à tuer tout le monde. Il est généralement démembré le premier ce qui pousse le reste du groupe à aussitôt se séparer histoire de fournir des cibles plus faciles pour le maniaque.



Même à Hong Kong, l'adjonction d'un "gweilo noir" (ici Eugene Thomas qui fit toute sa carrière dans cet emploi) permet de mettre en valeur Alexander Lou dans "Super Ninja" et de vendre le film comme une production américaine.



Le vieux sage, rôle qui va aussi très bien aux indiens et aux asiatiques, qui transmet au jeune héros quelques sentences bien senties à tendance mystico-écologico pouet pouet sur dieu, la vie, la mort, le respect, l’amitié ou la nature (rayez les mentions inutiles). Il est généralement tué par les sbires du vilain promoteur qui lorgnait sur sa vieille cabane pour terminer son grand complexe immobilier. Par contre, le vieux sage a toutes les chances de réapparaître au bon moment sous forme de fantôme pour glisser quelques bons conseils à son jeune ami qui tente de confondre le bétonneur malhonnête.



James Bridges sidekick de l'imperturbable Romano Kristoff dans Tough Cop



Evidemment avec le temps, les rôles s’étoffèrent et l’aspect quota ethnique fini par perdre de son sens quand des noirs devinrent héros à part entière écopant hélas pour eux de sidekicks blancs tout aussi insupportables.

Derrière le cas des noirs, qui reste le plus emblématique, se posa rapidement celui de toutes les minorités composant le peuple américain. Il connurent avec un certain retard les mêmes perspectives d’ouverture après avoir officié dans les rôles bien balisés de méchants/flics/vieux sages de service.

Ces derniers temps, cette pratique commence à apparaître chez nous. Evidemment comme on a toujours 20 ans de retard sur les ricains, on en est encore à des rôles de bons copains des té-ci, un peu voyous, un peu bêtas, mais avec au fond, un cœur gros comme ça. Le fond du fond est atteint avec le sidekick arabe tchatcheur dont la quintessence est la performance particulièrement éprouvante de Saïd Serrari (dit le Jar-Jar Binks humain) dans l’épouvantable brouet Samouraïs .



Said Serrari dans Samouraïs. Et l'intégration des minorités visibles prend dix ans de marche arrière d'un coup...